Journal C'est à dire 216 - Décembre 2015

D O S S I E R

23

De sa passion pour la météo au métier de météorologue Charquemont C’est à Charquemont que Florent Locatelli a grandi et appris à connaître les bases de la météorologie étant enfant avant d’en faire aujourd’hui son métier dans la société privée Météonews pour laquelle il travaille depuis la région parisienne. Retour sur une passion née puis partagée en famille.

“J e travaille depuis plus de dix ans pour l’entreprise Météo- news dont le siège est enSuissemais qui propose aus- si ses services en France.Ma mis- sion consiste à étudier des don- nées brutes, à les interpréter puis à élaborer une prévision fiable pour nos clients en vulgarisant l’ensemble de ces paramètres scientifiques” explique Florent Locatelli qui poursuit en évoquant la com- plexité du métier aujourd’hui à une époque où l’information va vite et est accessible à tout moment et partout. “Il faut donc s’adapter, valoriser nos prévi- sions et apporter une expertise encore plus pointue à nos clients et partenaires.” Un métier qu’il exerce avec passion et par pas- sion. Car c’est même d’une véri- table vocation qu’il s’agit quand on sait que la météo passionne

Florent Locatelli depuis sa plus tendre enfance. “J’avais un grand-père artisan horloger à Charquemont, Marcel Boulogne” raconte-t-il. “Étant enfant j’allais régulièrement le voir, et comme il était aussi pré- sident du ski club local, forcément il était très attentif à l’évolution la météo.” Va-t-il neiger suffi- samment et la neige va-t-elle tenir ? Des questions que le jeu- ne garçon entendait quotidien- nement pendant les longs hivers du Haut-Doubs et auxquels for- cément il s’est vite intéressé. “J’ai commencé à regarder plus atten- tivement les émissions quoti- diennes de météo à la télévision et je me suis documenté pour essayer de comprendre les diffé- rents phénomènes climatiques” se souvient-il. Savoir comment se forme la pluie, d’où vient le vent… Des

questions de base qu’il aborde dans des livres destinés au grand public sans encore plonger dans leur aspect plus scientifique. “Dans la rue où j’habitais avec mes parents, on avait pour voi- sin Monsieur Fleur qui fut cor-

garde notamment en mémoire des escapades peu communes. “En plein hiver, il nous est arri- vé de monter de nuit au-des- sus des pistes à la Combe Saint- Pierre pour mesurer l’épaisseur de neige et relever la tempéra- ture.”

respondant local de Météo France pendant un demi-siècle.” Florent se rapproche forcément de lui et va régulière- ment le consulter pour

Car le jeune homme a très vite tenu lui aus- si ses propres statis- tiques sur la météo observée à Charque-

En mémoire des escapades peu communes.

en savoir plus sur les relevés effectués dans la commune : tem- pérature, pluviométrie, vent ou encore épaisseur de neige en hiver… Une tâche quotidienne, 365 jours sur 365, contraignante et rigoureuse qu’effectuera par la suite son défunt papa, Bruno Locatelli. “C’était un amoureux de la nature et il s’est passion- né avec moi pour la météo” se souvient le jeune homme qui

mont, les prémices aux études scientifiques qui suivront et le mèneront pour des stages au centre régional de Météo Fran- ce. Aujourd’hui, même loin de sa Franche-Comté natale, il gar- de bien évidemment un œil attentif sur la météo prévue à Charquemont, là où il a fait ses premiers pas, alors amateurs, en météorologie. D.A.

Florent Locatelli est devenu météorologue après avoir appris à aimer cette activité aux côtés de son grand-père puis de son papa.

Histoire Les lacs jurassiens pour comprendre l’évolution du climat

Les travaux menés par Michel Magny sur les niveaux des lacs du Jura reconstituent l’histoire du climat sur 12 000 ans. Depuis un siècle, les températures n’ont jamais autant augmenté…

C ette fois, c’est certain, le réchauffement climatique est enclenché.Impossible de fairemarche arrière.À moins d’attendre l’an3 400denotre ère annoncé comme le retour pos- sible d’un nouveau petit âge gla- ciaire pour espérer voir un peu ralentir lahaussedes températures, le processus est lancé. Au cours des 12 000 dernières années, l’amplitude des varia- tions de températures fut d’environ 1,2 °C et le réchauffe- ment actuel atteint déjà + 0,85 °C en à peine un demi-siècle. “C’est ce que l’on appelle la Grande Accélération. Les choses s’accélèrent depuis 1950 même si le processus a commencé au XIX ème siècle” témoigne Michel Magny, directeur de recherche au C.N.R.S. au laboratoire chro- no-environnement de l’Université de Franche-Comté à Besançon. Pour bien comprendre ce qui nous attend, encore fallait-il connaître notre passé climatique. Grâce à des carottages réalisés dans les lacs du Jura français et suisse, le chercheur est parvenu à reconstruire une histoire du cli- mat dans l’Arc jurassien. “On peut remonter à 15 000 ans… Car avant, il y avait de la gla- ce dans les lacs que nous connais- sons” dit-il.

évolué qu’au cours des 7 000 der- nières années. “Au fond de cer- tains lacs du Jura, on aperçoit aujourd’hui des “dead zones” (zones mortes). En dehors du cli- mat, nous perturbons les éco- systèmes.” L’homme est entré dans le circuit climatique, son impact devient plus prégnant que celui des facteurs naturels du climat. C’est pourquoi Paul Crutzen, Prix Nobel de chimie, a proposé de baptiser “Anthro- pocène” la période que nous vivons depuis 1750, caractérisée par les débuts de la machine à vapeur, l’emballement de la révo- lution industrielle au XIX ème siècle. sapins du Haut-Doubs ? “En 100 ans, nous avons récupéré le cli- mat de Lyon des années 1900. Pour un degré supplémentaire, on descend de 200 km vers le Sud. Et d’ici 2100, nous pour- rions connaître tous les deux ans la même canicule que celle de 2003. Il semble difficile d’échapper au réchauffement de + 2 °C” conclut Michel Magny. En 2080, Besançon cultivera des melons ! Les pistes de ski de Métabief pourraient rester vertes en plein hiver. E.Ch. Nous entrons dans une nouvelle ère géolo- gique. Quid de nos

Les résultats sont clairs. Depuis 1 million d’années, le climat de la Terre suit des cycles de 100 000 ans, alternant glaciations et périodes interglaciaires, qui, beau- coup plus clémentes, durent 10 000 à 20 000 ans. Ces phases correspondent aux variations de l’orbite de la Terre autour du Soleil. À l’intérieur de ces grands cycles, on observe des oscillations du climat, dues à des variations de l’activité du soleil, que ren- forcent les altérations de l’activité volcanique et de la circulation océanique. “Notre climat s’inscrit dans une période interglaciaire atteindre un optimum climatique, aux environs de 5 000 ans avant J.-C. Depuis, la courbe de tem- pérature suit un refroidissement progressif, ponctuée d’oscillations principalement associées aux variations de l’activité solaire” explique le chercheur.Mais depuis le début XIX ème siècle, un troi- sième facteur s’est greffé : les activités humaines avec surtout l’industrialisation. L’homme est entré dans le cir- cuit climatique. En moins d’un siècle, les températures ont plus (Holocène), démarrée voilà 11 700 ans. Les températures ont sui- vi une courbe ascen- dante jusqu’à

Quid de nos sapins du Haut-Doubs ?

Michel Magny, chercheur au C.N.R.S. à l’Université de Besançon.

Made with FlippingBook - Online magazine maker