Journal C'est à dire 297 - Septembre 2023

POL I T I QUE

Association

“J’ai le droit d’être maman, femme et élue !”

C’ est à dire : Pourquoi avoir souhaité lan cer cette association des femmes élues du Doubs? Géraldine Tissot-Trullard : Entant que femme élue, j’ai été interpellée par plusieurs élues qui ont été confrontées à des problématiques de harcèlement dans le cadre de leur fonction. Ces échanges ne m’ont pas laissée indiffé rente et j’ai donc contacté le réseau national des “ambassadrices élues locales” que j’avais eu l’occasion de découvrir lors d’un Congrès des maires de France à Paris. Ce réseau national réunit déjà 10 000 femmes élues à l’échelle nationale. J’ai donc pris l’ini tiative de créer une antenne départe mentale de ce réseau qui a été officiel lement lancé le 21 septembre à l’Hôtel du Département à Besançon en pré sence de Christine Bouquin la prési dente du Département. Càd : Quel est l’objectif de ce réseau? G.T.-T. : C’est d’intéresser le plus de femmes possible à la politique et de les aider à lever les obstacles à leur enga gement. Les postes à haute responsa bilité sont toujours occupés par une majorité écrasante d’hommes, et les femmes maires ne représentent que 20 % du total des maires en France. On s’aperçoit aussi qu’en politique, il n’y a pas les mêmes codes, les mêmes émotions pour un homme que pour une femme. Lorsqu’elles prennent la parole en public, les femmes politiques sont 7 fois plus interrompues que les hommes. Et sont régulièrement l’objet d’attaques sexistes que l’on n’imagi nerait pas adresser à un homme. L’ob jectif de ce réseau est donc de faire prendre conscience de toutes ces iné Avec d’autres élues du Doubs, la conseillère départementale Géraldine Tissot-Trullard vient de lancer l’association Élues locales dont elle sera présidente. Une instance qui défendra le statut des femmes élues.

Géraldine Tissot Trullard est conseillère départementale du canton de Frasne. Elle est photographiée ici à l’Étang duMoulin à Bonnétage.

officiel de cette association Élues locales du Doubs ? G.G.-T. : Le lancement officiel a eu lieu le 21 septembre à l’Hôtel du Départe ment à Besançon. Nous avons déjà 80 adhérentes au sein de l’association dont la marraine est Christine Bouquin, qui représente si bien cette thématique. J’ai présenté à l’occasion de cette soirée de lancement ce que fait le réseau Élues locales et nous avons eu des témoi gnages de femmes élues. Je créerai une chaîne Youtube où seront interviewées régulièrement des femmes élues. L’adhé sion à l’association départementale est gratuite, elle regroupe déjà aussi bien des élues de grandes agglomérations que d’autres élues dans des petites groupe de travail de quatre personnes pour organiser tout ceci, avec à mes côtés Marine Punkow (maire de Che vigney-les-Vercel), Nadine Dussaucy (maire de Rancenay) et Françoise Bar thoulot (maire des Terres-de-Chaux). Càd : Et ensuite ? G.G.-T. : Cette association vivra à tra vers les animations qu’elle mettra en place comme des cafés-discussions sur des thématiques variées. Cette asso ciation servira à échanger nos bonnes pratiques d’élues concernant la gestion d’un budget par exemple, ou tout autre dossier sur lesquels il y a des choses à communes. Cette association est aussi ouverte aux hommes. On y accepte en effet les hommes qui ont envie d’aider les femmes ! Je précise que je ne suis pas seule à la manœu vre pour le lancement de cette association. On a formé un

apprendre et à échanger, et on organi sera aussi des sessions de formation. Deux journées des femmes élues auront par ailleurs lieu à Paris les 24 et 25 novembre à l’occasion du Congrès des maires de France. Càd : Que pensez-vous des quotas hommes-femmes ? G.G.-T. : Plutôt que des quotas imposés pour atteindre la parité, on aurait pré féré un système à l’échelle nationale qui permette d’accompagner les femmes qui veulent faire de la politique, par du coaching, par des solutions de garde d’enfants, etc. Car oui, j’ai le droit d’être maman, femme et élue ! Tout cela ne doit pas être incompatible. Il faut juste Càd : Cette nouvelle asso ciation se revendique féministe et militante ? G.G.-T. : Nous ne sommes pas là pour faire du féminisme à outrance, mais juste pour défendre nos droits. Il y a de la place pour tout le monde, y compris en politique. Il faut juste ne pas nous mettre des barrières. Un cerveau de femme ou d’homme sur une table, on ne voit pas la différence ! (rires). Nous sommes une association apolitique, transpartisane, et militante dans le sens où on fera en sorte qu’au final, plus de femmes puissent s’engager en politique. n Propos recueillis par J.-F.H. nous donner les moyens de le faire. Cela reste peut-être un cliché mais quand un enfant est malade, qui court le plus souvent pour l’emmener chez le médecin ?

galités et d’agir pour les réduire.

se rejoindre.

Càd : Pourquoi cet écart persiste t-il selon vous ? G.T.-T. : On évoque pour parler de cette question de “syndrome de l’imposteur”, c’est-à-dire que les femmes limitent d’elles-mêmes leurs ambitions en poli tique du fait de ce syndrome encore

Càd : Personnellement depuis que vous êtes élue, avez-vous déjà res senti cette espèce de différence de traitement entre les hommes et les femmes en politique ? G.G.-T. : Je l’ai ressentie en effet. Quand vous prenez la parole sur certains sujets,

trop présent pour la plupart d’entre elles. Et pour contrer ce sentiment d’illégitimité, les femmes auront tendance à tra vailler deux fois plus pour faire leurs preuves. Et ce qui manque aussi aux femmes en politique, c’est le réseau. Parce

on ne va pas forcément tou jours vous prendre au sérieux. Dans les exécutifs, on cantonne souvent les femmes élues à des questions comme les écoles ou le C.C.A.S. Alors qu’on pour rait tout aussi bien empoigner des dossiers comme les travaux

“Il y a encore beaucoup de travail avant d’atteindre une parité.”

qu’aussi les hommes se cooptent et se recommandent entre eux. Les femmes au contraire n’ont pas cette culture du réseau et si elles réclament, cela passe pour un signe de faiblesse. Càd : Comment vous êtes-vous inté ressée à ces questions ? G.G.-T. : Je suis première adjointe à Jougne depuis 2020 mais avant cela, je suis coach et je me suis orientée sur du coaching de dirigeants. Comme eux, les grands politiciens ont des coaches alors, je me suis dit : pourquoi ne pas proposer du coaching pour les élus sur les territoires ? Avec l’association des maires du Doubs, j’ai donc eu l’occasion de coacher des élus locaux. Côté politique, je suis élue au Conseil départemental en binôme avec Philippe Alpy sur le canton de Frasne. Je me suis prise au jeu de la politique car j’aime faire avancer les dossiers et en tant que coach, ces deux aspects de management et de politique peuvent

par exemple.

Les femmes en politique

Càd : Si on revient à la question des binômes du Conseil départe mental, vous pensez être moins visi ble que votre homologue mascu lin? G.G.-T. : Naturellement, et c’est aussi parce qu’il a une plus longue expérience politique, les gens de notre canton vont plus solliciter Philippe Alpy que moi, bien sûr. C’est un peu plus compliqué pour moi de me faire accepter comme conseillère départementale mais une fois que c’est acté par un interlocuteur, il n’hésite plus à me solliciter à nouveau. C’est plus dur d’acquérir une légitimité, il faut faire ses preuves. Il m’est déjà arrivé dans un tour de table à l’assem blée d’un syndicat de préciser, sur le ton de l’humour bien sûr, que je n’étais ni la secrétaire, ni la suppléante de Philippe Alpy ! (rires).

“On accepte leshommes qui ont envie d’aider les femmes !”

Les lois sur la parité ont accéléré l’ar rivée des femmes en politique, mais on observe toujours que les postes à responsabilité restent majoritairement aux mains des hommes. Les femmes sont : l 20 % des maires en France. l 38 % des députés. l 20 % des présidents de Région.

l 12 % des présidents d’intercommunalités. l 32 % des sénateurs. l 14 % des présidents de Département.

Càd : Comment se fera le lancement

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