Journal C'est à dire 229 - Février 2017

V A L D E M O R T E A U

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Histoire locale Les syndicats horlogers, vecteurs de progrès social L’historien local Henri Leiser a remonté le fil de l’histoire horlogère du Val de Morteau jusqu’à la création des tout premiers syndicats ouvriers et patro- naux. Une histoire émaillée de nombreux mouvements sociaux.

L’historien mortuacien Henri Leiser a planché sur le sujet.

Le réfectoire des grévistes.

tion de débouchés pour la ven- te et la production des fabri- cants. “Pour ces recherches his- toriques, je me suis appuyé notamment sur le registre du syndicat patronal du Val de Mor- teau, sauvé d’un feu de jardin il y a quelques années. Il débu- te en 1893 et se termine au der- nier feuillet en 1936” note M. Grande grève des ouvriers horlogers en 1907 à Morteau.

O n connaît surtout de l’horlogerie les heures glorieuses qui ont fait la réputation du Val de Morteau et du Haut-Doubs avec l’essor des manufactures qui, jusque dans les années soixante-dix, employaient des milliers de personnes sur le sec- teur. On connaît moins l’aspect social de cette branche indus- trielle et notamment les mou- vements de grogne qui ont émaillé les relations entre ouvriers et patronat, essentiel- lement dans la première partie du XX ème siècle. C’est tout ce pan de l’histoire qu’est en train d’explorer l’his- torien mortuacien Henri Leiser. Fin janvier, il a animé sur ce thème une conférence à Gran- d’Combe-Chateleu. Il prépare actuellement la publication d’un long article sur le sujet dans la revue de l’Association Françai- se des Amateurs d’Horlogerie Ancienne (A.F.A.H.A.). Sur ce même thème, l’étudiante de Vil- lers-le-Lac Marie Chopard-dit- Jean a consacré son étude de Master II. “Les mouvements ouvriers ont suivi le cycle des crises horlogères, note Henri Leiser. À chaque crise écono- mique, l’horlogerie trinquait en premier car c’était une indus- trie de luxe. L’apogée des crises horlogères se situe en 1907. Cet- te année-là, on a affaire à une crise nationale qui a touché notamment les vignerons, l’agri- culture… C’est à ce moment-là que les ouvriers ont commencé à se regrouper en syndicats”

indique Henri Leiser. Avant cela, il faut dire que le mode de fonctionnement des horlogers - qui travaillaient essentiellement à domicile, “sous la fenêtre” - ne favorisait pas les regroupements. “C’est la créa- tion des grandes usines qui a favorisé l’émergence des syn- dicats ouvriers.” Notamment la création par les frères Belzon de la Grande fabrique en 1880 à Morteau, où, à la même époque, de l’usine Frainier (à l’emplacement de l’actuelle éco- le Jeanne-d’Arc à Morteau). “En 1907, la grande grève qui a tou- ché l’horlogerie a duré un mois à Morteau, et seulement quatre jours à Villers-le-Lac. Car à Vil- lers, on était plus sur le début de la montre avec la fabrication d’ébauches, alors qu’à Morteau, les ouvriers étaient plus des “finisseurs”. Ils ont été plus sen- sibles aux mouvements sociaux”

ajoute l’historien. Parfois, les mouvements sociaux ont braqué les patrons. Exemple aux établissements Deleule et Pétolat dont les patrons ont choi- si de fermer l’usine. “On a assis- té à ces périodes-là à des col- lectes de victuailles pour les ouvriers grévistes, notamment de la part des habitants de Vil- lers-le-Lac pour les ouvriers de Morteau qui étaient en grè- ve.” La création des syndicats de patrons est antérieure de quelques décennies. Pour le Val de Morteau, les patrons déci- dent de se regrouper dans une chambre syndicale pour mieux affronter la crise qui se déve- loppe. La première organisa- tion est créée le 25 février 1891. La chambre syndicale d’horlo- gerie du vallon de Morteau est exclusivement patronale et s’oc- cupe spécialement de la créa-

Leiser. C’est à Villers-le-Lac éga- lement que les patrons horlo- gers ont créé la première cais- se de chômage au bénéfice des ouvriers victimes des crises hor- logères. Une sorte d’A.S.S.E.D.I.C. avant l’heure. En 1922, le patronat horloger créait même ce qui peut s’ap- parenter aux premières alloca-

tions familiales avec l’instau- ration d’un sur-salaire desti- né aux familles nombreuses. “Chez Frainier, il y avait même une caisse de retraite et une mutuelle” ajoute l’historien. L’in- dustrie horlogère a écrit aussi une part de l’histoire sociale du Haut-Doubs. n J.-F.H.

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