Journal C'est à dire 242 - Avril 2018

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Guéric un salarié - presque - comme les autres Valdahon Après diverses expériences infructueuses, Guéric qui souffre d’une légère déficience mentale a décro- ché son premier C.D.I. à l’abattoir de la Chevillotte à Valdahon. Un bel exemple d’intégration profes- sionnelle mis en place dans un cadre juridico-admi- nistratif toujours aussi peu incitatif.

P our être sûr d’être à l’heure au travail et que personne ne le stresse à l’idée qu’il doive se dépêcher, Guéric Charmoille, 24 ans, se rend désormais à pied sur son lieu de travail. “24 minutes”, c’est le temps qu’il lui faut pour rejoindre l’abattoir où il débute sa journée de travail à 4 heures du matin. “Au début, j’étais à l’accrochage mais cela allait trop vite pour moi” , explique Guéric visiblement ravi d’avoir trouvé un poste plus conforme à ses aptitudes. “Il a besoin qu’on lui pose un cadre. Il stresse vite quand il s’agit d’être précis et rapide” , précise sa maman Del- phine Lombardot. Ancienne institutrice puis chef d’entreprise, elle connaît son fils par cœur et s’est beaucoup inves-

tie pour améliorer son employa- bilité. “Cela intègre à la fois l’ac- quisition des règles indispen- sables pour conserver un travail : sérieux, ponctualité, politesse, la capacité à discerner un envi- ronnement de travail adapté à son handicap et la connaissan- ce des procédures. À chaque fois que Guéric a postulé sur un emploi, je l’ai accompagné lui et l’entreprise concernée pour trou-

Entre Jacques et Fabien, un Guéric rayonnant du bonheur de travailler.

pied d’égalité avec les autres. Pour l’entreprise, le recrutement d’un handicapé n’a rien d’une affaire rentable sur le plan finan- cier. “On se rend compte sur ce type d’embauche particulière qu’on n’est pas du tout aidé, ni encouragé. On est plus gagnant de payer des pénalités que de prendre un travailleur handi- capé. Cela ne motive pas les entre- prises à aller dans ce sens” , constate un rien désabusé Pas- cal Jeanningros. Une critique qui n’est pas adressée à Gué- ric bien au contraire. “C’est une personne attachante qui a vite trouvé sa place. Il est très ponc- tuel et a besoin d’être dans un

reprend vite le dessus. “On le considère comme un autre sala- rié et je crois qu’il apprécie cela. Il est parfois ronchon quand il s’agit de sortir quelques minutes plus tard pour finir un travail mais on le laisse inversement sor- tir plus tôt quand il est vraiment crevé” , note Fabien, alias Nou- nours. Après trois semaines en immer- sion, Guéric a décroché son sésa- me. “On l’a recruté en C.D.I. sur un contrat de professionnalisa- tion qui lui permet de bénéficier d’une formation interne” , com- plète l’entreprise. Pour Guéric, le C.D.I. c’est quelque chose, la récompense qui le met sur un

environnement sécurisé et sécu- risant. On a aussi la chance qu’il soit bien accompagné par ses parents” , ajoute un directeur qui apprécie aussi la sincérité d’un salarié franc du collier incapable de mentir ou de biaiser. Tous sont unanimes pour dire qu’il apporte un plus dans l’en- treprise ne serait-ce que la tolé- rance ou d’apprendre à respec- ter les différences. Grâce à son emploi, Guéric a pris un loge- ment sur Valdahon. Il gagne en autonomie et espère bientôt réus- sir son permis de conduire. C’est sûr qu’avec du travail, on voit la vie différemment. n F.C.

la place qui lui convienne.” Après la tentative au poste d’ac- crochage, Guéric est orienté vers le démoulage et le tri des co-pro- duits. Un travail bien défini, sans trop d’à-coups et qui correspond à son profil. Pratiquement jamais laissé seul, il évolue sous la vigi-

lance de Jacques et Fabien qui l’encadrent tout en finesse avec la patience et la ferme- té qui s’imposent par- fois.

ver des solutions.” Cet- te employabilité a convaincu en tout cas le directeur de l’abat- toir Pascal Jeannin- gros qui lui a donné sa

Il apporte un plus dans l’entreprise.

Travailleur très sérieux, agréable collègue quand il est en confian- ce, Guéric peut aussi s’avérer têtu quand il est contrarié. Rien de bien grave et la bonne humeur

chance. “On a su prendre notre temps pour préparer l’entrée de Guéric. On a fait le tour du site avec lui et ses parents pour com- prendre les difficultés et trouver

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