Journal C'est à Dire 96 - Janvier 2005

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A C T U A L I T É

Pascal Taillard a vécu le raz-de-marée Cet homme originaire de Grand’Combe-des-Bois est installé depuis 1996 comme électricien en Thaïlan- de. Il a monté sa propre entreprise à Phuket, un des sites les plus ravagés par la vague meurtrière du 26 décembre. Témoignage. Catastrophe d’Asie du Sud

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C’ est à dire : Comment avez-vous vécu cette terrible catastrophe ? Pascal Taillard : J’étais à mon domicile. Nous venions de fêter l’anniversaire de ma fille qui a eu 1 an le 25 décembre. Je m’étais préparé pour aller chercher un de mes copains auClubMed de Phu- ket. En y allant, je me suis aper- çu qu’ils avaient bloqué toutes les routes. Tout lemonde s’est dit qu’il y avait eu un glissement de ter- rain. On a commencé à avoir plus d’informations et on s’est vite aper- çu que les dégâts étaient très importants. Càd : Vous n’avez pas été tou- ché par la vague ? minant de l’île. C’est là qu’on s’est aperçu de l’ampleur des dégâts. Mais nous pensions que ce phé- nomène était limité à Phuket seu- lement… Ce n’est qu’à midi que nous avons su que toute l’Asie du Sud était touchée. Càd : Votre famille en Fran- ce a dû être très inquiète ! P.T. : Après la catastrophe, quand on s’est rendu compte que c’était très grave, j’ai appelé ma famil- le. Il était 14 heures en Thaïlande, 8 heures dans le Haut-Doubs. Mes parents n’ont pas eu le temps de s’inquiéter, c’est moi qui les ai prévenus de ce qui était arrivé. Càd : Les événements se sont enchaînés très rapidement ? P.T. : C’était exceptionnel. Les deux vagues ont été rapprochées de 4 minutes, ça a été très vite. P.T. : Heureusement non. Nous habitons côté Est de l’île de Phuket, une partie un peu plus pro- tégée. Nous sommes montés sur un point cul-

Ceci dit, les vagues n’ont pas fait 10 ou 15 mètres de haut com- me on a pu l’entendre. Elles fai- saient 5 ou 6 mètres, mais c’est largement suffisant pour causer tous ces dégâts. Tout le monde fuyait dans les collines et dans les voitures. Le téléphone ne fonc- tionnait plus, il y avait plein de saleté partout. Il n’y a pas de mot pour expliquer ce qui se passait. J’ai su ensuite que mon copain plombier du ClubMed était décé- dé… Càd : Et ensuite ? P.T. : C’est surtout le lendemain que tout le monde a pu aller se rendre compte de ce qui s’était passé. C’était inimagi- nable… Tout est dévas- té, les voitures se sont accumulées à l’intérieur des bâtiments, les unes sur les autres. Les cadavres, ventre ouvert, les odeurs… C’est pire qu’un film d’horreur. Ça sent la mort… Càd : Les secours se sont vite organisés ? P.T. : Une cellule de crise s’est mise en place tout de suite, le gouvernement français a pris les choses en main pour rapatrier les blessés puis tenter de recon- naître les cadavres. Le Club Med m’a appelé le dimanche pour remettre l’électricité, puis j’ai tout de suite été mobi- lisé pour l’assistance tech- nique. Le problème majeur, c’est l’eau. La plupart du temps, l’eau vient des puits qui fonctionnent grâce à des pompes. S’il n’y a plus d’élec- tricité, il n’y a plus d’eau. Il manque de tout. Même les volontaires venus de Bang- kok arrivent en sandales

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Pascal Taillard et sa famille ont été épargnés.

dans les décombres. Ils n’ont même pas de chaussures de sécu- rité. Càd : Vous avez perdu des proches ? P.T. : Ma famille est saine et sau- ve. J’ai perdu deux connaissances françaises, dont un copain, Michel, avec qui j’étais en train de déve- lopper une branche informatique dans mon magasin. Il a dispa- ru avec sa femme et ses deux enfants… Càd : Vu de France, on a l’im- pression qu’il y a un certain fatalisme dans la population locale ? P.T. : C’est un peu vrai. Le Thaï est comme ça : il ne va pas pleu- rer pendant des jours une per-

sonne disparue. Maintenant, il faut bien avancer, continuer et reconstruire. Càd : Pensez-vous que les tou- ristes vont revenir ? P.T. : C’est à vous qu’il faut poser la question ! Est-ce que vous vien- driez ici ? Il ne faut pas oublier que c’est un phénomène excep- tionnel. La dernière grosse mon- tée des eaux datait peut-être de 200 ans. C’est comme si on disait qu’il y pouvait y avoir un grave tremblement de terre à Morteau. Ce n’est pas pour autant qu’on met les moyens en face pour la prévention. Càd : Comment envisagez-vous l’avenir proche ? P.T. : Maintenant, on doit vivre

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“C’est pire qu’un film d’horreur. ça sent la mort…”

avec ce qui s’est passé. On conti- nue à se lever le matin, à man- ger, à travailler. Même si on y pense tous les jours, il faut désor- mais travailler à la reconstruc- tion. C’est triste à dire, mais j’ai du travail qui n’était pas pré- vu. Ce qui n’empêche pas de pen- ser sans cesse à tous ces dispa- rus. 5 000 cadavres n’ont toujours pas été retrouvés ici. ! Propos recueillis par J.-F.H.

En bref

" Tennis Le projet de tennis couvert à Maîche a été mis en attente par le conseil municipal, le temps de consulter toutes les associations sportives. L’idée serait de cou- vrir 2 des 4 courts existants et d’adapter un des 2 courts pour recevoir d’autres activités. " Galette Sous la houlette de son prési- dent Jean-Luc Viennet, les arti- sans boulangers-pâtissiers du Doubs expriment leur “ras-le- bol” de voir vendre des pro- duits saisonniers à n’importe quel moment de l’année. Concernant la galette des rois par exemple, ils accusent la grande distribution de vouloir “uniquement faire du business .” Ils lancent donc la galette pri- meur, faite le jour même de sa vente et vendue uniquement durant le mois de janvier. " Portugal La Portugal est à l’honneur lundi 31 janvier à 20 heures au théâtre de Morteau dans le cadre du cycle Connaissance du Monde. L’occasion de mieux découvrir le peuple por- tugais résolument tourné vers l’extérieur au point que 200 millions de personnes dans le monde parlent leur langue. " Frontaliers Encore plusieurs réactions à notre précédent sujet sur la situation des frontaliers. Syl- vie Prêtre (Le Russey) par exemple dénonce un “débat de clocher” et s’insurge contre “cet égoïsme des frontaliers.” Jacques Henry-Blanc de Vil- lers-le-Lac quant à lui, met en parallèle son enfance où il parcourait à pied tous les jours dans la neige le parcours Col- des-Roches-Les Bassots pour se rendre à l’école. Un petit clin d’œil à ces “frontaliers bougons” comme il les nom- me.

Pascal Taillard a pris ces pho- tos quelques heures après le drame.

Ces images donnent la mesure des dégâts à la suite de cet événement naturel meurtrier.

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