Journal C'est à Dire 259 - Novembre 2019

L E P O R T R A I T

Les raisins éclatants de Santé Le raisin fragola est le lien qui relie Santé Lénardon à l’Italie, son pays d’origine. Il en cultive dans son jardin à Villers-le-Lac. Le retraité de 76 ans vient de donner les dernières grappes cueillies avant les premières gelées. Villers-le-Lac

guerre d’Algérie. “J’ai fait trois mois à Bourg-Saint-Maurice, et 18 mois en Algérie du côté de Bordj Ménaïel en Kabylie.” Le soldat était affecté au ser- vice des transmissions. Ses compétences en la matière vont d’ailleurs lui ouvrir des opportunités inattendues, lorsque l’armée va le met- tre à disposition des organisateurs de compétitions de ski alpin. “C’est comme ça que j’ai chronométré Jean-Claude Killy ouMarielle Goitschel” se souvient le retraité qui ne fera pas sa carrière professionnelle en France, mais en Suisse voisine. Il va travailler en famille pendant 45 ans chez nos voisins helvètes, dans les travaux publics, avant d’emménager à Villers-le-Lac pour la retraite. Lorsqu’il était en acti- vité, il intervenait sur les chantiers d’aménagement routier aux com- mandes de sa niveleuse. “J’ai travaillé sur toutes les routes du Jura ! Cela représente suffisamment de kilomètres pour faire l’aller et le retour entre la Suisse et le Portugal” s’amuse-t-il. Assis à la table de la cuisine, Santé Lénardon égrène ses souvenirs. En parcourant les photos, il évoque avec pudeur sa famille, son épouse Jacque- line, décédée il y a quelques années, et ses enfants. Le ton est énergique lorsqu’il parle du sport, le foot en par- ticulier, une passion. “Il y a deux ans, je jouais encore aux Brenets. J’ai joué également au club Morteau-Montlebon. J’ai toujours fait beaucoup de sport,

S anté Lénardon a cueilli les der- nières grappes de raisin. Les premières gelées de novembre ont sonné la fin des vendanges pour ce retraité de Villers-le-Lac de 76 ans. Il y a quelques semaines encore, la vigne qui recouvre la tonnelle de son jardin, ployait sous le poids des fruits. “Elle donne tous les ans cette vigne. J’en ai récolté 40 kg au moins cette fois-ci” annonce le septuagé- naire qui a partagé sa récolte avec son entourage, prenant soin de fournir quelques expli- cations au novice qui le goûte pour la première fois. Ce raisin (noir ou blanc) n’est pas tout à fait comme les autres. Lorsque le grain s’ouvre entre les dents, il se dégage de la pulpe une surprenante saveur de fraise qui éclate en bouche. “Vous avez compris pourquoi il s’appelle le raisin “fragola”,“fraise” en français !” s’amuse Santé Lénardon. Le cépage Uva Fragola pousse principalement dans le nord-est de l’Italie, dans la province de Frioul. Là-bas, les vigne- rons qui le cultivent produisent le Fra- golino, un vin qui une fois en bouteille

conserve des arômes inimitables de fraise des bois. Sa production confi- dentielle, fait toujours le bonheur des amateurs de ce breuvage vendu à bas prix. “Le Fragolino est une denrée rare, c’est un vin très particulier” rappelle Santé Lénardon qui en eu quelques bouteilles en cave.

Ce raisin qu’il cultive avec attention dans son jardin à Villers-le-Lac et qu’il par- tage, est le lien qui le relie à ses racines italiennes dans la région du Frioul où il est né. “J’y ai vécu jusqu’à l’âge

“Jean-Claude Killy ou Marielle Goitschel.”

de 4 ans. Ensuite, nous sommes venus en France avec mes parents. Mais j’ai encore de la famille là-bas. J’y suis retourné souvent.” Le petit Santé va grandir en Dordogne, à Neuvic-sur-L’Isle, dans une exploi- tation agricole où l’on cultivait le tabac et les vignes. Il va travailler un temps dans les usines Bata, avant de prendre la direction du nord de la France avec sa famille. “On a quitté le sud-ouest pour Lille.” Une étape importante dans la vie de cet Italien de souche qui va prendre la nationalité française en s’engageant dans l’armée en pleine

Santé Lénardon a récolté plus de 40 kg de raisin cette année.

à trois fois par semaine. Santé fait honneur à son prénom. Il entend bien garder la forme jusqu’aux prochaines vendanges. n T.C.

de la course à pied notamment. Aujourd’hui, c’est plus calme.” L’activité physique fait toujours partie de l’hy- giène de vie du retraité. Malgré son âge, il s’astreint à faire du sport deux