Journal C'est à Dire 87 - Mars 2004
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L E P O R T R A I T
Remonot
Aline et André, des retraités pas comme les autres Pour Aline et André Vuillemin, l’âge de la retraite a son- né depuis longtemps. Mais voilà, le couple continue de faire vivre l’épicerie et le café qui va avec à Remonot.
É picerie ouverte du lundi au samedi. Fermeture excep- tionnelle les jours fériés. Même rythme, pour le café, à la différence près que les horaires de celui-ci sétirent jusquau dimanche à midi. Et il ny a pas de rai- son que ça change. En tout cas, pas tant quAndré et Aline Vuillemin se sentent en santé pour faire tourner la boutique. Le couple a aisément lâge de la retraite. Pourtant à 80 ans pour monsieur et 70 pour madame, il nest pas question darrêter lactivité. À lépoque des 35 heures pétantes et de la société des loisirs, cette situation est plutôt atypique avouons-le. Dailleurs, le débat sur la réduction du temps de travail préoccupe peu nos deux com- merçants. Sils continuent à sinves- tir, cest par nécessité pour le village de Remonot (commune des Combes) qui garde ainsi son épicerie à un moment où le commerce rural de proximité est moribond. On peut le regretter. Nous
vieille dau moins 20 ans est bien assi- se au milieu du comptoir. Le meuble dune modeste facture est droit face à lentrée. Au sol, un plancher massif. Tout dans cette pièce donne limpres- sion que le temps sest arrêté. Il ny a guère que les prix en euros affichés en dessous des produits comme signe dactualité. Et encore. André et Aline nutilisent pas détiqueteuse, mais un tampon circulaire sur lequel déroulent les chiffres. Les étagères sont bien remplies et les denrées alimentaires soigneusement rangées. On trouve de tout chez lAli- ne. En tout cas, les produits de pre- mière nécessité, comme le pain, des conserves, du sucre, etc. Ici, les produits dentretien côtoient aussi un peu de mercerie et des fournitures de bureau, à droite du comptoir en entrant. Disons quon dépanne les gens. On vend du gaz, du tabac, des timbres, des fruits et légumes, des mobicartes, des pelles à neige, ça rend bien service. Par contre,
Aline et André dans lépicerie qui na pas changé depuis 1947.
Pourtant, ce café avec ses grands néons blancs qui barrent le plafond vaut le détour. Il est à lui seul une curiosité. Il a la spécificité de ne pas avoir de comptoir, pièce centrale de ce genre dendroit. Là, le bar est dans un placard où sont rangées les bou- teilles. Aline et André louvrent à la demande pour servir le client. Même si les visiteurs sont moins nombreux, et que leurs enfants les invitent à le faire, ces commerçants ne sont pas décidés à rendre leur tablier. En sen allant, ce serait la mort du pays. Pourvu que ça dure. Mais le jour où un repreneur pointe le bout de son nez, alors seulement André et Aline pourront songer à prendre leur retrai- te bien méritée. ! T.C.
jeunes étaient organisés dans le secteur. Ça faisait tourner le commerce se sou- vient la maîtresse des lieux. La fro- magerie qui a fermé en 1976 amenait de la clientèle au café. Le dimanche après la messe, les anciens se donnaient rendez-vous chez Vuillemin. Cétait lépoque où lépicerie avait la respon- sabilité de lunique téléphone du vil- lage. Un souvenir éprouvant pour Ali- ne, mère de 5 enfants. Nous avons tenu la cabine téléphonique jusquen 1973. Cétait du travail. La nuit quand quel- quun devait appeler le médecin ou un vétérinaire, il le faisait depuis chez nous. Jétais gérante de la cabine. Il fallait être ouvert de 7 heures du matin à 21 heures le soir tous les jours. Cétait infernal. Certains jours, entre lépice-
rie, le café, le téléphone et les enfants, il ne fallait pas avoir les deux pieds dans le même sabot. La maison Vuillemin vivait à ce ryth- me-là. Mais cette époque est révolue. Les modes de vie ont changé, les gens se déplacent facilement. Les grands centres commerciaux ont supplanté les petits commerces ruraux au cur des villages. Le café de Remonot qui joux- te lépicerie est aussi moins fréquen- té. Il sanime encore pour les réunions des associations sportives. Par contre, le quotidien nest plus comme avant. La longue table dite des anciens est souvent vide. Elle en a entendu cette table. Des discussions, des blagues, des colères. Si elle pouvait parler soupire Aline.
sommes utiles. On donne de la vie au pays, cest pour ça quon est là estime Aline qui ajoute du même ton tranquille, ici les gens se rencontrent, se connais- sent, ils discutent. Lépicerie favorise le lien social.
on ne fait pas de boucherie car il faudrait installer une armoire frigorifique insis- te Aline. Le fond de clientèle sest réduit avec les années. Il res-
En sen allant, ce serait la mort du pays.
te quelques acheteurs réguliers mais la plupart sont plus occasionnels et moins habitués. Lanimation na rien de com- parable avec le Remonot des années 30. En ce temps-là, il y avait 3 épiceries et 4 cafés. Ce nétait pas comme mainte- nant. Il y a 20 ans encore, des camps de
Rien na changé depuis 1847, date de création de létablissement, par les aïeuls dAndré, au rez-de-chaussée de la fer- me familiale. Il y a une cinquantaine dannées, jai refait les rayons et cest tout raconte André. La balance Berkel
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