Journal C'est à dire 293 - Avril 2023
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Syndicat intercommunal des eaux de la Haute-Loue
“Ce n’est pas possible d’accueillir une commune qui n’a pas fait d’investissement”
Zoom Grand Besançon Métropole et le S.I.E.H.L., une solidarité qui n’est plus E n 2018, Grand Besançon Métropole prend la com pétence eau au niveau de son intercommunalité. En 2019, elle décide de quitter le syndicat des eaux de la Haute-Loue et d’assurer directement la produc tion et la distribution de l’eau potable. 16 communes quittent alors le S.I.E.H.L. Si ce dernier continue d’alimenter ces com munes à hauteur de 1,4 million de m 3 par an, pour Philippe Bou quet, une question de fond se pose : “On revient à un périmètre beaucoup plus rural, et les coûts ne sont plus les mêmes. En 2027, se posera la question de la renégociation du contrat de la délégation de service public (D.S.P.). Deux communes sur 16 avaient souhaité rester au S.I.E.H.L. mais G.B.M. a fixé un prix de l’eau beaucoup plus bas. La solidarité urbain-rural a pris un coup, la solidarité n’existe pas” , regrette le président du S.I.E.H.L. Pour 2027, le syndicat étudie plusieurs options : soit la D.S.P. comme actuellement, soit une régie, soit encore une S.E.M.O.P., une société d’économie mixte d’opérations ponctuelles. En attendant, il réunit en juin les E.P.C.I. tels que les communau tés de communes en vue de 2026 et la prise de la compétence en eau de ces intercommunalités au détriment des communes, ainsi que le prévoit la loi N.O.T.R.E. Au niveau du S.I.E.H.L., ce seront donc les communautés de communes qui deviendront les abonnés. n
Face aux problèmes de la ressource en eau sur le Val de Morteau, les communes de Fournets-Luisans, Fuans et Les Combes ont demandé leur adhésion en 2025 au syndicat intercommunal des eaux de la Haute-Loue. Philippe Bouquet, président du syndicat, Marie-Christine Robert, vice-présidente et Matthieu Caprani, technicien éclairent les méandres - politiques, administratifs et tech niques - de la production et de la distribution d’eau.
Philippe Bouquet, président du syndicat, Matthieu Caprani, technicien, et Marie Christine Robert, vice présidente.
C’ est à dire : En jan vier, Ouvans et Landresse sont devenues adhé rentes au S.I.E.H.L. qui compte désormais 74 com munes. Et Fournets-Luisans, Fuans et Les Combes ont demandé à leur tour d’entrer au S.I.E.H.L. en 2025. Arc sous-Cicon a entamé les démarches d’adhésion. Quel est l'impact de ces nouveaux arrivants sur la ressource en eau? Philippe Bouquet: Depuis 2017-2018, les élus du plateau des Combes s’interrogent sur les difficultés de la ressource en eau. Pour alimenter leurs réser voirs, il faut parfois des camions citernes notamment en période de sécheresse. Donc ils trouvent un intérêt à s’interconnecter à notre réseau. Nous avons voca
tion à être solidaires mais nous déterminons les conditions pour que les communes puissent adhérer. Aujourd’hui, ce n’est pas possible d’accueillir une com mune qui n’a pas fait d’inves tissement. Chacune doit prendre sa part dans le fonctionnement. Le prix du m 3 sur le plateau des Combes est à 3,66 euros, soit 1 euro de plus qu’au S.I.E.H.L. Ainsi, le plateau des Combes peut financer l’interconnexion sur ses réserves financières et un emprunt. Ce dernier sera transféré au S.I.E.H.L. mais assuré grâce aux abonnés et à la vente d’eau. L’objectif n’est pas de faire des dividendes mais d’être autonomes en matière d’eau. Néanmoins, il faut savoir que remonter l’eau depuis la source vers Les Combes va nécessiter beaucoup d’énergie. Càd : Justement, l’inflation du coût énergétique va-t-elle se répercuter sur le prix de l’eau? P.B. : Pour faire remonter l’eau de 300 à 800 mètres d’altitude, cela coûte 700 000 euros par an d’énergie, principalement de l’électricité. Au 1 er octobre 2022, la part du délégataire (Gaz et eaux, qui a obtenu la Délégation de service public jusqu’en 2027, N.D.L.R.) a augmenté de 8 %. Il faut savoir que les investis sements sont liés au prix de l’eau, à savoir 2,76 euros le m 3 (pour une consommation annuelle de 120 m 3 ). Le schéma directeur a estimé à 60 millions d’euros sur 15 ans les investis
budgétés. Sur quoi portent ces investissements? Matthieu Caprani: Notre réseau compte 920 km de cana lisations, la moitié pour les réseaux de distribution, l’autre pour les réseaux d’adduction, et 88 réservoirs. On renouvelle 1 % de notre réseau par an, soit 10 km. En 2021, le réseau avait un rendement de 75 %, ce qui n’est pas si mal car c’est un réseau plutôt rural. On travaille aussi sur les fuites et le rende ment, la connaissance du patri moine, le renforcement des pom pages, et sur de nouveaux ouvrages. On conforte les cap tages actuels et on essaie de trouver de nouvelles ressources avec des forages dans le karst profond. P.B. : Il y a la recherche de res sources nouvelles mais il faut économiser. Nous pompons envi ron 15000 m 3 d’eau par jour. L’été 2022, pour la première fois, on est monté jusqu'à 23 000 m 3 par jour pour répondre aux besoins. C’est exceptionnel mais si cela devait se répéter et deve nir récurrent, voire la norme, il faudrait changer les équipe ments, les réservoirs, les pompes, etc., et impacterait donc le prix de l’eau. Marie-Christine Robert: Nous
sements pour répondre aux besoins indispensables. Il faut pouvoir assumer ces 60 millions. Un débat est en cours entre les élus du S.I.E.H.L. pour déter miner jusqu’où aller pour un prix acceptable. Càd: Dans son Plan eau, Emmanuel Macron a insisté sur une tarification progres sive de l’eau. Quel est votre avis? P. B. : A ce stade, nous sommes un peu réservés sur ce sujet. Les tarifs de Gaz et Eaux pour les abonnés du S.I.E.H.L. se décou pent en trois tranches, les tarifs devenant plus intéressants pour les gros consommateurs. Depuis trois ou quatre ans, nous sommes engagés pour qu’il ne reste plus qu’une tranche en 2025. Il faut rester attentifs à la façon de ren dre disponible la ressource pour les gros consommateurs. On peut imaginer des périodes où on pour rait être incitatif, un tarif qui augmente en période de grosses consommations, à l’image des heures creuses ou pleines pour l’électricité. Mais cela nécessi terait des compteurs télérele vés. Càd : En 2023, 4 millions d’eu ros en investissement sont
avons d’ailleurs un projet pour responsabiliser les gens sur l’eau et notamment via les écoles. Càd: Aujourd'hui, quel est l’état des ressources en eau du S.I.E.H.L., en qualité et en quantité? M.C. : Nous avons six ressources propres en eau dont une source karstique à la production très aléatoire, ça peut aller de 10000m 3 par jour au printemps à 400 m 3 en été. Nous avons éga lement deux puits à Lods et un champ captant à Montgesoye. Aujourd’hui, nous pompons en moyenne 15 000 m 3 par jour. Les nappes phréatiques sont dans des moyennes plutôt basses par rapport aux années précédentes. Mais les épisodes pluvieux de mars et avril ont permis de remonter le niveau. Nous allons modifier aussi le traitement de l’eau potable et utiliser le chlore gazeux au lieu du dioxyde de chlore. Ce dernier générait des résidus de traitement. P.B. : C’est un traitement pour le transport et la circulation dans les tuyaux, en prévention, car elle est stockée dedans une journée. Mais les ressources que nous captons sont naturellement très bonnes. n Propos recueillis par L.P.
L’interconnexion de Landresse au S.I.E.H.L. sera inaugurée le 25 mai.
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