La Presse Bisontine 132 - Mai 2012
L’INTERVIEW DU MOIS
La Presse Bisontine n° 132 - Mai 2012
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POLITIQUE
Alain Chrétien “Besançon a un problème de taille critique”
L a Presse Bisontine : Comment avez-vous reçu l’invitation de Jean-Louis Fousse- ret à venir donner votre sentiment,devant les élus de la C.A.G.B., sur le Pôle métropoli- tain Centre Franche-Comté dont la commu- nauté d’agglomération de Vesoul est une des cinq collectivités partenaires ? Alain Chrétien : C’était une bonne idée de la part de Jean-Louis Fousseret d’inviter ses collègues maires à venir défendre le Pôle devant les élus du Grand Besançon. J’étais le seul à pouvoir me libérer ce soir-là. Il était important pour moi d’être présent. Nous sommes trop enfermés dans nos certitudes et dans nos habitudes. J’ai cette envie d’aller regarder ce qui se passe à l’extérieur de Vesoul. Notre travail demaire est aussi de se remettre en cause en permanence pour savoir si notre analyse du contexte est exacte. C’était un bon exercice. J’ai pour habitude de dire que dans l’action publique, il y a le guidon et l’horizon. Le premier est la gestion du quotidien, le service rendu à nos concitoyens. Le second est la capacité à observer ce qui se passe ailleurs. Ce sont deux éléments que j’ai toujours en tête. L.P.B. : Vous n’avez pas hésité à provoquer l’assemblée en disant que Besançon était le petit poucet de Dijon. Pourquoi ? A.C. : J’avais envie de bousculer les idées reçues et de parler à mes collègues du Grand Besançon avec sincérité et franchise. Ce n’est pas un jugement de dire que les Vésuliens se sont souvent sentis méprisés par les Bisontins. Ce n’est pas non plus un jugement de dire que Besançon est le petit poucet de Dijon, ce sont des faits. Je n’étais pas surpris de la réaction de mes collègues. Il faut maintenant sortir de ce rapport hiérarchique pour construire quelque chose de nouveau. J’espère avoir transformé cette crispation en une prise de conscience. Besançon rencontre un problème de taille critique. Le Pôle doit pouvoir y remédier. L.P.B. : Beaucoup d’élus redoutent que ce Pôle soit une strate supplémentaire ajoutée à un millefeuille administratif déjà épais et qui n’apportera aucune valeur ajoutée au territoi- re. Que leur dites-vous ? A.C. : Ce n’est pas le cas. Le Pôle est une structure légère qui ne doit pas générer de coûts supplémentaires. C’est un outil qui formalise notre coopération, derrière lequel il y a une cuisine juridique.Mais l’important n’est pas là. L’objectif est que nos collectivités apprennent àmieux se connaître pour transmettre à nos successeurs des relations historiques construites. L’essentiel, c’est d’avoir envie de travailler ensemble et de s’enrichir de nos expériences respectives. Seul, on ne sait rien, à plusieurs on en sait déjà un peu plus. Il ne s’agit pas Le nouveau maire de Vesoul et président de la communauté d’agglomération estime que les cinq collectivités qui participent à la construction du Pôle Métropolitain Centre Franche-Comté ont tout à gagner, y compris Besançon qui est moteur dans ce projet.
A 37 ans, l’U.M.P. Alain Chrétien est candidat à la
candidature pour succéder à Alain Joyandet qui a dit qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat de député sur la première circonscription de Haute-Saône.
partageons
des
L.P.B. : Vous attendez que le Pôle défende une mise à 2 x 2 voies de la R.N. 57 entre Vesoul et Besançon. Le problème est que Pontarlier attend des aménagements identiques pour fluidifier le trafic vers la Suisse. Comment allez- vous vous mettre d’accord ? A.C. : Il y aura un problème d’affectation des crédits.Il faudra trouver ces solutions, fixer des priorités et éviter de faire du saupoudrage. Le dialogue n’obligera pas que l’on soit d’accord sur tout. Si sur certains sujets nous ne trouvons pas de terrain d’entente, il ne faudra pas en faire une catastrophe. L.P.B. : Le 17 mars, le Conseil municipal vous a désigné maire de Vesoul pour succéder à Alain Joyandet qui a décidé de se retirer provisoirement de la vie politique. Comment va-t-il ? A.C. : Il va bien, il est heureux que la transition se soit bien passée. Il est en bonne santé contrairement aux rumeurs. Il me laisse une liberté totale d’action. Je crois qu’il a coupé le cordon.Je n’aurais pas accepté d’être instrumentalisé de toute manière. Néanmoins, lorsqu’on se rencontre, on discute de nos dossiers. L.P.B. : Il ne briguera pas un nouveau mandat de parlementaire. Êtes-vous candidat à sa succession aux prochaines législatives ? A.C. : J’ai 37 ans. J’aime l’action publique. C’est une opportunité qui s’offre à moi et qui m’intéresse. Je suis candidat à la candidature. Mais ce n’est pas moi qui décide. Il faut tout d’abord que j’aie l’investiture de Paris et que localement ma famille politique accepte de se rassembler derrière moi. L.P.B. : Si Nicolas Sarkozy est réélu président, Alain Joyandet peut-il être à nouveauministre ? A.C. : Alain Joyandet est toujours très présent à Paris. C’est vrai qu’il se retire temporairement de la politique, mais je ne suis pas sûr que cela réduise ses chances de revenir un jour dans un gouvernement. Il peut donner encore beaucoup à son pays. Lorsque le président Sarkozy est venu à Besançon, le fait qu’il fait l’honneur àAlainJoyandet de parler avant lui est un signe qui ne trompe pas à mon sens.
de créer une agence économique du Pôle, ou un office du tourisme du pôle. Je comprends que certains de mes collègues soient réticents, car chaque nouveauté est perçue comme une complication supplémentaire et pas comme un élément novateur. En revanche, je serais disposé à contribuer financièrement à l’A.U.D.A.B. (agence de l’urbanisme de l’agglomération du Grand Besançon) pour que tout le Pôle puisse bénéficier de sa capacité d’analyse et d’expertise. L.P.B. : Vous faites parties des jeunes élus convaincus de la nécessité de renforcer les liens intercommunaux ? A.C. : Ma génération est la première à vivre l’intercommunalité comme un fait acquis. La génération précédente l’a construite, percevant l’arrivée de l’intercommunalité comme un mal nécessaire parfois.Or, pour les collègues demon âge, de gauche comme de droite, c’est un outil indispensable à disposition des maires. L.P.B. :Est-il besoin de créer un Pôle pour obte- nir cette coopération entre les cinq agglos de Vesoul, Besançon, Pontarlier, Dole et Lons-le- Saunier ? A.C. : La loi nous permet de créer un Pôle qui existe en tant qu’entité juridique. Cela donne un cadre plus formel à notre coopération et nous apporte aussi la reconnaissance vis-à-vis des autres institutions. Nous aurions pu créer en effet un club métropolitain, avec des rencontres informelles entre lesmaires,
L.P.B. : Pour autant, vous dites que la liaison ferroviaire Besançon-Vesoul n’a aucun sens si elle n’est pas envisagée dans le cadre d’un projet d’aménagement plus large. Qu’entendez- vous par là ? A.C. : La Lorraine étudie actuellement un débouché ferroviaire vers le sud. Deux scénarios sont à l’étude. Le premier est une ligne Épinal- Chalindrey, et le second une liaison par Lure et Belfort avec une connexion à la nouvelle ligne T.G.V. Je propose que nous invitions nos voisins à étudier un troisième scénario à savoir une liaison Metz, Nancy, Épinal, Vesoul, Besançon. C’est à cette condition me semble-t-il que la liaison ferroviaire Besançon-Vesoul qui n’intéresse personne vue de Paris et qui est infinançable puisqu’elle est estimée à 600 millions d’euros, prend tout son sens. Besançon deviendrait le réceptacle de tout le transit lorrain. Je le répète, défendre une liaison Besançon-Vesoul n’a pas d’intérêt. Mais proposer à la Lorraine une alternative qui lui ouvre les portes du sud en passant par nos villes, alors le projet prend une tout autre dimension. Nous devons trouver des arguments convaincants si nous voulons que l’on s’intéresse à nous. Nous pouvons porter cette idée dans le cadre du Pôle. L.P.B. : Pour autant, vous dites aussi que la nouvelle gare T.G.V. d’Auxon ne vous intéresse pas ? A.C. : Non. La nouvelle gare nous intéresse,mais elle ne nous regarde pas car d’un point de vue institutionnel, nous ne sommes pas parties prenantes de ce projet. On ne peut donc pas faire de l’ingérence. En revanche, nous sommes très attentifs aux types d’activités qui vont s’implanter dans son périmètre, aux prix dumètre carré de terrain, car nous devons tenir compte de ces paramètres pour adapter nos projets àVesoul.Toutefois, je pense qu’il y a un problème d’enclavement de cette gare.Avant de travailler sur les projets ferroviaires,je crois qu’il faudra défendre la liaison routière Besançon-Vesoul. Car depuisVesoul, je vous garantis que c’est une gageure d’aller à la gare.
problématiques communes que rencontrent les villes moyennes sur la redevance incitative par exemple, ou le rapport entre la ville centre et les communes environnantes. Pour Vesoul, ce pôle va nous permettre de faire du lobbying. J’espère que mes collègues défendront
“Faire du lobbying.”
des dossiers qui nous intéressent comme je m’engage à soutenir ceux qui les concernent. Je suis prêt à soutenir Lons- le-Saunier qui veut défendre sa formation en rudologie. J’attends en retour que l’onm’aide à défendre l’I.U.T. deVesoul. L.P.B. : Des élus comme Jean Rosselot (U.M.P.) regrettent que ce Pôle ne repose pas sur une coopération avec Dijon. Mais selon vous, un rapprochement avec la capitale bourguignonne aurait été prématuré, n’est-ce pas ? A.C. : Besançon a besoin de conforter son rôle de capitale régionale face au pôle dijonnais et à l’Alsace du Sud. Une fois que lePôleMétropolitainCentreFranche- Comté aura trouvé son rythme,il faudra que l’on envisage des alliances avec d’autres partenaires. Jean-Louis Fousseret sera alors plus à l’aise pour négocier avec Dijon s’il a derrière lui les présidents des différentes agglomérations du Pôle. Prenons la question de l’enseignement supérieur par exemple. Si Besançon part seule la fleur au fusil pour défendre l’université, Dijon ne saura même pas qu’il y a un I.U.T. important àVesoul.Grâce auPôle,Jean- Louis Fousseret défendra l’université dans son ensemble.Nous ne venons pas servir la soupe aux Bisontins mais défendre des intérêts communs. L.P.B. : Quels grands dossiers voudriez-vous que le Pôle traite ? A.C. : L’université, l’enseignement supérieur sont des questions importantes ainsi que la redevance incitative. Je souhaite que l’on aborde aussi la question des gens du voyage et de façon plus factuelle la liaison ferroviaire Besançon- Vesoul.
mais nous aurions rapidement atteint nos limites. L.P.B. : Néanmoins, que peuvent partager la communauté d’agglomération deVesoul avec la communauté de communes du Larmont. Où est la cohérence ? A.C. : La pertinence est de rompre l’isolement et d’intensifier les échanges d’expérience. Même si nous ne sommes pas physiquement liés à Pontarlier, nous
“Le petit poucet de Dijon.”
Propos recueillis par T.C.
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