Journal C'est à dire 247 - Octobre 2018

M O N T B E N O Î T E T L E S A U G E A I S

42

Unis au feu comme à la maison Le centre de secours de Gilley compte trois couples dans son effectif de pompiers volontaires. Un mariage de vocations avec ses avantages et ses contraintes. Gilley

“V ivent les mamies béné- voles pour s’occuper des enfants en cas d’urgen- ce” , souligne Lætitia Ruf- fion en pointant du doigt l’importance d’avoir toujours une solution de garde quand on est susceptible de partir en intervention à n’importe quelle heu- re du jour et de la nuit. Pompier volontaire depuis 14 ans, cet- te infirmière intervient à ce titre au service de santé et de secours médical ley. Elle partage son existence avec le lieutenant Fabrice Ruffion, lui aus- si pompier volontaire à Gilley. “En étant les deux pompiers, on comprend par- fois mieux les contraintes et la pression du métier” , explique l’officier intégré dans le réseau des chefs de groupe qui assure un service de garde tournan- te sur sept casernes, du Russey à Mont- benoît. Les trois couples de Gilley étaient déjà pompiers avant de vivre ensemble. Laissez le charme agir… “C’était mon du S.D.I.S. “On fonctionne en coordination avec les infir- mières des autres casernes” , explique celle qui a en char- ge la gestion des visites médi- cales des pompiers de Gil-

apprenant” , sourit Élodie Marguet, mariée depuis 11 ans avec le lieute- nant Anthony Marguet, chef du centre de secours de Gilley. Avec des enfants en bas âge, ce couple a fait le choix d’être dans des équipes de garde dif- férente. Décision logique pour qu’un des deux puisse rester à la maison quand l’autre doit sortir. “Le centre de secours de Gilley compte 40 pom- piers volontaires dont neuf filles. On effectue entre 250 et 270 interventions qui apprécie à la fois ces renforts et les bienfaits de la féminisation. C’est tou- jours positif en termes de compétences et de disponibilité.” À Gilley comme dans la plupart des casernes du Haut-Doubs, une partie de l’effectif, 11 pompiers pour être pré- cis, travaille en Suisse, ce qui pose le problème d’assurer une présence en journée. “On s’adapte du mieux pos- sible aux contraintes des uns et des autres.” Couple ou pas couple, l’at- tractivité d’un centre de secours et par an. La moyenne d’âge qui est autour de 35 ans a pris un sérieux coup de jeune avec l’ar- rivée de six nouvelles recrues opérationnelles depuis sep- tembre, note le chef de centre

Anthony et Élodie, Mélanie et Ludovic, Fabrice et Lætitia, les trois couples de pompiers volontaires au centre de secours de Gilley.

À chaque couple son organisation.

sa cohésion reposent aussi l’Amicale et Anthony Marguet en est parfaite- ment conscient. “Cela permet de fédé- rer les conjoints, les anciens, les familles. Quand l’Amicale fonctionne bien cela, se répercute aussi sur l’ambiance qui règne tous les jours à la caserne.” La présence de plusieurs couples per- met aussi de s’entraider parfois quand toutes les solutions de garde ont été

épuisées. “On peut se dépanner” , explique Élodie Marguet. À chaque couple son organisation. Quand certains n’ont pas d’autres choix que d’intervenir séparément, d’autres au contraire font tout ensemble. C’est le cas de Mélanie et Ludovic. Dans cet- te famille recomposée, les cinq enfants sont autonomes. “En prenant les mêmes tours de garde, on a les mêmes week-

ends libérés. Dans notre situation, c’est beaucoup plus pratique et confortable” , explique Ludovic qui a déjà 20 ans d’ex- périence au service des pompiers. Méla- nie, sa compagne, s’était octroyée quelques années de pause avant de reprendre du service. “Cela me man- quait trop” dit-elle. Pompier un jour, pompier toujours. Seul, ou à deux. n F.C.

“On ne travaille pas chez les pompiers, on est pompier” Si l’on ne manque pas de pompiers volontaires dans le Haut-Doubs, impossible de relâcher la dynamique de recrutement nécessaire pour répondre aux exigences de pouvoir intervenir en tous lieux du territoire en moins de 20 minutes. Entretien avec le commandant Emmanuel Honor, chef du groupement sud. Volontariat S.D.I.S. 25 Groupement Sud l 26 casernes

détresse dont la prise en char- ge implique davantage de l’écou- te, de l’empathie plutôt que des gros bras. Le champ d’action est très varié et nécessite de la tech- nicité mais aussi de l’humani- té. Il y a de la place pour tous les profils chez les pompiers. Pour information, le taux de fémi- nisation au S.D.I.S. du Doubs avoisine 21 %. C’est est légère- ment supérieur à la moyenne nationale. Càd : Quelle est la part des volontaires sur l’effectif glo- bal des pompiers du Grou- pement Sud ? E.H. : On compte seulement 60 professionnels sur 800 sapeurs- pompiers répartis dans 26 casernes. Aujourd’hui, on est en mesure de déplacer huit hommes casqués, bottés en moins de vingt minutes sur n’importe quel point du territoire. L’état-major a pour mission de maintenir ce mailla- ge en s’appuyant sur des pom- piers volontaires. Càd : Pourquoi s’engager chez les pompiers volontaires ? E.H. : Sûrement pas pour l’ar- gent sachant qu’il touchera 8 euros de l’heure en interven- tion et 0,30 euro de l’heure en astreinte. Globalement, il y a sans doute l’envie de se sentir utile, de donner un sens à sa vie. Les motivations se retrouvent aussi dans le profil. Pour moi, le pompier volontaire est un ambas- sadeur de la sécurité. On ne tra- vaille pas chez les pompiers, on

est pompier tout simplement. Il n’y a aucune différence entre un volontaire et un professionnel. Ils suivent les mêmes forma- tions, partagent les mêmes expé- riences. On a la chance de pou- voir proposer des postes adap- tés aux profils et des outils numé- riques qui nous permettent de prendre en compte en temps réel la disponibilité de chacun. Càd : Manque-t-on aujour- d’hui de pompiers volontaires au niveau du Groupement Sud ? E.H. : Non, on est capable d’as- surer les missions mais l’enga- gement peut s’arrêter du jour au lendemain. La durée moyen- ne d’engagement avoisine 13 renouvellement des effectifs volontaires de 10 % par an, sur la base d’un renouvellement com- plet sur 10 ou 12 ans, ce qui cor- respond ainsi à la durée d’en- gagement moyen. Càd : La dimension fronta- lière du Haut-Doubs est-elle un frein au recrutement ? E.H. : S’il n’est pas disponible en journée, le travailleur fron- talier l’est souvent le week-end. On va engager une réflexion pour cibler davantage le recrutement sur ce public. Plus généralement, ans, c’est légèrement supérieur à la moyen- ne nationale. On est donc dans un état de recrutement perma- nent avec l’objectif de maintenir un taux de

C’ est à dire : Distingue- t-on différents profils de pompiers ? Emmanuel Honor : On les clas- se en trois catégories. La pre- mière catégorie, la plus repré- sentée sur le Groupement Sud rassemble les “villageois”, c’est- à-dire des personnes ancrées sur le territoire et qui s’engagent en quelque sorte au service de ce territoire. On trouve aussi le

bien particulier dans le recru- tement ? E.H. : Non, bien au contraire, on essaie de casser le cliché du pompier de moins de 30 ans, d’1,80 m qui tire 40 tractions. La mère de famille entre 30 et 40 ans, voilà un profil qui nous intéresse beaucoup. Pourquoi ? 75 à 80 % des interventions relè- vent de secours à la personne avec des victimes souvent en

“mercenaire-sauveteur” plutôt jeune, toujours prêt à l’action. C’est un peu un combattant tou- jours prêt à intervenir n’impor- te où. Enfin, la troisième caté- gorie rassemble les “secouristes” qui vont porter la peine des autres, qui veulent être là quand quelqu’un est dans la détres- se.

l 800 sapeurs-pompiers dont 60 professionnels

on exploite tous les créneaux de médiatisation possible : présence sur les manifestations, article de presse, spots radio…On veut faire passer des messages en fai- sant comprendre que le pompier volontaire est un habitant qui secourt un autre habitant. Tout le monde est concer- né. Càd : Qu’en est-il des conventions passées avec les entreprises pour libérer leurs salariés-pom- piers ? E.H. : A l’échelle du Groupement Sud, le taux de conventionne- ment ne dépasse pas 5 %. Pour rassurer les employeurs, on leur explique que ce n’est pas eux qui conventionnent mais au contrai- re les pompiers qui s’engagent en prenant en compte les prio- rités professionnelles. Pas ques- tion de solliciter systématique- ment l’employeur mais seule- ment dans les cas extrêmes. n l Taux de féminisation : 21 % l Durée d’engagement moyen : 13 ans

Càd : Vous ciblez un profil

“Le pompier est un ambassadeur de la sécurité.”

“On est dans un état de recrutement permanent”, souligne le commandant Emmanuel Honor, chef du Groupement Sud.

Propos recueillis par F.C.

Made with FlippingBook flipbook maker