La Presse Bisontine 138 - Décembre 2012

La Presse Bisontine n° 138 - Décembre 2012

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ACTIVITÉ D’autres actionnaires La librairie Siloë Chevassu est sauvée À deux doigts de mettre la clé sous la porte il y a tout juste un an, la plus ancienne librairie de Besançon a pu redresser la barre, notamment suite à un vaste élan de générosité venue de la France entière.

Pierre Chevassu a retrouvé une certaine sérénité.

L es médias sont souvent vilipendés, ils sont parfois des outils redou- tables d’efficacité. Il a suffi d’un quart de page dans le quotidien La Croix pour que des lecteurs de la Fran- ce entière se mobilisent pour répondre à l’appel au secours de la librairie Che- vassu, située au 119, Grande rue à Besançon. Il y a un an, son gérant était désabusé. “Je me disais que si la ten- dance ne s’inversait pas, je jetterais l’éponge au 31 décembre 2012. La librai- rie cumulait alors les difficultés, notam- ment liées à la perte d’un de nos plus gros clients qui assurait 10 % du chiffre d’affaires. Je ne voulais pas en arriver

La Croix sur le thème “Un libraire vaut- il un panda ?”, (à l’époque où un zoo français avait dépensé des dizaines de milliers d’euros pour accueillir un couple de pandas). “À partir de là, les choses se sont enchaînées : nous avons eu droit à plus de trente articles de presse, y compris dans les grands magazines nationaux. On a récolté 55 000 euros de dons en quelques semaines.” Cette manne inattendue ne suffisait pour- tant pas. La librairie Chevassu avait besoin de 200 000 euros pour remettre à flot sa trésorerie. “Alors un éditeur a décidé d’entrer à hauteur de 26 % dans le capital de la librairie” ajoute Pier- re Chevassu. Aujourd’hui, même s’il manie encore la prudence, le gérant peut affirmer que “la librairie est tirée d’affaire.” Une S.A.S. est en cours de constitution avec le nouvel actionnaire et d’autres qui souhaitent également intégrer la struc- ture. Après avoir géré la crise pendant quatre années, Siloë Chevassu peut raisonnablement penser à l’avenir. Des projets sont sur les rails, notamment le développement de la librairie géné-

rale amorcée il y a déjà plusieurs mois. Honnête, Pierre Chevassu estime qu’il doit aussi “profiter, avec des guillemets, de la fin de la librairie Camponovo le mieux possible.” Même si le principal du chiffre d’affaires reste la vente d’ou- vrages et d’objets religieux, Chevassu devient peu à peu une librairie géné- raliste. Pierre Chevassu croit encore au “vrai métier de libraire. Ici, on n’au- ra pas les derniers livres de Hollande ou de Sarkozy, la recherche de qualité littéraire est plus que jamais notre prio- rité.” Un programme d’animations et d’ateliers lecture est d’ores et déjà pré- vu pour le début de l’année 2013. Une seule ombre dans ce tableau un peu plus rose pour la librairie Che- vassu : que le diocèse n’ait pas mani- festé plus tôt son soutien pour soute- nir la seule véritable librairie religieuse de Franche-Comté. J.-F.H.

INITIATIVE Plusieurs animations par semaine Les Gourmands veulent encore lire Une petite librairie indépendante tente de tirer son épingle du jeu dans le paysage commercial bison- tin, non sans mal. “Les Gourmands lisent” s’ac- crochent et innovent. A u fond du magasin, un bar. Le patron y fait déguster ses derniers whiskies ou sa récente trouvaille, un rouge gouleyant du Lan- guedoc. À l’avant de la boutique, Julie accueille ses clients, pas- sionnés de lecture, et les guide dans l’écheveau des titres de la rentrée littéraire. Au 12, rue Bersot, Les Gourmands lisent est un endroit né de la rencontre entre Jérôme Létoublon, caviste audacieux, et Julie Duquesne-Létoublon, libraire expérimentée.Un endroit pas comme les autres, original, qui se bat depuis sa création en août 2010 sous cette forme-là, pour convaincre que vivent en pleine harmonie “les nourri- tures terrestres et les nourritures spirituelles” résume la gérante de cet- te librairie 100% indépendante. Le challenge est louable, il est enmême temps très compliqué. Julie Duquesne-Létoublon ne cache pas ses inquiétudes. “Si nous n’atteignons pas un certain chiffre, nous serons obligés de fermer. Pour résister, il faudrait que nous fassions encore 20 ou 30 % de plus” lance-t-elle comme un appel au secours. Être libraire indépendante n’a jamais été une sinécure. Le constat est encore plus vrai aujourd’hui avec la montée en puissance des ventes sur Internet. “Internet a surtout bouleversé les rapports au temps. Dès qu’un livre sort, les clients le veulent immédiatement et n’acceptent plus d’attendre trois jours. Internet ne tue pas le livre, il tue les libraires” ajoute la géran- te des Gourmands lisent. La pédagogie est selon elle indispensable à une nécessaire prise de conscience des lecteurs, clients potentiels, qui auraient “perdu en curiosité” selon elle. Ils se fieraient trop à “l’hyper- médiatisation de certains livres.” C’est en piquant leur curiosité que le vrai libraire a encore selon la responsable, “un vrai rôle à jouer.” Depuis l’ouverture de cette librairie-caviste, l’activité est en hausse, la notoriété grandit mais “ça reste très compliqué avoue Julie Duquesne- Létoublon. Nous devons encore et encore nous faire connaître.Nous orga- nisons plusieurs animations par semaine, nous changeons notre vitri- ne tous les dix jours, nous organisons des dégustations.Que peut-on faire de plus ? Il faut que les gens apprennent à changer leurs habitudes et n’aient pas peur de pousser la porte !” Julie Duquesne-Létoublon veut aussi faire comprendre que “si on tue les libraires, on va finir par tuer les éditeurs de créations, car nous sommes leur seule vitrine. Jamais ils ne seront mis en avant sur Amazon par exemple. On continue à y croi- re, il faut que les gens comprennent les enjeux des librairies indépen- dantes.” Autrement dit, cliquer sur Amazon, il n’y a rien de plus facile, mais derrière ce geste anodin, c’est tout un réseau de professionnels du livre qu’on met en péril. J.-F.H.

à ce que mon banquier gagne plus d’argent que moi grâce à la librairie” raconte Pierre Chevas- su, le gérant, qui a déci- dé de déployer les grands moyens. Avec le soutien du G.I.E. Siloë auquel est affilée la librairie Chevassu, un appel a donc été lancé à travers les colonnes de

Il croit encore au

“vrai métier de libraire.”

SITUATION

36 000 ouvrages Les Sandales remontent la pente Après avoir

traversé quelques turbulences aussi, fermé son antenne

d’Audincourt et regroupé en un

Romain Méchiet dirige la librairie depuis le

E ncore une institution bisontine.Les Sandales d’Empédocle ont été créées à Besançon il y a trente ans et depuis, le lieu cultive son indépendance. Rachetée il y a deux ans par Hélène Des Ligneries (librai- re à Bordeaux), la librairie du 95, Grande rue reste un O.V.N.I. dans le monde du livre car elle est une des seules seul lieu ses activi- tés, Les Sandales d’Empédocle ont stabilisé la situation.

printemps. Il est le fils de Michel, le porteur de projet du Plazza.

générale soucieux de favori- ser la diffusion de la création éditoriale en apportant à des libraires les moyens de se développer et de conserver leur indépendance. L’A.D.E.L.C. est financée par les grands éditeurs qui rever- sent une petite partie de leurs bénéfices, distribués ensui- te sous forme d’aides aux librairies indépendantes. Malgré le soutien de l’A.D.E.L.C., Les Sandales ont également traversé une petite tempête. “Nous avons vendu au printemps 2011 le fonds de commerce voisin où étaient installés les rayons

rue ne cherche surtout pas non plus à tomber dans l’éli- tisme. “Nous ne sommes pas des ayatollahs de la culture ni des donneurs de leçons” tranche RomainMéchiet. Le dernier Goncourt, bien sûr qu’on le trouvera aussi aux Sandales. Mais pas que ça, loin de là. Les 250 m 2 de sur- face de vente abritent quelque 36 000 livres. Les Sandales, c’est un vrai bouillon de curio- sités. Sa stratégie face aux géants de la culture, aux liseuses numériques ou à Internet : l’accueil, le conseil et la qualité de service. J.-F.H.

jeunesse et tout regroupé dans nos locaux actuels, ce qui a servi à renflouer la trésore- rie. Depuis un an, les finances sont assainies, et ça repart” affirme Romain Méchiet, le directeur du site. Les San- dales d’Empédocle emploient 10 salariés, dont deux ex- Campo récemment embau- chés. L’avenir des Sandales, il sera assuré selon le directeur si “on reste dans notre métier de proximité, en étant un espa- ce d’échanges, de conseils, de rencontres, de débats d’idées, tout ce que sont Les Sandales.” La librairie du 95, Grande

librairies fran- çaises à compter dans ses action- naires (à petite échelle), l’A.D.E.LC. : asso- ciation pour le développement de la librairie de création, créée par des éditeurs de littérature

“Nous ne sommes pas des ayatol- lahs.”

Aux Gourmands lisent rue Bersot, on y trouve

à boire, et à lire.

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