La Presse Bisontine 128 - Janvier 2012

DOSSIER

La Presse Bisontine n° 128 - Janvier 2012

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JUSTICE : AU CŒUR D’UN PROCÈS D’ASSISES

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TRIBUNAL Dans les coulisses d’un procès d’assises Trois coups de couteau, un rein en moins : cinq ans de prison Malgré ses excuses, Murad Yilmaz a écopé de cinq ans d’emprisonnement pour avoir, sur fond d’honneur et de vieilles ran- cunes, blessé de trois coups de couteaux un ex-ami. La cour d’assises du Doubs jugeait cette affaire qui fait jurisprudence. Déroulé du procès. Au travers d’une affaire judiciaire, La Presse Bisontine a assisté à la dernière session des assises du Doubs qui juge les affaires criminelles. La rédaction vous explique comment un citoyen peut devenir juré, avec le témoignage de plusieurs d’entre eux. À l’heure où 126 des 163 procureurs de la République ont signé une pétition dans laquelle ils dénoncent la multiplication des textes juridiques et le manque de moyens, état des lieux à Besançon avec Alain Saffar, le procureur de la République de Besançon. Va-t-on vers un allongement de la durée des délais d’audience ? Qu’en est-il de l’application des peines ou de la réforme de la garde à vue ? Éléments de réponse.

L’avocat général Claude Ruard a

requis 6 ans d’emprison- nement.

S ans broncher, il a encaissé la sentence. Les deux poli- ciers avec lui dans le box des accusés, l’un à sa gauche, l’autre à sa droite, lui ont passé les menottes. Et sans sourciller, Murad Yilmaz s’est exécuté en pré- sentant ses poignets. Après deux jours de procès, le président du tribunal de la cour d’assises du Doubs a pronon-

L’affaire. Le 14 juin 2010, vers 22 h 25, un hom- me gît à terre entre le square et le monument aux morts du village de Fesches-le-Châtel, dans le Pays de Montbéliard. Ses viscères sont à l’air. Des coups de couteau l’ont touché à la cuisse gauche et un autre dans le bas- ventre. Badauds et témoins de la scène se regroupent autour du blessé pendant que la gendarmerie procède aux pre- mières constatations et auditionne. L’homme à terre est Zoran, surnom- mé Zocco, alors âgé de 30 ans. Son frè- re et sa sœur sont là, à côté de lui pour le rassurer. “Tout de suite, Monsieur Zoran désigne Murad comme son agres- seur en donnant deux fois son prénom” explique l’officier de police judiciaire présent comme témoin à la barre du tribunal. Quelques minutes avant d’arriver sur les lieux du drame, les gendarmes reçoi- vent un appel d’un dénommé Murad qui se dit victime d’une agression. Son index droit est entaillé d’un coup de couteau. Sa blessure, bénigne, ne néces- site pas d’interruption temporaire de travail (I.T.T.). Il souhaite porter plain- te. À 23 heures, les gendarmes se ren-

cé le verdict : cinq ans d’emprisonnement, dont quatre fermes, pour ce jeune homme de 25 ans dont ce n’est pas la première condamnation. L’accusé a présenté des excuses, mais il était trop tard, les charges et son passé étant bien trop lourds. “S’il faut donner mon rein pour me faire par- donner, je le ferai” a-t-il lâché. Presque

dent chez lui. L’homme est placé en garde à vue. Comment la rixe éclate. Murad et Zocco se connaissent depuis l’enfance. Quelques soirées ensemble, des connaissances en commun, font que les deux garçons se sont déjà ren- contrés dans leur petit village. “C’était juste bonjour” dit l’accusé. Cette rixe serait intervenue à la suite d’une baf- fe infligée par Monsieur Yilmaz à une personne handicapée du village. “Fran- chement, ça se fait pas de frapper un handicapé, j’ai voulu m’expliquer avec lui, car moi aussi, je suis handicapé” dit Zoran, malvoyant. L’accusé donnera d’autres versions, peu crédibles. S’il en est venu aux mains, c’est parce que Zocco avait vou- lu qu’il revende de la drogue. Murad aurait refusé et Zocco l’aurait mena- cé lui et sa famille. L’arme. Durant tout le procès, Murad Y. ten- te de prouver que son adversaire avait lui aussi un couteau. Il ne convaincra pas. Aucun témoin ne parlera de deux couteaux, mais seulement d’un cou- teau d’électricien que tenait l’agresseur.

pathétique. La Presse Bisontine qui a assisté au procès propose de le faire (re)vivre d’autant qu’il fait jurisprudence. Après une décision de justice émise en 1962, c’est seulement la seconde fois que le chef de “mutilation intérieure” est reconnu pour un coup de couteau qui a touché un organe interne.

Le président de la cour d’assises François Ardiet.

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