La Presse Bisontine 136 - Octobre 2012

BESANÇON

La Presse Bisontine n° 136 - Octobre 2012

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SOCIÉTÉ

Abolition de la prostitution

Le Mouvement du Nid prône un changement des mentalités L’antenne de Besançon du Mouvement du Nid est favorable au projet de loi de Najat Vallaud-Belkacem d’abolir la prostitution. Il faut que l’État s’en donne les moyens dans un contexte où l’avenir d’associations locales comme le Nid est directement menacé.

Selon le mouvement du Nid, les prostituées à Besançon sont frappées par la misère sociale.

F in juin, Najat Vallaud-Belkacem a fait part de ses intentions de voir “disparaître” la prostitu- tion, appelant le gouvernement “à se donner les moyens de le faire.” Les propos de la ministre des Droits de femmes ne sont pas passés inaper- çus auprès de ceux qui militent pour une société sans prostitution. Mais habitués aux effets demanche, ils atten- dent que la déclaration abolitionniste de l’élue soit maintenant suivie de faits afin de clarifier une fois pour toutes la position de la France sur le sujet. Notre pays se dit “abolitionniste” et pourtant il tolère la prostitution à condition qu’elle s’exerce en dehors de la voie publique. Seul le racolage pas- sif, sur la rue, est condamnable. Le projet de loi de Najat Vallaud-Belka- cem va plus loin puisqu’il intègre la pénalisation du client comme c’est déjà le cas en Suède par exemple. La délégation bisontine duMouvement du Nid qui accompagne les prostituées

est attentive à la tournure du débat. “Nous sommes pour la pénalisation du client. En revanche, on est contre la condamnation pour racolage passif qui place les prostituées dans une situa- tion de délinquant sexuel, alors qu’elles sont victimes. Ce que nous voulons sur- tout éviter, c’est qu’un jour la prostitu- tion soit reconnue comme un métier et les proxénètes finalement comme des

doivent pas venir dissimuler la réali- té glauque vécue par la majorité des prostituées qui n’ont pas choisi de fai- re commerce de leur corps. “90 % des prostituées sont sous la coupe d’un proxénète. Il y a peut-être des filles qui se prostituent car elles l’ont délibéré- ment choisi, mais beaucoup d’autres, prises dans des réseaux, vivent une misère sociale” remarque Marion Beau- vois. La question est complexe. Pour le Nid, il faudra plus qu’une loi pour abolir la prostitution. “Si l’on veut que la prostitution disparaisse, il faut que les mentalités changent et que l’on tor- de le coup aux idées reçues. Les men- talités ne sont pas forcément prêtes” estime Solène, une des sept bénévoles du Nid qui vont à la rencontre des pros-

titués de Besançon pour leur proposer un accompagnement. Mais voilà, on ne retourne pas facile- ment un imaginaire collectif qui a éle- vé la prostitution au rang de plus vieux métier dumonde. L’information, auprès des jeunes en particulier, est un tra- vail de longue haleine. Il arrive aux bénévoles du Nid d’intervenir dans des établissements scolaires pour faire ce travail de sensibilisation. Le 15 novembre, l’association organise une journée de formation à Besançon à destination des travailleurs sociaux pour les aider à mieux appréhender la prostitution. Dans sa démarche abolitionniste, le gouvernement aurait intérêt à s’appuyer sur un réseau de structures comme le

Nid qui œuvrent au quotidien dans l’espoir de voir reculer la prostitution. Le paradoxe est que ces associations n’ont pas de moyens pour agir. L’avenir de l’antenne du Nid à Besançon est même directement menacé. Le contrat aidé de Marion Beauvois, seule sala- riée de l’association, s’est arrêté cet été. Il n’a pas été renouvelé faute de moyens financiers. Si la jeune femme continue son action en tant que béné- vole, elle espère une prise de conscien- ce de la part des pouvoirs publics sur la nécessité de soutenir des structures comme le Nid à Besançon qui n’ont pas attendu le projet de loi pour s’inscrire dans une démarche aboli- tionniste de la prostitution. T.C.

chefs d’entreprise” iro- nise Marion Beauvois, chargée de développe- ment à la délégation du Doubs du Mouvement du Nid. Si des prosti- tuées manifestent un peu partout en France en réaction au projet de loi de Najat Vallaud-Bel- kacem, revendiquant leur “statut” de tra- vailleuses du sexe, l’association estime que ces levées de bouclier ne

“Que les mentalités changent.”

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