Journal C'est à dire 269 - Janvier 2021

H A U T - D O U B S

“Je commence à faire corps avec ce territoire” Sous-préfet

Arrivé en février dans l’arrondissement de Pontarlier, le sous-préfet Serge Delrieu a dû mettre en application la politique sanitaire, le plan de relance de l’État, tout en gérant les affaires courantes d’une sous-préfecture qui compte 130 km de frontière avec la Suisse.

Serge Delrieu a toujours à portée de main un ouvrage sur Edgar Faure, penser qu’il a eu l’occasion de côtoyer dans sa jeunesse. Il étudie d’ailleurs la possibilité de baptiser une salle de réunion de la sous- préfecture en son nom. l’un de ses maîtres à

C’ est à dire : Diffi- cile d’évoquer l’année 2020 sans parler de la situa- tion sanitaire sur l’arrondis- sement ? Serge Delrieu : Au 5 janvier, le taux d’incidence dans le Doubs était de 285 pour 100 000 contre 228 pour 100 000 en régionBour- gogne-Franche-Comté. C’est bien au-dessus de la moyenne natio- nale qui varie entre 120 et 140. On retrouve la même configu- ration pour le taux d’incidence teur, le taux de positivité aux tests. Il se situe à 10,54 % dans le Doubs, soit le double du taux national à 5,2 %. Càd : On évoque une plus forte tension en zone fronta- lière, comment l’expliquer ? S.D. : On sait que la Suisse n’est pas épargnée. C’est l’effet fron- tière. Il serait par ailleurs utile de développer un axe de coopé- ration futur avec les Suisses sur l’harmonisation des consignes sanitaires, l’ouverture des res- taurants, des stations de ski. Càd : Comment gérer le contrôle de la frontière avec les Français partis séjourner en Suisse pendant les vacances ? S.D. : Rappelons qu’il n’est pas interdit d’aller en Suisse même si l’État français recommande fortement d’éviter les séjours en station de ski. Pendant les vacances, on a procédé à une distribution de flyers à titre pré- ventif sur les postes desVerrières et de la Ferrière.À partir de jan- vier, il sera possible d’effectuer des dépistages aux postes fron- tières avec une obligation de mise en quarantaine si le test s’avère positif. Càd : Que retenir sur la ges- tion de cette épidémie ? S.D. : Depuis mars, l’État a tenu bon avec des incidences limitées dans les hôpitaux. Cette réussite repose aussi sur la mobilisation de la population. Ce n’est jamais populaire de prendre des déci- sions visant à limiter les inter- actions sociales et familiales. On retient aussi les tensions vécues dans les E.H.P.A.D. où l’on commence à trouver des solutions pour remplacer le per- sonnel. L’espoir d’une issue sal- vatrice réside quandmême dans la vaccination. chez les personnes de plus de 65 ans : 342 pour 100 000 dans le Doubs, 263 pour 100 000 en région et 143 pour 100 000 en France.Autre indica-

Càd :À ce sujet, savez-vous com- ment les choses vont se dérou- ler ? S.D. : Cela se fera en plusieurs phases. Les premiers vaccins arrivent cette semaine dans le Doubs. Ils se feront en priorité dans les E.H.P.A.D. et les unités de soins longue durée sur la base du volontariat pour les résidents. Le personnel soignant et les prestataires qui interviennent dans ces services pourront aussi être vaccinés lors de cette pre- cination s’étend au personnel dans tous les établissements de soins sous réserve que la per- sonne réponde au moins un des deux critères. Les professionnels de santé libéraux sont aussi concernés. Le dispositif s’élargira ensuite à tous les acteurs de l’aide à domicile. Càd : Et pour les autres ? S.D. : On va ouvrir, en concer- tation avec les communes, des centres de vaccination à Besan- çon,Montbéliard puis probable- ment à Pontarlier et Morteau en ciblant des locaux permettant d’anticiper la montée du dispo- sitif. D’autres centres ouvriront ultérieurement pour optimiser le maillage territorial. Tous ces centres seront adossés à un éta- blissement de soins comme le C.H.I.H.C. Càd : Dans ce contexte de crise, comment appréhendez- vous les besoins du territoire ? S.D. : Je mise beaucoup sur ma tournée de communes pour pren- dre connaissance des besoins, des inquiétudes. Les maires me font également rencontrer les autres élus de leur commune. C’est très utile de se rendre compte sur place des probléma- tiques. J’effectue régulièrement ces visites avec les parlemen- taires locaux, notamment avec le sénateur Jean-François Lon- geot très attaché à la ruralité. Càd : L’accompagnement des communes implique forcé- ment de régler des problèmes. Comment vous y prenez- vous ? S.D. : Le dynamisme du Haut- Doubs soulève pas mal de ques- tions en lien avec l’urbanisme. D’où l’intérêt de mettre autour de la table les services de l’État et les élus en proie à des diffi- cultés. Je suis là pour favoriser mière étape s’ils répondent à deux cri- tères : être âgé de plus de 50 ans ou être sus- ceptible de développer une comorbidité. La seconde phase de vac-

“Laisser plus de place

à la médiation, à l’intercession.”

On a ouvert le débat en propo- sant aux Suisses de constituer un groupe de travail spécifique au volet paysager. On souhaite- rait qu’un projet suisse en zone frontalière soit soumis aux mêmes contraintes qu’en France. Càd : Vous semblez plutôt à l’aise dans l’exercice préfec- toral ? S.D. : Par rapport à mon passé dans l’administration, je trouve qu’un sous-préfet peut davantage imprimer sa marque et faire valoir ses priorités. Càd : Le souci du dialogue vous anime ? S.D. : J’ai pour adage “summum jus summa injuria” qui signifie que le droit appliqué trop stric- tement peut aboutir à de très grandes injustices. Je pense que le sous-préfet doit s’engager pour faire sortir la solution par le haut. Il doit laisser de la place à la médiation, à l’intercession. Càd : Vous avez pris la mesure de votre arrondisse- ment ? S.D. : Je m’y attache au quoti- dien. Par rapport à mon précé- dent poste à Saint-Flour, je ne suis pas trop dépaysé en évo- luant toujours sur un territoire de moyenne montagne fier de ses produits, ses vaches, ses pay- sages. Ici, on est sur un bassin plus prospère avec des interro- gations inhérentes à cette pros- périté. Je pense à la maîtrise des sols, de l’eau, à la probléma- tique frontalière. Au fil de mes visites et des dossiers à traiter, je commence à faire corps avec ce territoire. Je suis là pour iden- tifier les questions, les enjeux J’en suis encore à la phase diag- nostic. Càd :Votre avis sur l’habitant du Haut-Doubs ? S.D. : C’est quelqu’un de loyal. n Propos recueillis par F.C.

d’euros et les C.F.F. suisses 10 millions de francs suisses. La ligne entre Besançon et La Chaux-de-Fonds fait 86 kmdont 10 kmen Suisse. Ceci expliquant cela. L’objectif est d’améliorer la vitesse, la fréquence et l’offre. Il y aura sans doute beaucoup de coupures de ligne à prévoir en 2021. Càd : Et le franchissement de Pontarlier ? S.D. : Concernant l’aménage- ment de la R.N. 57 à l’amont de la ville, l’enquête publique sera lancée en 2021. Il faudra procé- der aux acquisitions foncières en 2022 avant d’engager les tra- vaux à partir de 2023. Le cap est toujours tenu. On a égale- ment obtenu des crédits spéci- fiques pour l’aménagement du tronçon à trois voies dans la montée de La Main. On en est actuellement au stade de l’appel d’offres pour désigner le titulaire de l’étude avec un rendu d’ici l’automne 2021. Càd : Que répondre aux inquiétudes des communes forestières touchées par les scolytes ? des communes aux ressources forestières. Sur l’arrondissement, cela varie de 20 à 50 %. Je pense que l’on aura une initiative conjointe des ministères de l’Agriculture et de l’Écologie avec la possibilité d’une visite sur place assortie d’une annonce ministérielle. À terme, on sait qu’il faudra trouver des alter- natives au tout épicéa avec l’idée de favoriser la futaie jardinée. Dans le plan de relance, 150mil- lions d’euros sont prévus pour les actions encourageant la diver- sification des peuplements. S.D. : La Direction Départementale des Finances Publiques a établi un tableau assez éloquent du taux de dépendance

l’éclosion de projets qui vont dans le sens de l’intérêt général tout en s’inscrivant dans le déve- loppement durable. On travaille par exemple à l’organisation d’une navette de transport public sur la commune des Fourgs. Le plan de relance s’articule avec les autres plans existants. Je pense par exemple au plan jeune. Il me semble pertinent de remet- tre en place sur l’arrondissement le Service public de l’Emploi qui fédère tous les acteurs de travail : Pôle emploi, mission locale, agences intérim, C.H.U., élus des interco en charge des ques- tions de l’emploi… Rappelons qu’on a créé dans le Doubs des cellules d’appui à la reprise éco- nomique et sociale qui recense les difficultés des entreprises. Ce dispositif se décline aussi à l’échelle de l’arrondissement. Càd : Quel bilan peut-ondres- ser sur les questions de sécu- rité ? S.D. : On constate malheureu- sement une augmentation des violences intra-familiales. Je pense qu’on pourrait aller plus loin dans la réponse associative, c’est-à-dire être plus réactif dans la prise en charge des victimes. Les problèmes sont toujours les mêmes sur le plan de la sécurité routière avec ce cocktail habi- tuel : alcool, drogue, vitesse exces- sive à l’origine de trop nombreux accidents. Càd : Du nouveau sur le front des voies de communication ? S.D. : La Région va passer des contrats locaux de mobilité avec les intercos. La Ligne des hor- logers fera l’objet en 2021 d’une belle rénovation. Au total, cela représente un investissement de 59 millions d’euros. La S.N.C.F. apporte 4 millions d’eu- ros, l’État français 19,4 millions d’euros, la Région verse 19,4 mil- lions d’euros, l’Europe par le biais du F.E.D.E.R. 6 millions

Càd : Comment voyez-vous l’avenir du tourisme dans le Haut-Doubs ? S.D. : Le réchauffement clima- tique nous montre les limites du tourisme de la neige. Mieux vaut aller vers un usage des infrastructures qui servent aux habitants et aux touristes. Il faut saluer les communes et les acteurs privés qui s’engagent encore dans le développement touristique 4 saisons. J’ai ren- contré récemment aux Fourgs la société Jurachiens qui s’équipe pour proposer des sorties toute l’année. Càd : En prenant vos fonc- tions en février 2020, vous parliez d’une volonté de sou- tenir toutes les actions de préservation du patrimoine bâti ou naturel. Êtes-vous satisfait du travail accom- pli ? S.D. : Effectivement, je suis très sensible à la préservation des projets patrimoniaux en sachant qu’il est possible d’utiliser la D.E.T.R. sur les monuments non classés. En 2020, le Château de tion toujours à la recherche d’un exploitant. On peut évoquer les travaux importants de rénova- tion de l’abbaye de Montbenoît, du château Pertusier àMorteau. On est toujours mobilisé contre le projet du parc éolien Bel Cos- ter qui prévoit l’installation de neuf éoliennes sur la crête du Suchet en Suisse. On base notre argumentaire sur l’impact pay- sager et la qualité de l’eau de la Jougnena qui s’écoule en contre- bas du site. J’ai pu mobiliser l’Architecte des bâtiments de France sur ce dossier sensible. Joux a fait l’objet d’une souscription lancée par la Fonda- tion du patrimoine. C’est aussi l’année de la reprise enmain du site de Consola-

“On constate une augmentation des violences intra-familiales.”

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