Journal C'est à dire 287 - Octobre 2022

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Le nombre de suicides assistés est en augmentation constante À l’échelle de la Suisse romande, l’association Exit Romandie présidée par le Chaux-de-Fonnier Jean-Jacques Bise a accompagné l’an dernier 421 personnes dans une procédure de suicide assisté. Suisse voisine

P entobarbital de sodium. Ce nom barbare, c’est le produit que les can didats suisses au sui cide assisté ingèrent pour en finir avec la vie, accompagnés dans ce geste ultime par un proche, et suivis au préalable par une des associations habi litées à la faire. Exit-Romandie est l’une de celles-là. L’association

personne qui fait appel à nom dans des délais plus urgents, et qui donc n’a pas encore cotisé, paie un forfait de 350 francs” note Jean-Jacques Bise. Les étrangers qui souhaitent recourir au suicide assisté ne peuvent pas faire appel à Exit et n’ont d’autre choix que de se tourner vers d’autres associations type Dignitas (basée à Zurich), Life

Jean-Jacques Bise, installé à La Chaux-de Fonds, préside l’association Exit-Romandie depuis 2018.

Circle (à Bâle) ou Ex International (Berne), moyennant un coût compris entre 9 000 et 10 000 euros. Exit reçoit pourtant à son secrétariat de Genève,

présidée par Jean Jacques Bise, un habitant de La Chaux-de-Fonds, compte 33 000 mem bres qui paient une cotisation de

On devrait dépasser en 2022

le cap des 500 accompagne ments.

die devrait dépasser en 2022 le cap des 500 accompagnements. Les bénévoles de l’association Exit s’attendent à être entendus dans le cadre de la convention citoyenne que la France s’ap prête à ouvrir sur le sujet du suicide assisté. “Nous avons déjà reçu récemment des parlemen taires français. Je pense que chez vous en France, la législation pourrait évoluer” suppose, et espère Jean-Jacques Bise. n J.-F.H.

donc une large place à cette pos sibilité. Comme la loi sur le sui cide assisté n’existe pas en tant que telle, ce sont les associations qui se sont emparées du sujet. Et chaque association encadre la pratique selon ses propres règles : le discernement, la fin de vie inéluctable et des souf frances extrêmes, l’accompagne ment obligatoire, le jugement de médecins-conseils… La tendance est toujours à la hausse cette année. Exit-Roman

semaines. Il y a quelques cas extrêmes comme ceux-là” constate M. Bise. 95 % des accompagnements effectués par Exit se passent au domicile du patient. La possibilité de recourir au sui cide assisté en Suisse découle d’une interprétation souple de l’article 115 duCode pénal suisse qui pénalise le recours à l’assis tance au suicidemais demanière assez floue (s’il est demandé pour un motif égoïste), laissant

et qu’elle sait que son dossier est accepté, il y a une forme de sou lagement car elle sait qu’elle peut demander, ou pas, notre aide” note le président. Le suicide assisté représentait en Suisse romande 1,8 % des décès en 2021. Et les demandes urgentes, émanant de personnes non-membres de l’association, sont également en hausse : elles représentaient un tiers des dos siers l’an dernier. “Le délai le plus court qu’on ait eu, c’est trois

“tous les jours des appels venant de France. Absolument tous les jours…” constate Jean-Jacques Bise qui préside (en tant que bénévole) Exit-Romandie depuis 2018. Globalement, les demandes sont en constante hausse. En 2021, Exit-Romandie a accepté 641 dossiers qui ont donné lieu à 421 accompagnements. “Ce qui signi fie qu’un tiers des dossiers accep tés n’ont pas été menés au bout. Quand une personne va très mal

40 francs suisses par an. C’est cette association qui a notam ment accompagné vers la mort le réalisateur franco-suisse Jean Luc Godard récemment. Son homologue dans la partie alé manique, Exit Deutsche Schweiz compte, elle, 140 000 membres. Condition sine qua non pour faire appel aux services de l’as sociation Exit : être résident en Suisse…L’avantage : la gratuité du service (hormis la cotisation annuelle). Une nuance : “Une

L’archevêque de Besançon hostile à l’évolution de la loi Monseigneur Jean-Luc Bouilleret ne se dit pas favorable à l’autorisation du suicide assisté qu’il met au même rang que l’euthanasie. Il explique sa position. Religion

assisté. Monseigneur Bouilleret estime qu’avant de faire évoluer la loi “pour quelques cas particuliers” , il serait d’abord néces saire de généraliser l’existence d’unités de soins palliatifs sur tout le territoire. “26 départements en sont encore dépour vus. Qui dit que ces soins palliatifs se développeraient une fois le suicide assisté autorisé ?” , estimant que dans la société actuelle, “le juridique prend le pas sur l’éthique. On s’est battu pendant deux ans pour les gens atteints du Covid n’en meurent pas et là on va ouvrir cette

songe. Ouvrir la porte au faire mourir serait selonmoi une rupture fondamen tale dans le contrat social” estime l’ar chevêque. L’homme d’Église avance des arguments d’ordre philosophique en se demandant si “la société est là pour protéger la vie dans sa plus grande fragilité ou pour amener la décision de faire mourir ?” , mêlant dans le même rejet le suicide assisté et l’euthanasie. Pour étayer sa position, Jean-Luc Bouil leret en appelle également à l’éthique médicale. “Le médecin est-il là pour

C omme dans tout débat de société, l’Église catholique par ticipera sans doute au grand débat autour de la fin de vie.

voire l’euthanasie, soient “une rupture des fondamentaux qui structurent la vie sociale, à savoir le refus du meurtre, le refus de l’inceste et le refus du men

À titre personnel, l’archevêque de Besançon Monseigneur Bouilleret, craint que l’éventuelle évolution de la loi et l’ouverture vers le suicide assisté,

porte à ce que je pense être une rupture sociétale et anthropologique !” , revenant aux sources de la doctrine catholique qui prône le “Tu ne tueras point !” Que le reli gieux bisontin ne distingue pas d’un éventuel “Tu ne te

aider à mourir ou pour pré server la vie ?” , faisant réfé rence au contenu du serment d’Hippocrate qui appelle les soignants à rétablir, préser ver ou promouvoir la santé. “J’entends parler de la pos sibilité qu’il y aurait pour un

D’abord nécessaire de généraliser les soins palliatifs.

tueras point.” “Le respect de la vie humaine est essentielle, de sa conception à sa fin naturelle” estime Jean-Luc Bouilleret. “Est-ce que c’est la respon sabilité de l’État de répondre systéma tiquement à tous les désirs de l’individu aumotif que la technique le permettrait ? Je ne le crois pas.” Rétrograde l’Église sur cette nouvelle question de société ? “N’est-on pas au contraire en avance en attirant l’atten tion sur les plus fragiles ? C’est plutôt cela qui fait le lien social, et pas l’indi vidualisme” répond l’archevêque. n J.-F.H.

polyhandicapé de faire entendre sa volonté de mourir par un clignement des yeux. Je crois qu’on marche sur la tête quand on en est à trouver desmoyens techniques pour se dégager de la res ponsabilité de faire mourir quelqu’un” ajoute le prélat franc-comtois, réfutant au passage ce risque que se généralise pour les gens parfois dits “inutiles” (grabataires, polyhandicapés…) la pos sibilité d’avoir accès au suicide assisté. “Une société qui n’est plus capable de prendre en charge les plus fragiles est en danger” , opposant donc la fraternité à la liberté que prônent les pro-suicide

Monseigneur Jean-Luc Bouilleret réfute la tendance à vouloir mettre la liberté de l’individu au centre de tout. “Et

la fraternité ?” demande-t-il.

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