La Presse Bisontine 109 - Avril 2010

DOSSIER

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La Presse Bisontine n°109 - Avril 2010

Quelques biens en vente actuellement…

Point de vue d’un conseiller en patrimoine Lionel Estavoyer : “Trop de changements, trop vite” Conseiller en patrimoine à la Ville de Besançon, Lionel Estavoyer explique les dérives qui font que certains joyaux ont perdu de leur cachet. Patrimoine en danger ?

Appartement à Besançon : 420 000 euros Dans secteur recherché, superbe loft de 165 m 2 , avec pres- tations de grande qualité, comprenant grand séjour très lumi- neux avec accès sur terrasse, 2 chambres dont une suite parentale, chauffage individuel gaz, garage et place de par- king privé. Prix : 420 000 euros. Renseignement : Square Habitat , 26, rue de la république à Besançon. Tél. : 03 81 50 40 00

“L orsque j’aperçois les trot- toirs des portes cochères coupés de moitié pour permettre aux voitures de passer, j’enrage.” Lionel Estavoyer est une de ces personnes qui pense que l’héritage historique peut se marier avec les nouvelles attentes enmatière d’immobilier. Le conseiller en patrimoine de la Ville de Besançon ne cache toutefois pas son inquiétude quant au devenir de certaines bâtisses bisontines de caractè- re. Pour preuve, depuis la publi- cation de son livre “Besançon côté parcs et jardins” (éditions Sékoya), Lionel Estavoyer se rend compte que des jardins photographiés en 2000 ont aujourd’hui disparu. C’est le cas du côté de Saint-Claude où une parcelle d’un demi-hectare n’existe plus. “Le demi-siècle qui

s’achève a tout bouleversé, décla- re Lionel Estavoyer. Trop de changements, trop vite.” Heureusement, il reste des pas- sionnés et des endroits magni- fiques à l’instar de l’hôtel de Crécy rue de laVieilleMonnaie, d’une superbe façade du XVIII è- me aperçue rue Renan, l’ancien palais des archevêques rue de la Convention, l’hôtel de Laver- nette rue du Lycée ou ce jardin au cœur de la bibliothèque et encore l’hötel d’Orival square Castan. La liste est longue mais s’effiloche d’années en années. Lire : “Besançon côté cours” Éditions Sékoya Textes Lionel Estavoyer Photographies Stéphane Dondicol

Besançon Nord : 600 000 euros Secteur Moncey. Demeure de charme nichée dans un cadre privilégié, 300 m 2 dʼhabitation principale, 300 m 2 de dépen- dances. Terrain paysager. Réf 3 424 - 600 000 euros Renseignement : Agence Guy Hocquet à Besançon. Tél. : 03 81 48 40 07. besancon@guyhoquet.com

440 000 euros proche Fontain À 10 km du centre-ville de Besançon, splendide maison dʼarchitecte de 250 m 2 sur 25 ares de terrain, panorama à cou- per le souffle. Prix : 444 000 euros – Réf. 7 650 Renseignement : Cabinet Benoît - Tél. 03 81 82 64 00

Château à La Chevillotte 20 minutes de Besançon, proche Golf Chevillotte et route de la Suisse. Belle demeure de charme 450 m 2 + 130 aména- geables. spacieuses réceptions boiseries, cheminées, pla- fonds voûtés dans cuisine et petit salon, magnifique escalier central. Parc clos et arboré de 4 150 m 2 . Toiture et huisseries récentes. Prix sur demande. Renseignement : Cabinet Deloche immobilier : www.delocheimmobilier.com ou 03 81 83 14 09

550 000 euros au centre-ville Appartement T5/T6 six pièces de 218 m 2 habitables. Au pre- mier étage dʼun immeuble de 1900. Grande chambre avec cheminée donnant sur petite cour intérieure. Deux grands gre- niers et parking extérieur. Renseignement : Notimo via l’étude Racle et Colin (03 81 47 86 87).

650 000 euros à Velotte Velotte, exceptionnel, maison bourgeoise de 200 m 2 environ sur sous-sol, 6 chambres, édifiée sur un terrain de 3 000 m 2

environ clos et arboré. Rare à la vente. Renseignement : Lavalliere Immobilier.

50, rue de Belfort à Besançon.Tél. : 03 81 47 81 00

INSOLITE

Avantages et inconvénients des lieux cossus Avec la pierre, tout n’est pas rose Habiter dans un appartement de caractère en centre-ville a un prix. Les personnes âgées en semblent par exemple exclues. Beaucoup de ces lieux sont en location.

Comment ont-ils préservé leur patrimoine ? Ils se sont assis sur desmillions d’euros Propriétaires de la Grange

Huguenet avenue de Montrapon, Robert et Pierre-Henry Guillaume n’ont jamais cédé aux offres alléchantes des promoteurs

Située dans le quartier de Montrapon, la Grange Huguenet est un site classé que l’on peut visiter.

immobiliers. L’argent n’achète pas tout… Pas le patrimoine familial en tout cas.

G rande rue à Besançon. Après avoir poussé une lourde porte en bois, un long couloir en pierre blanche vous conduit jusqu’à un jardin baigné par la lumière du jour. Sur la gauche, deux escaliers boisés du XVII ème siècle servent de relais aux premiers appar- tements. Sur la droite, une fon- taine taillée dans un mur en roche avec une vigne vierge apportant cette touche colorée verte. Nous ne sommes pas très loin du vieux Besançon, pas très loin non plus de la Porte Noi- re, cachés des regards et du bruit du trafic routier. Nous n’indiquerons pas le numéro afin de préserver le lieu et la tranquillité de ses habitants. Bizarrement, aucun digicode mais seulement un bouton sur lequel appuyer et vous voilà plongé dans ce carré magique où un de ses habitants a bien voulu nous expliquer la raison qui le motive à habiter ici avec ses avantages, ses inconvé-

nients : “La proximité du centre- ville est un atout bien sûr. Voilà vingt ans que j’habite ici, for- cément, je suis attaché au lieu” dit-il. Alors que beaucoup d’entrées d’appartements bisontines sont victimes d’actes de vandalisme, ce lieu semble préservé, bien qu’ouvert sur l’extérieur.Demeu- rer dans un lieu rempli d’histoire a néanmoins ses inconvénients : “L’accès aux appartements n’est pas simple et les travaux de réfection non plus.” La raison : l’étroitesse des lieux. Bref, c’est peut-être l’explication qui fait que beaucoup de ces apparte- ments sont loués à des étudiants. Les personnes âgées qui ont des difficultés de mobilité sont en effet exclues. Quant aux tra- vaux engagés (façade, fenêtres, toitures), ils sont souvent longs et coûteux et les places de sta- tionnement quasi inexistantes. Habiter dans un endroit chic ne rend pas la vie forcément plus rose.

R obert Guillaume et son frère Pier- re-Henry ont de qui tenir ! Comme leurs ancêtres, ils n’ont jamais répondu à l’appel des sirènes : celui de vendre la grange Huguenet à prix d’or. Valeur estimée de cet espace de 4,5 hec- tares situé 32 avenue de Montrapon à Besançon : “quelques millions d’euros…” calcule le propriétaire sans en dire plus. “Lorsque des promoteurs immobiliers son- naient à la porte de lamaison,ma grand- mère les recevait avec le fusil” dit Robert Guillaume en souriant. S’il force le trait, l’héritier de ce lieu his- torique et unique (lire par ailleurs) tient coûte que coûte à préserver ce bien entré en 1790 dans le patrimoine familial. Et peu importe si l’héritage est lourd à por- ter…car en plus de trouver l’argent néces- saire pour éviter le délabrement, il a fal- lu convaincre une partie de la famille

faire face à des actes de vandalisme (fenêtres cassées, pierres volées…) il y a quelques années. L’ouverture au public et lamise en place d’un système d’alarme a permis de réduire ces actes. Père de cinq enfants, Robert Guillaume va tenter de transmettre à ses ouailles sa passion. À eux désormais de résister à l’appât du gain ? Il l’espère…sans cacher toutefois que cet héritage “est lourd à porter.” Aujourd’hui, les bâtiments sont hors d’eaumais le parc a toujours besoin d’être surveillé histoire que les arbres ne viennent pasmenacer les habitations des voisins. Plus que l’appât du gain, les Guillaume ont préféré le poids de l’histoire. Joli coup. E.Ch. Visite guidée de la Grange le 21 avril L a Grange Huguenet, cʼest 4,5 hec- tares de verdure avenue de Mon- trapon à Besançon et un lieu dʼhistoire qui a accueilli Louis XIV lors du siè- ge de 1674. Les propriétaires offrent la possibilité aux écoliers de découvrir la faune et la flore du parc en lʼouvrant (sur deman- de). Les dates dʼouverture sont les sui- vantes (14 h 30 à 17 heures en fonc- tion de la météo) : mercredi 21 avril, mercredi 12 mai, mercredi 9 juin, mer- credi 7 juillet. Journées du patrimoine les 18 et 19 septembre, mercredi 13 octobre.

pour éviter la vente. Quitte parfois à se mettre certains cousins ou cousines à dos.La ville de Besançon avait même fait le forcing pour acheter l’espace à l’époque où Robert Schwint était maire. Les Guillaume n’ont pas cédé. Pourquoi ? “Car nous voulons rester dans la conti- nuité de nos ancêtres. Nous aimons ce lieu. En 1937, Robert Demangel l’avait classé comme “site des espaces verts”. a protégeait le parc des promoteurs” note celui qui a demandé et obtenu en 2000 l’inscription de la bâtisse auxmonuments de France. Cette classification est un point crucial : “En clair, même un très riche industriel ou un émir ne pourra raser le site pour reconstruire autre chose” explique le pro- priétaire qui s’est assis sur des milliers d’euros assurés. Jamais Robert Guillau- me ne regrettera ce choix même s’il a dû

Le propriétaire Robert Guillaume (ici lors d’une visite) : “On a voulu l’inscription aux monuments pour protéger encore plus le lieu des riches industriels.”

Beaucoup d’appartements du centre-ville bisontin possèdent encore des escaliers en bois. Les ascenseurs n’ont pu les remplacer. Bien ou mal ?

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