Journal C'est à dire 232 - Mai 2017

D O S S I E R

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Annie Genevard V ème circonscription du Doubs “Ma déception n’est pas de ne pas être ministre mais que nous n’ayons pas passé le premier tour”

tesse. La défaite au premier tour m’a beaucoup plus affligée car on était vraiment armés d’une volonté et désireux de redonner à la France de la fierté, de la grandeur, de la réussite. Mais on n’a pas le droit de chouiner et de se lamenter sur son sort. Je suis une battante et je suis repartie au combat pour défendre nos idées. Càd : Du coup, une fois Fran- çois Fillon oublié, Les Répu- blicains ont sérieusement édulcoré le programme. Vous vous y retrouvez encore ? A.G. : Le programme de Fran- çois Fillon n’avait semble-t-il pas séduit certaines catégories comme les classes populaires, les jeunes ou la ruralité. Le pro- gramme a été certes infléchi sur certains points mais en aucun cas dénaturé. On a infléchi sur le nombre d’emplois publics sup- taires, tout en gardant la prio- rité de baisser la dépense publique, d’augmenter les forces de police et de gendarmerie, de baisser la majorité pénale à 16 ans, de diviser par deux le nombre de nouveaux immi- grés, etc. L’A.D.N. du program- me est respecté et le program- me revisité permet de considé- rer ceux qui ne le trouvaient pas complètement satisfaisant. Càd : Dans les réformes, pré- voyez-vous de détricoter ce qui a été fait en matière de redécoupage territorial avec la loi N.O.T.R.E. ? A.G. : Je pense que nos terri- toires sont épuisés par les réformes successives. Il faut res- ter sur le principe du libre consentement et ne toucher à l’organisation territoriale qu’avec primés, on a pris l’en- gagement de baisser de 10 % la fiscalité, d’augmenter les petites pensions, de défiscaliser les heures supplémen-

d'Emmanuel Macron : affaiblir l’union de la droite et du centre dont je suis la seule candidate sur la V ème du Doubs, capter notre électorat et imposer sans partage son programme. Càd : Seriez-vous prête à sou- tenir des propositions de loi de la future majorité Macron ? A.G. : Il faut d’abord aller jus- qu’aux législatives sans confu- sion. Ceux d’entre nous qui acceptent de rejoindre M. Macron créent cette confusion. Ensuite, j’estime que dans l’intérêt de la France, il faut accepter en effet de travailler avec lui. Pour les législatives, nous disons aux Français : “Ne mettez pas tous vos œufs dans le même panier, équilibrez votre choix.” Et le moment venu, on verra com- ment on peut travailler ensemble. Si nous ne sommes coalition ? Ce sont les législa- tives qui vont le déterminer. Pour l’instant, nous avons envie de faire valoir notre projet pour la France. Mais je réfute l’idée que la droite s’oppose par principe. Càd : Votre candidat Fran- çois Fillon a été battu au pre- mier tour et avec cette défai- te s’est envolé votre espoir de devenir ministre. Avez-vous fait le deuil de cette désillu- sion ? A.G. : Honnêtement, je ne nour- ris pas plus de regrets que cela. Ma plus grande déception a été de voir que notre candidat ne s’est pas qualifié pour le second tour. Je sais que si François Fillon était passé, le fait que je devienne ministre était envi- sageable, mais je n’en éprouve aujourd’hui ni amertume ni tris- pas majoritaires, il faut voir comment nos idées peuvent être prises en comp- te. Doit-on rentrer dans une logique de cohabitation ou de

Elle qui était pressentie pour être ministre veut rebondir après la défaite de François Fillon et défend sans états d’âme le programme revisité de la droite et du centre. Si elle est réélue députée, loi sur le non-cumul oblige, elle se résoudra à quitter la mairie de Morteau.

C’ est à dire : Vous auriez pu craindre une candidature En Marche qui menace votre réélection. Est-ce le cas ? Annie Genevard : Je prends ce qui vient, comme je l’ai fait il y a cinq ans, en allant à la ren- contre des habitants, avec mes convictions et sans m’occuper de qui sont mes concurrents. J’avais soutenu Sylvie Le Hir à l’occasion des élections dépar- tementales. Elle m’a fait part plus récemment de ses états d’âme vis-à-vis de François Fillon. Je pense que c’est quel- qu’un qui se cherche politique- ment. Et Madame Le Hir en adhérant à En Marche se met de fait en dehors de notre famil- le politique, ce qu’Emmanuel Macron a d’ailleurs demandé aux candidats : la double appar- tenance n’est pas autorisée. Lais- ser croire le contraire est semer le doute et la confusion dans l’es- prit des Français. Càd : Ne craignez-vous pas d’être victime du “dégagis- me” ambiant ? A.G. : Je ne me suis pas posé cette question. Tout le monde me concède que j’ai beaucoup travaillé depuis cinq ans sur cet- te circonscription et je crois à cette légitimité du travail et de l’engagement. Et sur le plan local, je pense que l’équation per- sonnelle joue beaucoup. À mon sens, il y aura sans doute une dynamique Macron mais pas au point d’appliquer le pourcen- tage Macron national au niveau de ces législatives. Càd : La réussite d’Emma- nuel Macron et le boulever-

sement du paysage politique qu’il a provoqué vous inter- pellent-ils ? A.G. : On a assisté à une élec- tion atypique à tous points de vue, fruit de circonstances par- ticulières. D’abord le contexte politico-judiciaire et la poussée du Front National au second tour. La philosophie d’Emma- nuel Macron de dire que les par- tis sont morts ainsi que le cli- vage gauche-droite a ses limites. Je sens bien aussi que les par- tis sont dans l’œil du cyclone mais je crois que les courants de pensée de la droite et de la gauche demeureront. Il est d’ailleurs dangereux de vouloir les effacer car c’est la structure même de notre démocratie depuis toujours. Si un jour les gens venaient à s’écarter d’un parti qui serait devenu unique, ils se tourneront vers les extrêmes. Càd : Vous n’êtes donc pas “macron-compatible” ? A.G. : Non, car j’appartiens à une famille politique à laquelle je suis fidèle. Et je crois que les programmes ne sont pas équi- valents. Sur la politique éco- nomique et la réforme du tra- vail, il y a des similitudes, mais pas sur le reste : la politique fis- cale, les questions régaliennes, la culture… Par ailleurs, Édouard Philippe a exprimé clai- rement qu’il était là pour appli- quer le programme du président de la République et lui donner une majorité, c’est-à-dire sou- tenir des candidats En Marche contre les 577 candidats de la droite et du centre qu’il soute- nait encore il y a peu. Quelle confusion ! Voilà la stratégie

Annie Genevard : “Dans l’intérêt de la France, il faudra accepter de travailler avec Emmanuel Macron.”

A.G. : Pour la route, le ferro- viaire, le haut débit, il faut nous faire entendre et pour cela, nous plaidons avec notre programme pour la création d’une agence nationale de la ruralité, à l’ima- ge de ce qu’a été l’A.N.R.U. (agen- ce nationale pour le renouvelle- ment urbain) qui a permis d’in- vestir énormément dans la réha- bilitation des quartiers. Si cette agence voit le jour, j’entends bien que le Haut-Doubs ait sa part. Càd : Si vous êtes réélue, vous serez confrontée à la ques- tion du non-cumul des man- dats avec une loi qui entre en vigueur cet automne. Que choisirez-vous entre votre mandat de députée et la mai- rie de Morteau ? A.G. : Après mûre réflexion, je me suis préparée à l’hypothè- se, si je suis réélue, de devoir passer le flambeau à Morteau. Et si je devais le faire, je veille- rai à ce que les choses soient bien faites. Càd : Qui pour vous succéder à la mairie de Morteau ? Un profil comme Cédric Bôle par exemple ? A.G. : C’est quelqu’un de talen- tueux. Oui, il fait partie des hypo- thèses… n Propos recueillis par J.-F.H.

d’infinies précautions après le traumatisme que les élus locaux ont vécu. Je pense qu’il nous faut désormais une période de sta- bilisation. Càd : Évoquons un sujet plus “Haut-Doubs” avec l’éternel dossier de la R.N. 57. Vous n’avez pas plus réussi que vos prédécesseurs à faire avancer les choses ? A.G. : Des crédits d’études ont été débloqués, je m’étais enga- gée à réactiver ce dossier auprès de l’État qui est le seul déci- sionnaire en la matière, ce qui a été fait. Crédits d’études et 12 millions d’euros de travaux à venir ont été ainsi program- més. Il y a trente ans, il y avait les moyens, aucune contrainte, mais il manquait le portage poli- tique. Aujourd’hui, il y a le por- tage politique mais il n’y a plus les moyens et trop de contraintes réglementaires. Il faut avoir en tête qu’un contournement de Pontarlier, c’est un demi-milliard d’euros ! Il n’en est plus ques- tion. L’option retenue est d’amé- liorer le franchissement de Pon- tarlier et de fluidifier la circu- lation. La reprise de ce dossier n’est pas terminée. Càd : Que plaidez-vous pour faire entendre la voix du Haut-Doubs au national ?

“Il est dangereux de vouloir effacer les courants de pensée.”

Activité

À l’occasion de sa déclaration de candidature le 8 avril dernier, Annie Genevard n’a pas manqué de s’appuyer sur le bilan de son premier mandat à l’Assemblée. Certes depuis avril, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts : exit François Fillon, explosion de la droite, mais toujours pour elle la volonté de participer à “une majori- té solide de la droite et du centre capable d’instaurer une franche alternance” dit-elle. Pas de rapprochement avec En Marche à l’hori- zon… Côté bilan, la députée sortante affirme avoir “beaucoup travaillé en cir- conscription ” où elle a participé à “plus de 560 événements” (comices, inaugurations, manifestations…) “ou lors d’entretiens individuels à ma permanence. J’ai pu contribuer à dénouer des situations qui paraissaient inextricables à ceux qui m’ont sollicitée” affirme-t-elle dans sa décla- ration de candidature. Au crédit de ses actions, on peut également citer les dossiers qu’elle a défendus comme les aides européennes au bénéfice des G.A.E.C., la situation des écoles de montagne, la reconnaissance de l’I.G.P. Absinthe de Pontarlier ou encore la Loi Montagne. Au chapitre des dossiers qui ont, sinon piétiné, mis plus de temps à avancer, on peut penser au chantier de la R.N. 57 et des bouchons des frontaliers, à la couverture du territoire en très haut débit ou enco- re à la couverture en téléphonie mobile. n La députée sortante défend son bilan

Annie Genevard aura participé à 46 comices en 5 ans.

l 380 propositions de loi cosignées l 198 questions écrites l 26 questions orales au gouvernement l 3 rapports d’information, 1 mission parlementaire l Annie Genevard a été classée 35 ème députée la plus influen- te de l’Assemblée nationale

Son activité parlementaire en chiffres

l 1 377 interventions longues dans l’hémicycle l 356 interventions longues en commission l 6 048 amendements cosignés

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