La Presse Bisontine 138 - Décembre 2012

ÉCONOMIE

La Presse Bisontine n° 138 - Décembre 2012

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tissement. Un parc éolien rapporte aux collectivités locales porteuses de pro- jet quelque 600 000 à 700 000 euros de recettes par an, versés par l’exploitant. Les élus locaux du Lomont ne s’en sont jamais plaints. Au-delà de l’éternel et stérile débat entre les pro-vent et les pro-nucléai- re, le développement de l’éolien doit être vu avant tout comme un enjeu d’aménagement du territoire et de créa- tions d’emplois, notamment au béné- fice de secteurs ruraux dépourvus d’autre richesse que celle offerte par la nature et le vent. J.-F.H. Dernier épisode en date, ce système de Z.D.E. a été remis en cause, soi- disant pour favoriser le développe- ment de lʼéolien, par la toute récen- te proposition de loi, nommée “loi Brottes”, adoptée en première lectu- re à lʼAssemblée Nationale le 4 octobre dernier. De quoi faire planer encore de nouvelles incertitudes sur lʼavenir de lʼéolien et aboutir à un dévelop- pement anarchique de lʼéolien, pro- duisant lʼeffet contraire à celui sou- haité qui est justement de favoriser son développement. Repères Les Z.D.E. remises en cause A fin de développer les éner- gies renouvelables, lʼÉtat a mis en place depuis 2000 un dispositif incitatif : lʼobligation dʼachat de lʼélectricité produite. Ain- si, sous réserve de préserver le fonctionnement des réseaux, et dès lors que les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution quʼils exploitent, les distributeurs dʼélectricité doivent acheter lʼélectricité produite à partir dʼinstallations utilisant les énergies renouvelables aux exploitants qui en font la demande, à un tarif dʼachat fixé par arrêté ministériel. Depuis le 15 juillet 2007, les produc- teurs dʼénergie éolienne peuvent béné- ficier de lʼobligation dʼachat si les ins- tallations de production sont situées en zone de développement de lʼéolien (Z.D.E.). Les zones de développement de lʼéolien (Z.D.E.) sont définies par les préfets de département sur proposi- tion des communes ou des établis- sements publics de coopération inter- communale (E.P.C.I.) à fiscalité propre. Ces zones permettent aux infra- structures éoliennes de production dʼélectricité qui viennent sʼy implan- ter, de bénéficier de lʼobligation dʼachat. Lʼinstruction des dossiers de deman- de de création de Z.D.E. est réalisée au regard de trois critères : le poten- tiel éolien de la zone, les possibilités de raccordement aux réseaux élec- triques et la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. En fonction de ces critères sont définis : un périmètre géographique, la puis- sance installée minimale et maxima- le. Si la vitesse de vent est inférieu- re à 4,5 m/s à 100 m de hauteur en tout point de la zone, le préfet peut refuser la proposition de Z.D.E.

INNOVATION

Après la présentation du schéma régional

Vent contraire contre les éoliennes

L a Franche-Comté n’a pas encore pris le vent de l’éolien, c’est une certitude. Avec à peine 30 Mégawatts sur un seul site, le Lomont (1 Méga- watt alimente en électricité domestique 1 000 personnes), elle est une des régions les plus à la traîne en matière d’exploitation du vent. Région voisine, la Champagne-Ardenne affiche la bagatelle de 1 000 Mégawatts, c’est trente fois plus. Cherchez l’erreur… Les crêtes du Lomont constituent donc l’unique site franc-comtois à accueillir ces grandes pales productrices d’énergie. Un deuxième projet est en passe d’aboutir en Franche-Comté, du côté de Dampierre-sur-Salon et de Cham- plitte, en Haute-Saône. Mais le per- mis de construire, déposé, a déjà fait Alors que le message officiel prône un développement de l’éolien en France, la Franche-Comté reste à la traîne. Toujours un seul projet, peut-être bientôt d’autres, mais rien n’est fait pour dynamiser la filière. Enquête.

Malgré les annonces, toujours un seul parc éolien en Franche-Comté, celui du Lomont. Notre région est à la traîne (photo D.R.).

l’objet de plusieurs recours d’opposants devant les juridictions administratives. Deux autres projets pourraient émer- ger prochainement, c’est l’extension du champ éolien du Lomont, et la créa- tion d’un parc éolien du côté de Rou-

gemont avec l’installation d’une ving- taine de ces “moulins à vent” géants. D’autres dossiers sont à l’étude, mais on est encore bien loin des 600 Méga- watts, l’objectif pourtant affiché du schéma régional éolien présenté par le préfet de Franche-Comté fin sep- tembre, et validé le 8 octobre dernier. Mais ce schéma est tellement restric- tif qu’il étouffera certainement dans l’œuf plusieurs projets en réflexion. Il accumule en effet les “zones d’exclusion”. Un schéma que n’hésitent pas à fus- tiger les quelques acteurs locaux de l’éolien qui l’accusent d’avoir été voté dans la précipitation, suite à une consul- tation publique qui s’est déroulée en plein cœur de l’été, et sans même la contribution du Conseil régional de Franche-Comté. Parmi ces acteurs de l’éolien, une société de Fontain. “Opale énergies naturelles” a été créée en 2008 par Jean-Pierre Laurent, elle emploie 19 personnes. Le plus gros du travail de cette entreprise qui réalise 2,3 millions d’euros de chiffre d’affaires, c’est le développement de projets pour le compte de sociétés privées en tant

que consultant. Opale assiste également les collectivités locales por- teuses d’un projet, dans leurs choix et leurs démarches. Opale s’est ainsi imposé comme l’un des six principaux “déve- loppeurs” en matière d’éolien en France. Selon le responsable d’Opale, on ne fait toujours rien en France pour déve- lopper l’éolien. Chiffres à l’appui : “En 2010, on a créé 1 250 MW dans l’éolien. En 2011, seule- ment 875 et cette année on ne dépassera pas les 550 MW en France. On

Zoom L’éolien est en baisse en France L es raccordements dʼéoliennes ter- restres en France montrent une nette baisse en 2011. Le parc seulement 800 MW complémentaires. Fin décembre 2011, les projets en atten- te ont tendance à diminuer : 381 sont en file dʼattente pour une puissance totale de 5,4 GW (contre 391 projets pour 6,4 GW au 30 septembre).

“On vit dans une véritable hypocrisie.”

éolien sʼélevait à 6,7 Gigawatts à la fin 2011, en hausse de 13 % par rapport à fin 2010. Et la production éolienne sʼest également accrue de 24 %, à 11,6 TWh (chiffre provisoire) sur lʼensemble de lʼannée 2011. En revanche, après des années de croissance constante, les nouvelles capacités raccordées au cours de lʼannée 2011 sont en repli de 37 % par rapport à lʼannée 2010 avec

Outre le ralentissement enregistré au niveau mondial, cette baisse dʼactivité en France peut être expliquée par plu- sieurs raisons parmi lesquelles les dif- ficultés dʼacceptabilité locale, les conten- tieux et les récentes modifications réglementaires.

vit dans une véritable hypocrisie n’hésite-t-il pas à affirmer, en pointant du doigt certains lobbies pro-nucléaires. C’est une erreur d’opposer l’éolien au nucléaire. Il ne s’agit pas de rempla- cer le nucléaire par l’éolien mais il faut impérativement anticiper la fin des énergies fossiles, car elle arrivera imman- quablement un jour. J’espère aussi que ce sont les nouvelles générations de dirigeants qui feront changer les men- talités et non pas un accident nucléai- re en France.” Alors malgré les engagements officiels (Grenelle I, puis Grenelle II), la Fran- ce est toujours à la traîne. Si bien que des sociétés comme Opale ont dû s’adapter en “considérant que la clé du succès, c’était l’aménagement du terri- toire. C’est la raison pour laquelle nous avons embauché des paysagistes, des urbanistes, des ingénieurs, des juristes spécialisés dans l’environnement, pour notamment identifier les zones qui pré- sentaient le meilleur potentiel. Car mal- gré tout ce que peuvent dire les auto- rités, il y a du vent en Franche-Comté, plus que dans la plupart de régions allemandes où l’éolien est pourtant beaucoup plus développé.” Face aux difficultés de concrétiser des projets éoliens, les premières victimes sont les territoires concernés et les élus locaux. Ces derniers y voient évi- demment une manne financière faci- le et qui ne leur coûte rien en inves-

Jean-Pierre Laurent (à droite),

responsable de la société Opale énergies naturelles basée à Fon- tain, et Xavier Degois, un des cadres de l’entreprise.

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