Journal C'est à Dire 87 - Mars 2004

20

É C O N O M I E

Damprichard Raphaël Silvant : “À nous de saisir les opportunités de travail” À la tête de l’entreprise familiale Silvant S.A. de Damprichard, Raphaël et Nico- las Silvant font le point sur leur socié- té en plein essor économique.

C’ est à dire : Vous venez d’intégrer les sociétés L.B. à Maîche et réat’Heure à Dampri- chard. C’est la preuve d’une bonne santé de Silvant S.A. ? Raphaël Silvant : L’entre- prise a une croissance soute- nue de l’ordre de 20 à 30 % par an depuis 5 ans. Nous sommes en position de gain de parts de marché chez nos donneurs d’ordre, et on trouve de nou- veaux clients. Toute la diffi- culté est d’assumer cette crois- sance. Cela passe par des inves- tissements. Càd : Mais pourquoi L.B. et pourquoi Créat’Heure ? R.S. : Pour Créat’Heure, c’est une conjugaison d’opportuni- tés qui nous intéressait entre

de la surface disponible, des moyens de fabrication et une activité qui a trait à l’horlo- gerie de luxe. L.B. répond plus à une stratégie non pas de croissance externe, mais de globalisation de l’offre. Cette entreprise en difficulté était un de nos fournisseurs pour des produits de luxe. Nous ne voulions pas voir disparaître cette activité dont on peut enco- re exploiter le potentiel. On intègre ainsi un savoir-faire supplémentaire qui intéresse nos clients. L.B. va devenir Silaque. En parallèle, sur notre site à Damprichard, nous avons entrepris des travaux d’ex- tension qui doivent s’achever en juin 2004. Le montant total de ces investissements est de 1 million d’euros.

Nicolas et Raphaël Silvant ont repris l’entreprise familiale.

Càd : Qu’est-ce que cela représente en termes d’em- plois ? R.S. : Nous sommes 120 per- sonnes au total dont 70 sur le site de Silvant S.A. Càd : Est-ce que le fait d’in- tégrer deux entités diffé- rentes n’a pas aussi un effet déstabilisant ? R.S. : Il y a en effet une char- ge supplémentaire à assumer. La difficulté se situe surtout au niveau du management. Dans le Haut-Doubs, les gens veulent connaître les respon- sables de l’entreprise et les clients pour lesquels ils tra- vaillent. Ce type de regroupe-

Càd : Avez-vous déjà son- gé à délocaliser, pour des raisons de coût du travail par exemple, ou alors pour suivre vos donneurs d’ordres ? R.S. : La concurrence est rude. En effet, certains de nos clients font pression pour que l’on délo- calise vers l’Asie où les pays de l’Est où le coût du travail est moins élevé. Mais je res- te persuadé que nous avons notre carte à jouer à Dampri- chard. À nous d’adapter notre outil de production pour res- ter compétitifs. Peut-être qu’à terme, certains de nos produits seront fabriqués ailleurs, mais pas ceux à forte valeur ajou- tée qui demandent technique et savoir-faire. Selon moi, le luxe par définition n’est pas “vulgarisable”. On ne devrait pas pouvoir fabriquer des pro- duits de luxe dans des pays où les coûts de main d’œuvre sont très faibles et les conditions de travail discutables. C’est une réalité, nous vivons dans un pays où la main d’œuvre coûte cher et dans une région où nous ne pouvons pas faire jouer l’attractivité. Nous devons donc faire des choix stratégiques en fonction de ces paramètres-là. Nos principaux handicaps, ce sont les moyens de communication, les moyens de transport, le recrutement et la proximité de la Suisse. Càd : La foire de Bâle approche. Vous y serez ? R.S. : Oui, nous y allons en tant que visiteur. Nous comp- tons sur Bâle pour prendre la température du secteur hor- loger. Càd : Quelles sont vos ambi- tions dans l’horlogerie ? R.S. : Si nous avons une car- te à jouer, c’est de mettre tous nos métiers et notre savoir-fai- re au service de l’habillage hor- loger. À cette condition, on peut garder une part d’activité dans l’horlogerie. !

ment s’accompagne toujours d’une période de flottement qu’il ne faut pas laisser per- durer. Il faut veiller à ne pas prendre de distance avec les gens pour ne pas qu’ils perdent leurs repères. Dans chaque entité, on délègue une part de la direction. Par contre, il est important que chaque entreprise garde sa spécificité propre et que cha- cune d’entre elles bénéficie du savoir-faire de l’autre. La fina- lité de cette démarche est que nos clients profitent de cette synergie créée. Càd : Le fléchissement de la conjoncture ne semble pas vous freiner dans votre stra- tégie ? R.S. : Je ne pense pas que nous soyons un cas d’école dans le secteur. Je crois surtout que la stratégie d’investissement que l’on adopte aujourd’hui arrive à la suite d’une période de longue retenue. Nous vivons dans un monde où il faut savoir saisir les opportunités de tra- vail en se donnant les moyens de les honorer. Nous inves- tissons dans tous nos métiers. Ce qui nous sauve aussi, c’est une for- te implication de tous nos collabora- teurs à qui l’on don- ne des opportunités de carrière qui n’existent pas toujours dans la région. Càd : Aujourd’hui, Silvant S.A. est donc positionnée sur quels types de produits de luxe ? N.S. : Nous sommes fabricants d’accessoires métalliques de luxe, dans trois grands domaines. La maroquinerie et le prêt-à-porter, secteurs pour lesquels nous fabriquons par exemple des boucles de cein- ture et des fermoirs. La bijou- terie et l’horlogerie où l’on réa- lise des colliers, pinces à cra- vate, boîtes de montre. Le troi- sième secteur concerne des accessoires de luxe en rapport avec l’art de la table, la lunet- terie, les instruments de

musique et d’écriture ou enco- re l’ameublement. Càd : Quelle est la part de chaque secteur dans votre chiffre d’affaires ? R.S. : Notre chiffre d’affaires avoisine les 6 millions d’euros. En 2004, la maroquinerie va représenter 45 % de l’activité, bijouterie-horlogerie 35 % et les produits de luxe 20 %. Je précise que nous avons aussi une activité de soudage, qui a donné naissance à cette entre- prise fondée par mon père Yves Silvant. Actuellement, le sou- dage profite à 60 % de l’en- semble de nos activités. Pour les 40 % restants, le procédé sert à des domaines comme la sécurité, la lunetterie, la connectique, le médical. Càd : Qui sont vos clients ? R.S. : La plupart de nos don- neurs d’ordres sont sur le mar- ché du luxe. La majorité d’entre eux se trouve à Paris. Càd : Et l’export ? R.S. : Nous travaillons essen- tiellement avec l’Europe. 22 % de notre production est expor- tée. bue. Mais ce qui fait la réus- site de cette entreprise, c’est d’abord la maîtrise de nos métiers qui nous permet d’être réactifs. Notre capacité à réagir intéresse d’autant plus nos clients lorsqu’il s’agit de pro- duits complexes à forte valeur ajoutée. Càd : Vous êtes dans une démarche qualité ? R.S. : Nous mettons en place un département qualité avec des techniciens qualité. Le but est que le savoir-faire cultivé dans la région s’écrive, se défi- nisse et se transforme en un cahier des charges qui se trans- mette. Nous voulons constituer une sorte de base de données de nos métiers. Càd : Votre diver- sité contribue-t- elle à votre réus- site ? R.S. : Elle y contri-

Des recettes mais peu de bénéfices Pourquoi l’autoroute est payante ? Pierre Fabre, directeur régional de la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône répond. Autoroute

L e péage est obligatoire pour tous les usa- gers de l’autoroute. Qui n’a jamais mau- gréé au moment de s’acquitter de ce droit de passage, agacé par la somme demandée par le guichetier ? Franchement, depuis le temps que certaines autoroutes existent, comment se fait-il qu’elles coûtent encore aussi cher à l’automobiliste ? La rédaction du journal C’est à dire a posé la question à la société des auto- routes Paris Rhin-Rhône (S.A.P.R.R.). Entre l’A 39 et l’A 36, l’antenne régionale de la S.A.P.R.R. gère les 380 km d’autoroute qui tra- versent la Franche-Comté. Sur les trois gares de péage de Besançon seu-

changer en 2004. La difficulté résulte de la lour- deur des investissements et de ceux qu’il faut prévoir.” L’autoroute coûte cher au conces- sionnaire, en construction et en entretien. Par exemple, la S.A.P.R.R. va investir 250 millions d’euros pour créer une troisième voie aux abords de Belfort et Montbéliard. Des travaux finan- cés par les clients de l’A 36. “Les charges de remboursement sont énormes et certaines auto- routes dont le trafic est insuffisant sont défi- citaires. Des infrastructures ont été réalisées plus dans un souci d’aménager le territoire que de rapporter de l’argent, c’est le cas de l’A 39. On estime en moyenne que nous sommes à l’équi-

“Toute la difficulté est d’assumer cette croissance.”

lement (Saint-Claude, Valentin et Marchaux), elle annonce des recettes en 2003 de 23,5 millions d’euros. La gare la plus importante est celle de Besançon Nord qui génère 11,5 mil- lions d’euros de recette. En termes de mouvements, ce sont

libre à 15 000 véhicules par jour.” La S.A.P.R.R. qui est une des prin- cipales sociétés d’autoroutes de Fran- ce, pratique aussi des tarifs au kilo- mètre parmi les moins élevés du réseau national. Le prix moyen par kilomètre parcouru est facturé à

“Les charges de remboursement sont énormes.”

environ 11 millions de personnes qui entrent et sortent de l’autoroute à Besançon chaque année. Des chiffres qui donnent le vertige. Et pourtant, au final, les résultats financiers du réseau ne sont pas systématiquement excé- dentaires. Les explications de Pierre Fabre, directeur régional Alsace-Franche-Comté de la S.A.P.R.R. “Jusqu’à présent, la S.A.P.R.R. ne dégageait pas de bénéfices à proprement dit et nous existons depuis 42 ans. Cela devrait

l’usager 0,065 euro. 56 % de ce tarif servent au remboursement de l’emprunt, 21 % au fonc- tionnement et au financement des grosses opé- rations et 23 % sont des impôts, taxes et pré- lèvements de l’État (y compris la redevance domaniale). Des tarifs qui varient en fonc- tion de la situation de l’autoroute. On paiera plus cher du kilomètre sur un axe de montagne, où les travaux ont été beaucoup plus impor- tants qu’en plaine. ! T.C.

Propos recueillis par T.C.

Made with FlippingBook HTML5