La Presse Bisontine 127 - Décembre 2011

ÉCONOMIE

40

La Presse Bisontine n° 127 - Décembre 2011

INNOVATION Une start-up qui monte Percipio Robotics ou l’art de saisir l’infiniment petit Spécialisée dans la conception de systèmes robotisés de micro- assemblage, Percipio Robotics S.A. a mis au point une technologie qui pourrait bien révolutionner le travail des horlogers. Zoom sur une jeune entreprise innovante de Témis.

D’ abord il y a le nom de l’entreprise, “Percipio Robotics”, qui intrigue. “Percipio signifie “saisir” en latin dans le sens d’attraper, de com- prendre et de recueillir. C’est un beau jeu de mot vis-à-vis de notre métier” répond David Hériban. À 31 ans, il est le jeune P.D.G. de cette start-up qui n’a pas fini de faire parler d’elle. La socié- té basée à Témis détient une technologie qui intéresse déjà un certain nombre de secteurs industriels de pointe manipu- lant des pièces minuscules. Per- cipio Robotics leur facilite l’accès à un monde de Lilliputiens qui devient praticable grâce à des micro-pinces de la taille d’une phalange capables de prendre, de déplacer et d’assembler des objets de 10 microns, pour les plus petits (par comparaison un globule rougemesure 5microns), à quelques millimètres pour les plus gros. “La pince fabriquée à Besançon est aussi agile que deux doigts humains” explique David Hériban. Fixées à un

robot, ces micro-pinces forment un outil redoutable permettant d’agir vite et avec précision pour celui qui les manipule. Sur cette base, Percipio Robo- tics a mis au point un petit bijou de technologie de la taille d’un ordinateur portable. Il trouve- ra sa place sur l’établi des hor- logers qui assemblent avec habi- leté les mouvements de montres mécaniques un “micros” visé à l’œil et une paire de fines pinces

caméras lui permettent de visua- liser sur un écran les micro- pièces qu’il manipule. Grâce à cet outil, on peut procéder par exemple à l’installation de pierres d’horlogerie dans les ancres (par- tie du mouvement)” poursuit le P.D.G. Avec ce robot, les limites de l’assemblage de mouvements mécaniques à grande compli- cation pourraient être repous- sées. Mais Percipio Robotics n’a pas conçu cette machine pour qu’elle remplace l’horloger. Au contraire : “On garde l’homme là où il est intéressant. C’est lui qui est intelligent, mais on lui donne simplement de très bonnes mains.” Cela s’appelle la “cobo- tique”, quand l’homme et le robot se complètent. Le prototype sera opérationnel en février 2012. À partir de là, David Hériban pourra se déplacer sur les salons horlogers pour présenter cette technologie dont le prix de mar- ché, en fonction des options, devrait varier entre 50 000 et 100 000 euros. L’entrepreneur

Dans le 13 ème concours national Talents de la création d’entreprise, David Hériban (à droite) a reçu un prix de 8 000 euros à Paris. En 2008, il avait déjà reçu un Micron d’or à Micronora (photo Ancian Communication).

a déjà quelques contacts de manufactures suisses qui se disent intéressées par le concept. Le secteur du bio-médial, de l’aérospatial, des fabricants de micro-systèmes sont aussi des cibles. Tous les espoirs sont donc per- mis pour cette jeune start-up qui doit beaucoup au labora- toire bisontin Femto-St dont l’ingénieur est issu. “Femto, c’est la plus grande équipe de recherche mondiale en terme de micro-manipulation” rappelle le chercheur qui a fait ses études à l’E.N.S.M.M. Il a quitté ce labo, internationalement reconnu,

animé par l’ambition de valori- ser le fruit des recherches. “Ce qui m’attirait, c’était de sortir le prototype du laboratoire. Le problème d’un chercheur est que, quand il trouve, tout s’arrête ou presque. Il me semble que nous n’exploitons pas suffisamment nos recherches. Personnellement, cela ne pouvait pas me satis- faire.” Ambitieux, il s’est jeté dans le bain de l’entreprise mais a gar- dé des liens étroits avec le labo- ratoire Femto-St. D’ailleurs cinq chercheurs sont dans le capital de l’entreprise, dont Michaël Gauthier qui à un pied dans le

labo et un dans la société. “Nous avons avec ce laboratoire une convention de transfert qui nous autorise à exploiter ses techno- logies. On utilise également ses salles de manipulation, sonmaté- riel.” Si demain les perspectives commerciales s’ouvraient pour la société, les robots seraient assemblés dans les locaux de Femto-St pour commencer. En attendant, Percipio Robotics, et ses trois salariés, vend sa matiè- re grise. Le bureau d’études résout des problèmes de mani- pulation que lui soumettent des entreprises. T.C.

à la main. La micromanipula- tion “Made in Besançon” pour- rait venir modi- fier cette pratique ancestrale du métier. “Nous avons travaillé sur le principe de la téléopération. Installé derrière son établi, l’opérateur pilote très simplement le robot avec un joystick. Des

“De très bonnes mains.”

Made with FlippingBook - Online catalogs