La Presse Bisontine 100 - Juin 2009

BESANÇON

La Presse Bisontine n° 100 - Juin 2009

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EN BREF

L’amphithéâtre Donzelot à la faculté de lettres n’a pas désempli lors des différentes assemblées générales. Aujourd’hui, les étudiants rentrent dans l’enceinte non plus pour y débattre mais pour y passer les partiels.

ÉDUCATION Pourquoi l’Université a failli imploser La faculté n’en sortira pas grandie

Chorale La Chorale “Jubilate” de Montrond-le- Château a le plaisir de vous annoncer qu’elle donnera plusieurs concerts, le samedi 6 juin à 20 h 30, en l’église de Toulouse-le-Château (Jura), le samedi 13 juin à 20 h 30 en l’église de Mouthier- Hautepierre, le dimanche 14 juin à 14 h 30 en l’église de Montrond-le-Château, le samedi 20 juin à 20 h 30, en l’église d’Avoudrey. Au programme : “Chansons d’ici et d’ailleurs”. Entrée Libre. Compostage Le compost dans son jardin, c’est facile. Pour tout comprendre sur l’intérêt de la formule, le Sybert du Grand Besançon organise des réunions publiques d’information. Prochaines dates : le 2 juin à la mairie de Montferrand-le- Château (18 h 30), le 8 juin à la salle des fêtes de Devecey (18 h 30), le 15 juin à la salle Jouffroy- d’Abbans de Roche- lez-Beaupré (18 h 30), le 17 juin à la salle de la Sorbonne d’Épeugney (18 h 30) et le 18 juin au complexe sportif de Saint-Vit (18 h 30).

Trois mois de blocage et des conséquences. Dissensions du corps enseignant, matériel saboté, bagarres et radicalisation des étudiants ont fait craindre le pire à la faculté de Besançon où les examens ont lieu. L’ordre est rétabli, pas la grogne.

D’ un côté des étudiants “bloqueurs”. De l’autre des élèves qui ne sou- haitent qu’une chose : passer leurs examens. À la faculté de Besançon,le divorce s’est consom- mé du 2 février au 11 mai. Le vote du 11 mai à la faculté de lettres a rabiboché deux camps farouchement opposés. Les étu- diants ont voté à 60,5 % la repri- se. Conséquence : les partiels se dérouleront bien. Et ce jusqu’à la fin du mois, permettant ainsi à l’année scolaire 2009-2010 d’être sanctionnée par des examens.

trois mois “de lutte” , les positions de chacun n’ont pas tardé à s’affirmer.Un groupe “actif” d’une quinzaine d’individus a en effet réussi courant mai à bloquer l’ensemble des partiels, que ce soit en histoire, géographie ou en langues étrangères appliquées (L.E.A.). En droit et sciences, les étudiants avaient voté la repri- se une semaine avant. Il est dif- ficile de désigner les bloqueurs. Ils veulent bien parler,mais sous couvert de l’anonymat. Pour l’anecdote, ils votent “non” à l’accès de la presse lors des assem- blées générales. Ils sont “non- syndiqués” , des “marxistes-léni- nistes” , ou des encartés du Parti communiste ou des étudiants avec une étiquette “Rêve géné- rale” collée dans le dos. Comment ont-ils paralysé les examens ? Les bloqueurs ont fonctionné comme un gang. Dès lors qu’une information filtrait quant à la tenue d’un partiel, ils se précipitaient dans la salle, obligeant le professeur (non gré- viste) à tout annuler. Des étu-

Les bloqueurs, des boucs émissaires ? Une partie des bâtiments de la faculté de droit a été vandalisée. Après enquê- te, ce ne sont pas des bloqueurs mais des étudiants excédés de la grève qui auraient vandalisé dumatériel histoire de faire por- ter le chapeau auxmanifestants. Enseignement. Un : les étu- diants n’étaient pas prêts à sacri- fier une année. Deux : ils demeu- rent hostiles aux réformes en cours puisque 92,6%des votants se déclarent contre les réformes du gouvernement, dont la L.R.U., loi d’autonomie des universités. La lutte pourrait reprendre en septembre. E.Ch.

diants en sont venus aux mains. L’argument des bloqueurs était la légitimité des urnes. Comment ont-ils paralysé le campus ? Tracts et banderoles se sont multipliés. Le point fort de la lutte s’est symbolisée par la tenue d’un camping à la facul- té de droit. Des tentes avaient été plantées. Elles ont été enle- vées après avoir été éventrées… Pourquoi le président n’est- il pas intervenu ? “Je ne pou- vais pas demander à un car de C.R.S. d’entrer dans la faculté” , répond Claude Condé, le prési- dent de l’Université de Franche- Comté. En lien avec les syndi- cats étudiants (U.N.E.F. notamment), la direction a ten- té le dialogue. Elle a surtout pris ses responsabilités et organisé ce vote à bulletins secrets du 11mai.Avec deux questions.Pour ou contre la levée du blocage. Et pour ou contre les modalités pré- vues le 26 mars dernier par le conseil de gestion. À savoir, des

partiels portant sur les cours dis- pensés depuis janvier et sur les documents à contenu discipli- naire, envoyés par mail aux étu- diants par les professeurs. Dissension chez les profes- seurs. Une minorité de profes- seurs était pour la poursuite du blocage. Leur pouvoir : la réten- tion des notes. Mais aucun n’a utilisé cette “bombe.” En raison sans doute des pressions exer- cées. Les profs avaient nette- ment rejeté par vote le souhait d’un rattrapage des cours durant 4 semaines (18 mai au 12 juin) et réitéré massivement de voir appliquer les dispositions adop- tées par le conseil de gestion du 26 mars.

“C’était sûr que l’on allait avoir des exa- mens… Il ne fallait pas lâcher la pression. Il fallait continuer la lutte” concède Nico- las, étudiant en deuxième année. Qui sont les blo- queurs ? “Des gau- chos qui veulent la révolution” répond Léa, 20 ans, excédée par le blocage.Après

“Des cours par

mail.”

TRAFIC DES DIPLÔMES Le diplôme “histoire de l’art” délivré à Besançon vendu en Chine S elon le quotidien La Croix du 1 er mai dernier, l’Université de Franche-Comté fait partie de celles touchées par un trafic de faux diplômes vendus 122 euros pièces par un site Internet chinois. L’incertitude de la tenue des examens aurait-elle donné des idées aux escrocs ? Claude Condé, le président de l’U.F.C., confirme “que nous avons pu voir un faux diplôme de notre Université mais ce site n’est plus accessible.” Il s’agissait d’une licence d’histoire de l’art. “Je ne sais pas si le site en proposait d’autres.” Selon le président, “il s’agissait d’une imitation, plutôt mauvaise d’ailleurs, déjà dans l’intitulé où il était indiqué “licence de l’histoire de l’art”, alors que l’appellation exacte est “licence d’histoire de l’art.” L’U.F.C. va porter plainte avec d’autres uni- versités touchées. Le président se console en maniant l’humour : “Les diplômes, c’est un peu comme les contre- façons de bijoux. On copie ce qui a de la valeur.” En Chi- ne, comme en Égypte d’ailleurs, le marché de l’art prend une nouvelle dimension. Valeur refuge, l’art suscite des convoitises et des vocations.

ENTRETIEN

Un Anglais juge le système “Des malversations grandissantes” Professeur d’anglais à la faculté, le Britannique Mathew Pires craint que le modèle universitaire français ne se calque à celui de son pays. De l’autre côté de la Manche, les étudiants sont “endettés” et les facultés “corrompues” dit-il.

D ans l’amphithéâtre Donzelot, Mathew Pires occupe le deuxième rang. Petit pull, cartable rangé à ses pieds, l’homme a tout d’un parfait étudiant concer- né par la réforme de l’université. Il n’en est rien. Mathew est un jeune professeur d’anglais qui dispense des cours à la facul- té de Besançon. Arrivé en France en 1995, il a découvert Besançon en 2004 et connaît parfaitement notre système éducatif. S’il se mobilise aujourd’hui à côté de ses élèves, c’est jus- tement pour que l’université française ne ressemble pas à l’université anglaise. “En ce moment, on assiste à une série de faillites de facultés comme à Londres ou à Man- chester” note le professeur. Rappelons que le système universitaire anglais est large- ment autonome depuis dix ans, formé d’un certain nombre de collèges et de fondations privées comme c’est le cas dans la presti- gieuse école de Cambridge. Après 18 ans, les étudiants peuvent aller à l’université moyennant des frais de scolarité estimés à 3 145 livres (environ 3 498 euros). Actuellement, une série de faillites mine des établissements à la fois en Grande-Bre- tagne et aux États-Unis. La raison ? “Des universités ont investi sur des marchés finan- ciers et ont beaucoup perdu comme à New- York. Ces affaires précarisent le corps étu- diant et enseignant” , dit Mathew. Bref, l’autonomie réclamée par le gouvernement ne serait pas la bonne solution selon lui.

Mathew Pires est

Anglais et professeur à la faculté

de Besançon. Il est contre la réforme L.R.U.

ne cache pas son désaccord vis-à-vis de la réforme du C.A.P.E.S. : “On demande une année de plus pour accéder au concours mais on ne propose pas de contenu disciplinaire. Une année de plus pour les étudiants les plus modestes, ce n’est pas rien…” Si le sys- tème anglais met sur la touche de nombreux jeunes, il forme également les meilleurs chercheurs. L’université ne doit pas être à deux vitesses. Encore faut-il trouver la bon- ne carburation entre autonomie et compé- titivité. E.Ch.

“EnAngleterre, il y a de plus en plus de mal- versations comme ce fut le cas à l’université de Liverpool, sans compter que les étudiants doivent aujourd’hui s’endetter pour étudier. J’ai eu de la chance, car j’ai fini mes études alors que la réforme n’était pas passée.” Si l’État anglais a multiplié les “prêts étu- diants” afin de permettre à ces derniers de payer leur année scolaire, ils seraient de plus en plus nombreux à ne pouvoir rem- bourser les échéances. “En France, vous avez un service public…” lâche ce dernier. Mes- sage subliminal : gardez-le. Mathew Pires

Claude Condé, président de la faculté : “On copie les objets de valeur.”

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