Journal C'est à Dire 261 - Janvier 2020

D O S S I E R

Des retraités qui peinent à joindre les deux bouts Coût de la vie Les temps sont durs dans le Haut-Doubs quand on se retrouve seul avec une petite retraite. Certains n’ont plus d’autre choix que de se tourner vers les associations qui distribuent de l’aide alimentaire. Témoignages.

Les Restos du cœur accueillent désormais 10 % de retraités. Un public qui ne venait pas avant. Également des problématiques médico-sociales

L e Haut-Doubs n’a mal- heureusement pas le privilège des fins de mois difficilesmais,pour des retraites équivalentes, c’est malheureusement plus compli- qué de joindre les deux bouts. Surtout quand on se retrouve seule et locataire comme c’est le cas de cette dame qu’on prénom- mera Hélène et qui aura 72 ans en 2020. “La vie est maintenant très compliquée. Je touche aujourd’hui 1 045 euros de retraite. Je paie un loyer de 500 euros en bénéficiant de 42 euros d’A.P.L.Quand j’ai réglé toutes les charges, il me reste environ 300 euros pour me nour- rir, m’habiller” , confie celle qui n’a guère eu d’autre choix que de pousser la porte des Restos du cœur il y a deux ans.Un crève- cœur. “La première fois, je suis sortie en pleurant. Il m’a fallu du temps pour le dire à mes enfants.Aujourd’hui, celame fait du bien d’y aller. Je suis quitte

pas venir.C’est toujours une ques- tion de dignité” , rapporte une responsable locale des Restos. Autre bénéficiaire qui accepte de témoigner à couvert. “C’est la galère en étant seule avec une petite retraite. J’ai dû racheter dernièrement une nouvelle machine à laver car l’ancienne était tombée en panne. Ajouter à cela une grosse facture de chauf- fage et on se retrouve vite dans une situation pénible.” Elle aussi s’est tournée vers l’aide alimen- taire.D’abord les Restos du cœur en hiver, puis la campagne d’été. Emploi dans le commerce, période de chômage, travail dans les services à la personne, elle a travaillé toute sa vie avant de prendre sa retraite il y a quelques années. “On se retrouve vite isolée quand on est en difficulté. Je ne suis pas malheureuse mais on voudrait bien vivre un peu mieux” dit-elle simplement. n F.C.

d’acheter àmanger tous les jours et ici, on peut discuter, boire une boisson chaude, prendre un gâteau.” Hélène n’a rien d’un cas social victime d’une enfance doulou- reuse, sujet à toutes sortes d’ad- dictions. Originaire du Haut- Doubs, cette maman de deux enfants était ouvrière comme tant d’autres. Travail dans des usines locales pendant 25 ans, chômage, nouvel emploi dans une société de nettoyage avant de terminer sa carrière comme A.T.S.E.M. dans une écolemater- nelle. Séparée, elle tient portant à rester autonome. Non sans sacrifices. “Vous n’imaginez pas les difficultés à gérer une dépense imprévue” dit-elle. Hélène n’a pas de voiture bien sûr, ne part pas en vacances et ne parvient plus àmettre de l’argent de côté. Les seniors sont de plus en plus nombreux à venir aux Restos du cœur, c’est environ 10 % des effectifs actuels. “D’autres n’osent

La cherté du logement n’est pas le seul obstacle pour les familles fragiles dans le Haut-Doubs. Surendettement et santé sont d’autres thèmes délicats.

des modes de garde est majeure : près du 1/3 des assistantes maternelles agréées du Dépar- tement exercent sur le Haut- Doubs et Portes duHaut-Doubs.” Et comme l’offre médicale géné- raliste est également en tension, “la présence dans ce contexte de la Protection Maternelle et Infantile (P.M.I.) et les services développés représentent une offre résiduelle particulièrement pertinente.” Sur le plan du maillage terri- torial des services, il manquerait sans doute, que ce soit du côté de Morteau que de Pontarlier, des centres intercommunaux d’action sociale. Certaines com- munes seules ont désormais du mal à assumer ces missions sociales, d’autres C.C.A.S. sont maintenant sous-dimensionnés par rapport à une population en constante augmentation. n

L e surendettement est une réalité dans le Haut- Doubs frontalier. “Il s’agit notamment de difficultés de ges- tion souvent liées à l’indexation du niveau de vie des familles sur les salaires d’origine suisse, et quand ils sont exposés à une perte d’emploi, la spirale du surendettement démarre. Ces cas ne sont plus rares” confir- ment les services sociaux du Département du Doubs. L’iso- lement des familles, en prove- nance d’autres régions fran- çaises et attirées par les opportunités du territoire, est également réel. Notre territoire est touché aussi, comme les autres, par la déma- térialisation des services à la

population, “générant des démarches accrues auprès des centresmédico-sociaux” ajoutent les services sociaux. Au chapitre de la mobilité, “la propriété et l’entretien d’un véhi- cule obsolète et vétuste par une famille aux revenus précaires constituent une difficulté sup- plémentaire. Les familles, usa- gers du service social, rencon- trent fréquemment des contraintes de mobilité en par- ticulier pour l’accès à l’emploi ou à la formation sur les com- munes éloignées” ajoutent les services. Sur le plan de la petite enfance également, “nous notons toujours des tensions sur les modes de garde. Le Haut-Doubs est un territoire où la question

Du 8 janvier au 4 février

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