La Presse Bisontine 139 - Janvier 2013
L’INTERVIEW DU MOIS
La Presse Bisontine n° 139 - Janvier 2013
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TRANSPORT
Lancement des lignes transfrontalières “C’est la vie de nos territoires qui est en jeu”
“C’est une expé- rimentation. On verra l’an pro- chain si nous confortons ou si nous arrêtons ces lignes trans- frontalières”, confie Marie- Guite Dufay (photo archive L.P.B.).
La présidente de Région Marie-Guite Dufay a officialisé la création des deux nouvelles lignes transfrontalières qui viennent de démarrer. Et se positionne sur le dossier ferroviaire.
rencontrent rejoignent les nôtres. Ils ont un déficit de main- d’œuvre sur les métiers de l’industrie notamment. Nous avons donc intérêt à unir nos démarches pour répondre à ces besoins. L.P.B. : Peut-on imaginer une formation commune entre nos deux pays ? M.-G.D. : C’est compli- qué car nos deux sys- tèmes de formation sont très différents. Le nôtre est public, avec des organismes comme l’A.F.P.A. ou
gression de 12 % de fréquentation dans le cadencement supplémentaire entre Pontarlier et Dole qui comprend trois trains. On a provoqué une offre. On a aussi rétabli un Saint-Claude-Besan- çon. L.P.B. : Qu’en est-il de la situation régionale ? M.-G.D. : La S.N.C.F. repose sur unmodè- le économique qui ne tient pas la rou- te. En Franche-Comté, on est en train d’entrer dans le rouge. C’est inimagi- nable de priver le Haut-Doubs de des- sertes T.G.V. On nous parle sans ces- se de rentabilité mais on n’a pas à opposer des considérations économiques à des fonctions d’aménagement. C’est la vie de nos territoires qui est en jeu. Autre exemple, il est anormal que ce soit la Région qui supporte le finan- cement des navettes entre la gareViot- te et celle d’Auxon. Cela nous coûte quand même 2,8 millions d’euros. L.P.B. : Vous semblez pessimiste… M.-G.D. : Je tire la sonnette d’alarme. On pourrait aussi parler du Belfort- Delle qui ne sort toujours pas dumaras- me. La Région a pourtant formalisé le plan de financement et R.F.F. ne don- ne toujours pas le feu vert. Autre sujet d’inquiétude sur les lignes du Haut- Jura et du Revermont qui vont néces- siter de gros travaux de maintenan- ce. Il faut instaurer un plan rail. L.P.B. : Comment réduire le budget T.E.R. ? M.-G.D. : En négociant avec la S.N.C.F. pour trouver des gains de productivi- té qui permettent de réduire les coûts. L.P.B. : Les relations franco-suisses ne tour- nent pas seulement autour de la question des transports. Que peut apporter la Franche-Com- té à la Suisse outre de la main-d’œuvre ? M.-G.D. : C’est déjà beaucoup ! En ter- me de formation, les Suisses sont très envieux de notre modèle. On entre dans une période où les problèmes qu’ils
L.P.B. : Pourquoi cette liaison Belfort-Delle n’est pas remise en service, alors qu’elle per- mettrait une connexion directe avec la nou- velle ligne L.G.V. ? M.-G.D. : Il ne se passe rien. R.R.F. est le maître d’ouvrage dans ce dossier. Je fais tout ce qui est enmon pouvoir pour que le Belfort-Delle soit inscrit au pro- chain conseil d’administration de R.F.F. L.P.B. : Le développement des relations trans- frontalières passe aussi par la mise en œuvre d’infrastructures de transport comme l’ont fait Bâle et Mulhouse ? M.-G.D. : Pour rapprocher les territoires, il faut du transport. Sans liaison cor- recte entre Besançon et Neuchâtel ou Besançon et Lausanne, la coopération transfrontalière ne donnera pas tou- te sa dimension. Mais c’est aussi par la culture et les loisirs, et pas seule- ment par les transports que l’on doit renforcer nos relations. Par exemple, j’espère une édition dans un an du Gui- de du Routard de l’Arc jurassien fran- co-suisse. La culture d’un côté, les transports de l’autre, sont deux moyens de faire avancer la coopération trans- frontalière. L.P.B. :Toujours dans le domaine du transport, le président du Conseil général du Jura a annoncé vouloir créer une liaison aérienne Dole-Paris pour compenser le fait, pense-t-il, que le Jura est négligé par la grande vitesse. Qu’en pensez-vous ? M.-G.D. : Dole-Paris par avion, c’est une plaisanterie ! Pour moi, c’est une trom- perie. On ne plaisante pas avec ces sujets-là qui engendrent des coûts importants. Le transport est un enga- gement. Or, je rappelle que Dole, par rapport à sa taille, est la ville de Fran- ce la mieux desservie par la grande vitesse. Il n’y a pas de liaison ferro- viaire grande vitesse plus fiable que le Dole-Paris. Propos recueillis par F.C. et T.C.
L a Presse Bisontine : Comment justifier la mise en place de ces nouvelles lignes ferroviaires ? Marie-Guite Dufay : Il s’avérait nécessai- re de proposer une nouvelle offre sur ce secteur où il n’y avait plus rien sur l’axe transfrontalier. La Régionmarque ainsi sa volonté de contribuer à un allégement de la circulation sur les routes au moment où les frontaliers les empruntent massivement. Ceci s’inscrit aussi dans le schéma de mobi- lité avec les Suisses. L.P.B. : Quels sont les itinéraires de ces trains ? M.-G.D. : On a une circulation entre Pon- tarlier et Travers, cadencée avec un autre train ralliant Fleurier où tra- vaillent de nombreux frontaliers. On propose aussi une autre liaison entre Pontarlier-Frasne et Vallorbe avec des correspondances vers Lausanne et la Vallée de Joux. On a travaillé en étroi- te collaboration avec les cantons de Neuchâtel et de Vaud. L.P.B. : Ce projet s’est concrétisé en un temps record ! M.-G.D. : Cela correspond à six mois de propositions. Quand nous avons dévoi- lé nos intentions, la S.N.C.F. nous a signalé que rien n’était possible avant 2014. Nous sommes montés au cré- neau pour raccourcir ces délais. Ceci grâce à la mobilisation politique entre les Suisses et les Français qui a for- tement pesé sur les C.F.F. et la S.N.C.F. L.P.B. : Êtes-vous confiante sur la réussite de l’opération ?
M.-G.D. : C’est une expérimentation. J’espère qu’elle va prendre. On verra l’an prochain si nous confortons ou si nous arrêtons. En même temps que je regarderai ce que donne cette ligne, je chercherai à associer à la Région et aux cantons suisses un troisième par- tenaire financier. Je considère que les entreprises suisses qui seront desser- vies doivent être de la partie. Ce ne serait pas normal que seuls les pou- voirs publics assument ces finance- ments. Ces entreprises sont capables
“Dole-Paris par avion, c’est une plaisanterie !”
le G.R.E.T.A. Le leur est complètement privé. Ce n’est pas simple de trouver des connexions. Mais de part et d’autre de la frontière, il y a une envie d’avancer sur cette question de la formation. J’espère que fin 2013 nous aurons des propositions sur un modèle d’apprentissage franco-suisse diplô- mant. L.P.B. : Est-ce que la Suisse intéresse toute la Région ou seulement les territoires fronta- liers ? M.-G.D. : A l’échelle de la région, la Suis- se est un grand partenaire. Je suis favorable à ouvrir la Franche-Comté à d’autres territoires. On doit travailler avec l’Alsace, la Bourgogne, mais aus- si avec la Suisse. Je me félicite qu’il y ait des liens entre le laboratoire Fem- to-S.T. et par exemple des laboratoires de Lausanne et de Neuchâtel. Il y a des enjeux d’innovation qui condi- tionnent le développement économique de nos deux pays. En dehors de cela, nos voisins suisses rêvent de la gran- de vitesse. Ils piaffent d’impatience sur la liaison Belfort-Delle.
d’investir dans des navettes de bus. Elles peuvent donc se mobi- liser aussi par substi- tution en faveur des trains. L.P.B. :Combien coûtent ces ouvertures de lignes ? M.-G.D. : Cela représente une enveloppe de 300 000 euros pour la Région. L.P.B. : Par les temps qui courent, c’est plutôt rare d’annoncer des ouvertures de lignes régionales ! M.-G.D. : On était déjà dans cette dynamique avec le cadencement des T.E.R. entrepris en 2011. On a fait des efforts et les résultats sont assez encoura- geants. On enregistre par exemple une pro-
“Un Guide du Routard de l’Arc jurassien.”
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