Journal C'est à dire 236 - Octobre 2017

D O S S I E R

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Le berger des abeilles en conversion bio Doubs Après des années passées à développer son entreprise informatique, Adrien Grosjean a préféré se reconvertir dans sa passion des abeilles avec l’objectif de produire du miel bio.

Adrien Grosjean se déplace sur les marchés bio pour vendre diffé- rents miels produits dans le respect du cahier des

S olide formation d’ingé- nieur télécoms, dyna- mique P.M.E. à crois- sance à deux chiffres, le fondateur de Clic & Com ne devait, en théorie, jamais quit-

Francis se prennent aussi au jeu. “Mes parents vivent dans un petit village haut-saônois. On a installé les ruches dans le jar- din familial et on a commencé à s’en occuper.”

ter l’univers informa- tique. Sauf que ce mode de vie ne correspondait pas à ses aspirations personnelles et fami- liales. En 2008, Adrien et sa compagne assis-

Ce qui n’était qu’un loi- sir va finalement s’im- poser comme une pos- sible reconversion pro- fessionnelle aux yeux d’Adrien Grosjean qui n’hésitera pas à se

charges Écocert.

“On fonctionne en biodynamie.”

humaine et elle finit par stres- ser les abeilles. Je m’inscris plu- tôt dans une démarche où l’on cherche à prendre soin des abeilles avant d’en tirer pro- fit.” Cette conversion mûrement buti- née se traduit par la création de la société Millefera Mellifica. Adrien Grosjean fonctionne dans le respect du cahier des charges bio défini par Écocert. “Dans l’installation des ruches, on pri- vilégie des sites exploités en bio. Pour les soins apportés aux ruches, on proscrit les traite- ments chimiques. On fonction- ne en biodynamie avec des décoc- tions de plantes à base de tisanes,

orties, pissenlits.” Le berger des abeilles évite tou- te intervention contre nature : pas d’introduction, ni de mar- quage ou clippage de reine, auto- production des essaims et des cires, pas de grille à reine pour les bloquer dans le bas des ruches. “Le bien-être des abeilles passe avant la production. C’est chronophage, on perd parfois de la récolte. À force de soins, on

parvient à remettre en état des ruches mal en point et on espè- re alors qu’elles feront du miel à la prochaine saison.” L’api- culteur transhume la moitié de ses ruches pour profiter des flo- raisons d’acacia, de ronces, de tilleul… “On extrait le plus natu- rellement possible en s’interdi- sant le mélange des miels, le bras- sage et surtout le chauffage car au-delà de 40 °C on perd toutes

les caractéristiques du produit.” L’année 2017 n’a guère été pro- pice à l’apiculture avec un prin- temps beaucoup trop précoce. “Depuis juillet, je n’ai pas récol- té plus de 100 kg de miel alors que j’étais à plus de 2 tonnes avant l’été”, indique celui qui commercialise sa production en direct sur les marchés locaux, dans le réseau bio et par le biais du net (mellifera-mellifica.fr). n

tent à la projection du film “Nos enfants nous accuseront” de Jean-Paul Jaud. “À partir de là, on a eu envie de vivre différem- ment. On s’est mis à jardiner” , explique celui qui sera en 2009 à l’origine de la création de l’A.M.A.P. de Pontarlier. Adrien Grosjean s’intéresse déjà à l’apiculture. Cette passion, il la tient de son grand-père Fer- dinand qui lui a inculqué le goût des abeilles avant de lui trans- mettre une vingtaine de ruches. Il a alors tout juste 17 ans. Son père Thierry et son petit frère

séparer de son entreprise au début de l’année 2017. L’expé- rience acquise au fil de son par- cours dans l’informatique lui sera bien sûr profitable d’autant plus qu’il sait exactement où il veut aller. Vers une apicul- ture respectueuse de l’homme et des abeilles. “Aujourd’hui, je m’occupe de 200 ruches. Pour moi, c’est le maximum. À la chambre d’agriculture, on m’en conseillait le double, ce qui sous- entendait de se mécaniser. Cet- te logique ne me convient pas car elle s’éloigne d’une approche plus

Brasserie

En créant audouxbio.fr, Mélanie Lapaire a décidé de proposer aux internautes des produits labellisés qu’el- le connaît parfaitement. Un mode de vie qu’elle veut aussi partager à l’avenir sur les marchés locaux et pour- quoi pas en animant des ateliers. Thomas et sa “Cure de bière”

ont déjà leurs disciples

Soulce-Cernay

De vrais fromages fermiers !

Doubs, par un concours de cir- constances, il achète avec sa compagne l’ancien presbytère attenant à la chapelle dans le hameau de Bonnétage et se for- me à l’Institut français de la boisson et de la brasserie à Nan- cy. Cette fois, Thomas en est convaincu, il veut brasser “sa” bière avec des produits qu’il aura lui-même sélectionnés. cement : ce sera au rez-de- chaussée du bâtiment. Si tout va bien, les premières bières sortiront dans deux ans. Il sait qu’il devra au minimum pro- duire 400 000 litres par an. En fonction du malt qu’il achète- ra, les bières seront variées de la blonde à la blanche en pas- sant par une de saison. Pour le moment, il vend un breuvage importé d’une bras- Pour le moment, il n’a pas encore investi dans les cuves qui lui per- mettront de brasser. Mais il a déjà l’empla-

serie artisanale de Bavière qui a fêté en 2016 ses 500 ans d’existence. Il réalise également des coffrets cadeaux, propose des fûts de 30 litres. Le bouche- à-oreille fonctionne : “La com- mune de Bonnétage a été très réceptive à mon projet. J’ai obte- nu une licence de vente de biè- re à emporter” explique-t-il. Les retours sont positifs. Près de de l’ex-jardin du curé pour déguster le breuvage. Les com- mandes se font par téléphone ou les bières se prennent direc- tement sur place, Thomas étant ouvert assez régulièrement. “La Cure de bière”, nom de l’en- treprise, devrait faire de nou- veaux disciples amoureux des bières de caractère en prove- nance directe de Bavière. n E.Ch. 400 personnes ont participé à l’inaugu- ration. En été, les amateurs de mousse profiteront

C’ est avec sa production de lait de chèvre tiré manuellement que Mar- tine a commencé à fabriquer ses fromages à la fin des années quatre-vingt après avoir quitté son Alsace natale : “Dès 1989 je me suis lancée en allant me pos- ter sur la place de Saint-Hip- polyte avec mes fromages, ma pancarte et mon parasol !” Pas commun à l’époque, en tout cas dans la région. “On avait décou- vert cette méthode de vente en se promenant sur les marchés dans la Drôme” se souvient-elle. Alors forcément, au début, dans ce petit village franc-comtois où l’agricultrice n’était pas encore connue, il a fallu lutter contre les préjugés, lever les doutes, bref convaincre que là-haut, sur les hauteurs de Soulce-Cernay, le travail effectué était digne de la confiance des consommateurs. “J’ai un contact plutôt facile donc j’ai beaucoup expliqué mon métier et puis petit à petit les gens ont pris l’habitude de me Martine Joseph élève avec son mari Christian des chèvres et des vaches. Rien d’original si ce n’est que depuis 30 ans déjà, ils com- mercialisent leurs produits sur les marchés. Du bio cer- tifié produit fermier ! Dans sa ferme à l’écart du village, sur les hauteurs de la vallée du Doubs,

Depuis 30 ans, Martine Joseph propose ses fromages en vente directe, par exemple

D epuis décembre dernier, Thomas Boissenin a transformé l’ancien dor- toir de la cure des Cerneux- Monnot en “bar à bières”. Rien ne prédestinait le jeune papa (28 ans) originaire du Russey à devenir brasseur, passion empoignée depuis ses études (en commerce) qui l’ont conduit à Munich, capitale de la bière allemande. Là-bas, il découvre ce breuvage qui se partage entre amis puis réalise de façon ama- teur de la blonde, de la brune, de la blanche. À son retour dans le Haut-

Pour adultes et enfants.

chaque samedi matin à Saint- Hippolyte.

voir.” Le temps passant, Marti- ne Joseph a donc séduit la clien- tèle locale de plus en plus atta- chée comme partout à la quali- té des produits : “Il y a une confiance qui s’installe. Le consommateur aime savoir d’où vient ce qu’il mange et par qui c’est fabriqué.” Pour utiliser un langage devenu familier, la tra- çabilité est un élément impor- tant dans la décision d’achat. Une approche du métier que les époux Joseph se sont imposée dès leur installation et une péda- gogique qu’ils mettent un point d’honneur à développer tous les samedis à Saint-Hippolyte pour Martine tandis que son mari Christian est présent au mar- ché couvert d’Audincourt les vendredis, samedis et dimanches matin. Un vrai sacerdoce. Ou plus simplement une certaine façon de voir et promouvoir l’agriculture.

À tel point qu’ici, la traite se fait encore et toujours à la main “pour obtenir une meilleure qua- lité de lait.” Cette approche de l’agriculture s’inscrit dans la filière bio “par conviction” car ils sont convaincus qu’un fro- mage lambda n’a pas le même goût que ceux qu’ils produisent et que des éléments comme la pluviométrie ou la qualité de l’herbe font aussi la différen- ce. Un message qu’ils aiment trans- mettre à leur clientèle car depuis leurs débuts, leur fierté est de transformer eux-mêmes le lait et d’aller vendre en personne leurs fromages, sans intermé- diaires, en direct. Si c’est fré- quent aujourd’hui, la méthode l’était beaucoup moins 30 années en arrière. Mais à force de tra- vail, les époux Joseph ont su convaincre et créer un vrai lien de confiance avec la clientèle. n

Thomas Boissenin, futur

brasseur, est installé dans l’ancienne cure des Cerneux- Monnot à Bonnétage.

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