La Presse Bisontine 135 - Septembre 2012

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Bisontine n° 135 - Septembre 2012

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L’INTERVIEW DU MOIS Jérôme Cart “Il faut un plan Marshall pour le commerce” Le président de l’Union des commerçants revient sur la polémique entre lui et l’adjoint au commerce et évoque les pistes visant à relancer le commerce de centre-ville. Jérôme Cart répond aux questions sur le budget de l’association, son salaire, la vente de son magasin. Entretien sans concessions.

Jérôme Cart (à gauche) accompagné du directeur de l’U.C.B. Philippe Vieille.

L a Presse Bisontine :Pouvez-vousmettre un terme à cette polémique entre l’Union des commerçants et laVille de Besan- çon née d’unmail envoyé de votre part en mai ? Le maire de Besançon et son adjoint vous reprochent d’avoir utilisé votre statut pour inciter vos sociétaires à voter Sarkozy aux der- nières élections. Que répondez-vous ? Jérôme Cart (président de l’Union des com- merçants de Besançon) : Cette histoire a pris trop d’ampleur ! J’ai envoyé un mail humoristique à une trentaine d’amis. Dans ces amis, il y avait 14 personnes qui sont des commerçants du centre- ville. J’ai bien envoyé un mail comme beaucoup de monde le faisait à cette époque. La Ville l’a récupéré habille- ment et de façon mensongère. Je n’ai pas d’ordinateur chez moi et tous mes mails personnels sont envoyés depuis mon mail de l’Union des commerçants. Il a été envoyé un samedi matin, hors demes horaires de travail.Dans ce mail , il y avait un tiers de personnes qui votait Mélenchon. C’était une boutade. Je ne comprends pas qu’un élumonte cela en épingle ! L.P.B. : A-t-il été envoyé à tous les adhérents ? J.C. : Non, je ne l’ai jamais envoyé aux 230 adhérents contrairement à ce qui été dit ! L.P.B. :Vous répétez que le commerce de centre- ville est en crise, la faute aux travaux du tram- way. Il semble que la braderie d’été ait bien fonctionné. Est-ce une éclaircie ? J.C. : Les retombées de la braderie d’été sont excellentes. L.P.B. : Preuve que Besançon attire… J.C. : C’est vrai mais cela reste occa- sionnel ! Les commerçants du centre- ville disent avoir réalisé des recettes exceptionnelles, pour certains 30 % de leur chiffre d’affaires (environ 400 ven- deurs) et nous avons pu montrer que lorsque les choses sont bien organisées, les gens viennent. Nous remercions la Ville pour les prestations en nettoyage, sécurité et le service commerce pour sa communication. Nous avons beaucoup communiqué dans la presse (environ 9 000 euros) et la braderie a monté en gamme. L.P.B. : Est-ce une lueur d’espoir pour les pro- fessionnels dont certains annonçaient des licen- ciements d’ici la fin d’année ? J.C. : Des commerçants nous ont dit qu’ils ont presque sauvé leur saison.Cela prou- ve que si le projet est beau et bien orga- nisé, le coût du parking et la difficulté d’accès sont gommés. L’attractivité est supérieure aux problèmes. L.P.B. : Cela veut-il dire que vous revenez sur votre demande de bénéficier de parkings gra- tuits ? J.C. : Non.Nousmaintenons notre deman-

de de la réduction des coûts du parking.

L.P.B. : Cette braderie est une source de reve- nu pour votre association. Peut-on clarifier le financement de votre structure ? J.C. : Nous n’avons pas de secret, la Vil- le a notre bilan financier.Lamairie nous concède le domaine public durant 2 jours (cela date de 1928) en vendant 2,10 euros du mètre linéaire par jour. Nous avons reversé 7 343,40 euros à la trésorerie municipale pour la braderie été 2012. Pour les deux braderies, nous réalisons 144 000 euros de chiffre d’affaires aux- quels il faut déduire les frais de per- sonnels (environ 4 000 euros par bra- derie), les salaires,lapublicité,la sécurité, les affiches. Pour la braderie d’été, nous réalisons un bénéfice de 45 000 euros et 35 000 euros pour l’automne. C’est le résultat d’un travail ! L.P.B. : La mairie vous apporte-t-elle une sub- vention financière ? J.C. : Zéro.Mais il faut reconnaître qu’elle nous concède un espace qui nous per- met de réaliser un chiffre d’affaires. L.P.B. :Vous avez repris en 2007 l’Union défici- taire au niveau des capitaux propres. Qu’en est- il aujourd’hui ? J.C. : C’est extrêmement bien géré, à l’image d’une grande entreprise. Dans deux ans, nous aurons récupéré la det- te contractée par nos prédécesseurs.Elle était en 2005 de 203 000 euros, et de moins 100 000 euros en 2006 (N.D.L.R. : JérômeCart a repris ennovembre 2007). En 2011 (trois ans après la reprise), la dette serade 40 000 euros.En2014,nous serons revenus à l’équilibre.

des Nouvelles Galeries disparaissait.

en a. Ce n’est pas le planFisac qui va nous sauver.Il faut aumoins trois ans pour établir un plan qui réponde aux problèmes. L.P.B. : Vous dites que les travauxdutramsuppriment des emplois. Pouvez-vous donner un chiffre ? J.C. : Nous n’avons pas de chiffres concrets mais nous savons que des commerçants ont prévu de ne pas recon- duire des contrats ou vont licencier. Je peux vous donner des noms.

L.P.B. : Ces résultats financiers vont-ils vous confirmer dans votre siège de président ? J.C. : Les élections ont lieu tous les 3 ans. La prochaine aura lieu en 2014. L.P.B. : Vous serez candidat ? J.C. : Cela dépend si je serai encore com- merçant ou non. Je suis encore gérant de “Cart encadrement” pour l’instant, donc j’ai encore une légitimité. Pour l’instant, j’ai l’impression que les gens sont satisfaits du travail.D’ailleurs,trou- ver des personnes qui puissent suppor- ter la pressionmédiatique, qui connais- sent le milieu associatif et qui ont la volonté, ce n’est pas si simple. L.P.B. : Vos épaules d’homme sont-elles assez solides lorsque les critiques fusent ? J.C. : Le harcèlement dont je fais preuve n’est pas simple. J’ai téléphoné à l’élu au commerce (N.D.L.R. :JacquesMariot) pour lui dire que je porterai plainte pour diffamation si les fausses informations continuaient à circuler. L.P.B. :Pourquoi tant de difficultés à travailler en harmonie avec les représentants politiques ? J.C. : Nous n’avons jamais mangé dans la main de la Ville et allons continuer l’opération “commerces en danger” jus- qu’en septembre. Après cette étape, il faut que les élus entendent notre appel à l’aide. L.P.B. : Ils semblent l’avoir entendu puisque le maire Jean-Louis Fousseret a annoncé le déve- loppement des Free pass pour favoriser le retour des clients au centre. Est-ce suffisant ? J.C. : Non. Nous avons fait 15 proposi- tions concrètes demesures d’urgence et lamunicipalité en invente une 16 ème qui ne répond pas à ce que nous deman- dons ! Un élu qui n’a jamais été dans le commerce ne peut pas avoir la percep- tion que nous avons d’autant que nos points résultent d’une étude. L.P.B. : Et pourquoi avoir menacé d’une opéra- tion de grogne lors du Tour de France (9 juillet) avant de la retirer quelques jours avant ? J.C. : Nous avonsmontré que nous étions capables de réfléchir et espérons un retour sur investissement.Beaucoup de commerçants nous ont reproché de n’être pas allés jusqu’au bout. L.P.B. :Qu’attendez-vous concrètement de laVil- le qui n’a pourtant pas toutes les cartes enmain pour sauver le commerce ? J.C. : Il faut unplanMarshall.Nous avons déjà proposé un plan rustine avec nos 15 demandes. Un plan de redéveloppe- ment est nécessaire où il faut évoquer Battant où48 cellules commerciales sont vides, du quaiVeil-Picard. Les solutions de redynamisation du centre-ville, il y

L.P.B. :On comprend que vous auriez pu vendre plus cher. Combien ? J.C. : Plus cher, mais je ne vous le dirai pas. Aujourd’hui, personne ne se plaint de la venue de Casino car des emplois ont été créés. C’est un service de proxi- mité pour la population. L.P.B. :Le centre-ville n’est donc pasmort à vous entendre mais encore faut-il un panneau indi- quant“Besançon Centre”depuis leTrou au Loup en venant de la R.N. 57. J.C. : Nous avons rencontré le préfet à ce sujet.Nousne voulonspasde l’appellation Centre historiquemais Centre-ville car la clientèle venue du Haut-Doubs et de Suisse représente 22,2%de notre clien- tèle (chiffre étude Client Roi).Le centre- ville, c’est un cadre, une ambiance, un service. L.P.B. : En imaginant l’après tramway, on peut envisager une forte plus-value pour les pas-de- porte du centre-ville après 2015. Mais ça,aucun commerçant n’en parle… J.C. : Le tram n’est pas un boosteur éco- nomique. Je suis allé à Edimburg, sur mes frais personnels,je précise.On nous a dit qu’il a fallu trois ans après les tra- vaux pour que les clients retrouvent leurs habitudes.Pour rattraper le chiffre d’affaires d’avant tramway, il faudra du temps.Imaginons que Jean-Louis Fous- seret ait investi aux Chaprais pour sa fille : je ne pense pas qu’il réagirait de lamême façon qu’il le fait en cemoment. Je dis attention car les conseilleurs ne sont pas les payeurs… Pour sauver ma boîte, je me rémunérais à 850 euros par mois pour payermes salariés.J’ai même montré ma fiche de paye à Monsieur Fousseret. Il ne me croyait pas… L.P.B. : Vous n’allez pas vous plaindre… J.C. : Non, mais je ne suis pas riche, loin de là. La Ville doit prendre conscience et écouter notre plan de redéveloppe- ment d’autant que l’offre commerciale se réduit au centre. Dans le commerce, il y a des choses à ne pas faire… L.P.B. : Lesquelles ? J.C. : Augmenter le prix des parkings et réduire le nombre de places. À Dijon, le coût du parking était de 3,80 euros par jour. C’est une mesure que Besançon peut faire. L.P.B. : Où en sont les pétitions “Commerces en danger” ? J.C. : Le 13 juillet,nous avions déjà 2 885 signatures,et 7 400mi-août,preuve que les clients sont derrière nous. Propos recueillis par E.Ch.

“Compenser la perte de 800 emplois de l’hôpital.”

Nous avons des personnes au sein de l’Union qui vivent aujourd’hui duR.S.A. (revenude solidaritéactive).Nous sommes làpour les orienter vers laC.C.I.(chambre de commerce et d’industrie) qui les aide. L.P.B. : Dans votre plan de redéveloppement, quel avenir pour le Plazza (toujours vide) et qu’attendez-vous des Passages Pasteur ou du déménagement deMonoprix sur le parking des Beaux-Arts ? J.C. : Dans notre plan triennal, il y a déjà la redynamisation du centre Saint-Pier- re. Pour le déménagement deMonoprix, beaucoup de commerçants y ont été hos- tiles car cela a grevé une partie des par- kings. Pour les Passages Pasteur,ce sera un élément d’animation mais il faudra surtout compenser la perte des 800 emplois liés au départ du C.H.U. Saint- Jacques. Toutes ces personnes consom- maient dans nos magasins. L.P.B. : Et pour le Plazza ? J.C. : Il faut rééquilibrer l’offre en favo- risant desmétiers qui ont disparu. Pour le Plazza, nous pensons à un grand pro- jet de sport à faire avec du stretching , des restaurants bio, du fitness… L.P.B. Mais qui a la main pour appuyer sur le levier sur ce dossier si difficile à boucler ? J.C. : C’est dans l’intérêt de laVille de se diversifier en accueillant diversmétiers. L.P.B. :Vous donnez des leçons mais vous avez vendu votre librairie à une grande enseigne ali- mentaire. Cela paraît paradoxal. J.C. : J’ai eu beaucoup d’offres de bou- tiques de vêtements, de magasins d’optique, de parfumeries et autres pro- duits financiers. J’ai dit non volontaire- ment pour m’orienter vers un produit qui quittait le centre,àsavoir l’alimentaire. Je suis fidèle à ce que j’ai toujours dit. J’aurai pu vendre à une grandemarque de sport mais je ne l’ai pas fait car je savais que le magasin d’alimentation

L.P.B. :Commentl’expliquer ? J.C. : Nous avons des administrateurs res- ponsables, tenons nos comptes et faisons des efforts sur les frais de personnel. L.P.B. : Justement, quel est votre salaire de président ? J.C. : Je touche 1 261 euros par mois brut et le directeur 1 800 euros bruts pour 35 heures alors qu’il en fait 45 ! On ne peut pas dire que l’on soit trop payé pour ce que l’on fait comparé à d’autres… Je ne vise personne mais que la mairie ne dise pas que nous ne faisons rien en terme d’animations. Nous sommes une des Unions les plus actives de France en terme d’animations.

“Plazza : salle de sport et restaurants bio ?”

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