Journal C'est à Dire 256 - Septembre 2019

D O S S I E R

Pour mobiliser les logements vides à des fins sociales Morteau 826 logements privés sont vacants à Morteau et ses environs alors que la demande en logement social est forte (146 demandes l’an dernier). Le Département incite les propriétaires à louer leur bien en “social” avec un loyer moindre mais avec des bénéfices à la clé.

Un cas concret MORTEAU - T3 de 70 m 2 loyer de 630 euros par mois Avec une mise en location au prix du marché , le rendement est estimé à 4 353 euros par an Avec la convention “Plan loge- ment d’abord” , le même loyer est proposé à 509,60 euros Avantage pour le bailleur : sécu- risation et déduction fiscale Rendement estimé : 4 792 euros (5 748 euros la première année) soit un gain de 439 euros.

C hat échaudé craint l’eau froide. Trop de propriétaires victimes d’impayés, de dégrada- tions dans leurs appartements ou qui se sentent trop imposés, ont choisi de ne plus louer leur bien du tout. Dans notre zone frontalière dite tendue enmatière de logements, c’est un paradoxe puisque de nombreux locataires attendent de trouver la perle rare. Sur 2 226 logements loués dans le parc privé, 826 sont vacants (pour une période de 1 à 10 ans). Dans le Val de Morteau, il y a 6 demandes de logement social pour une attribution indique la direction départementale des finances publiques du Doubs. Bien trop peu. Conseillère départementale en charge du logement, Jacqueline Cuenot-Stalder a réuni les pro- priétaires bailleurs à Morteau en juin dernier pour les informer des bénéfices de louer via le “Plan Logement d’abord”. Une idée qui pourrait diminuer la tension en matière de logement social. L’élue, également conseil- lère municipale de Morteau, a bénéficié de l’appui de la direc- tion générale des finances publiques pour inviter les bail- leurs propriétaires de logements vacants. Un travail ciblé. Envi- ron 30 personnes avaient répondu à l’appel de cette réu- nion. “On connaît tous des gens dans notre entourage qui ont des difficultés à se loger ici car ils gagnent le S.M.I.C Combien P ropriétaire bailleur depuis 1991, ce Mortuacien qui a souhaité rester anonyme explique pourquoi il loue ses appartements environ 20 % moins cher que les prix pratiqués. Cela part d’une philosophie : “Ce n’est pas parce que vous êtes au S.M.I.C. que vous allez moins bien payer votre loyer. C’est par- fois même le contraire. Trop de personnes pensent que faire du logement social, c’est louer à des cas sociaux ! C’est faux. Il faut casser cette idée !” Pourquoi a-t-il décidé de louer 20 %moins cher ses logements (en bon état et pour la plupart rénovés) à des personnes dont le revenu ne dépasse pas un cer-

de jeunes nous disent qu’ils ne peuvent pas se loger àMorteau ? Combien d’entreprises disent qu’elles ont des difficultés à recru- ter ? On a ciblé 300 logements vacants à Morteau. L’idée est de remettre ces logements à court, moyen et long terme en location, tout en sécurisant la location et en permettant aux familles à revenus modestes de trouver des logements abordables. C’est aussi un geste solidaire” précise jac- queline Cuenot-Stalder. Ce dis- positif s’appuie sur le mandat de gestion confié à un opérateur dédié et agréé par l’État (Soliha, Agences Immobilières Sociales duDoubs), des avantages fiscaux pour les bailleurs, ainsi qu’une garantie d’accompagnement. C’est assez nouveau. Le Doubs (uniquement pour la zone dite B2) bénéficie de ce dispositif comme 23 autres départements français. Le propriétaire s’engage à louer son bien 20 % moins cher à des personnes en précarité financière et sociale. Cela peut concerner une mère de famille seule, un retraité, un jeune, un chômeur… Quel bénéfice pour le proprié- taire ? “Une gestion locative assu- rée par un professionnel (dont les bureaux sont à Pontarlier), des charges déductibles des reve- nus fonciers comme les frais d’ad- ministration, les travaux d’en- tretien, les provisions pour charges de copropriété…Le pro- priétaire peut aussi déduire 85% (en zone B2) sur ses revenus fon- ciers pour les logements conven- tain seuil ? “Lorsque j’ai démarré dans l’immobilier, je n’avais pas beaucoup d’argent : il fallait donc que les loyers tombent. Avec le logement social, je n’ai pas de vacance” explique-t-il. L’autre argument est évidemment fiscal : “Je peux avoir une déduction fis- cale de 85 %, ce qui me fait éga- lement diminuer ma C.S.G., pour- suit-il. Enfin, des garanties sont apportées avec une couverture “impayés de loyer” ou encore une assurance dégradation dans la limite de deux loyers.” Depuis 2017, le propriétaire a choisi de faire confiance à Soliha : “Je voulais me débarrasser de l’administratif, de l’état des lieux…” Il a eu un seul mois de

Le Département a invité les propriétaires bailleurs de logements vacants à Morteau pour les convaincre de relouer à prix “modéré” moyennant des avantages.

tionnés. Quid des impayés ? Visale (dispositif gratuit d’Action logements services) garantit les impayés de loyer. Une assurance complémentaire (1,5 % dumon- tant du loyer) est possible pour prévenir des risques de dégra- dation.” S’il ne va pas combler le retard en matière de logement social dans leHaut-Doubs, ce dispositif peut apporter une bouffée d’air dans un marché locatif tendu devenu inaccessible pour les plus modestes. n E.Ch.

Des prix de loyers rédhibitoires sur la bande frontalière Emploi-logement Le groupe Action Logement accompagne les salariés dans leur mobilité professionnelle en proposant des services et des aides financières qui facilitent l’accès au logement et donc à l’emploi. Retour d’expérience.

“L a mobilité profes- sionnelle sur le Haut-Doubs que ce soit sur Pontar- lier ouMorteau, c’est compliqué” en convient Catherine Valnet, responsable de l’agence Action Logement de Besançon.Action Logement, piloté par les orga- nisations patronales et syndi- cales de salariés, gère paritai- rement la Participation des Employeurs à l’Effort de salariés dans leur mobilité rési- dentielle et professionnelle en leur proposant des services et des aides.ÀPontarlier par exem- ple, nous intervenons depuis très longtemps au service de l’entre- prise Schrader quand elle cherche des solutions de loge- ment pour ses nouveaux salariés qui viennent d’autres régions.” L’autre champ d’action priori- taire d’Action Logement concerne la construction et le financement de logements sociaux et intermédiaires dans Construction, versée par les entreprises de plus de 200 salariés pour soutenir deux missions principales. “On accompagne les

les zones tendues. En matière de politique de logement, on parle de zone tendue pour carac- tériser le déséquilibre entre l’of- fre et la demande dans les grandes villes. “On ne peut pas considérer que ce soit le cas sur le Haut-Doubs où il existe quand même des logements vacants. Ici, la tension est plutôt liée au montant des loyers ou à la pré- férence frontalière comme c’était le cas à une certaine époque sur aides à la mobilité profession- nelle, il faut donc être salarié, recruté ou muté, d’une entre- prise du secteur privé non agri- cole de 10 salariés et plus. Il peut bénéficier de l’aide “Mobili- Pass®”, une subvention lui per- mettant de financer les frais liés à la recherche d’un logement sous réserve de respecter une distance de 70 km entre l’an- cienne et la nouvelle résidence. Morteau où les proprié- taires préféraient louer à des frontaliers plutôt qu’à ceux qui travail- laient en France.” Pour prétendre des

“Il peut solliciter lui-même un professionnel de lamobilité tout comme on peut lui proposer les services de notre filiale de relo- cation, peu importe. On verse la subvention dès qu’une solution est trouvée.” Le salarié peut aussi bénéficier d’autres aides : prêt de l’aide “Mobili-Pass®” pour financer les dépenses connexes au chan- gement de logement, l’avance loca-Pass®, qui permet de cou- vrir un dépôt de garantie demandé par un bailleur ou encore Visale garantie de loyer gratuite ouverte à tous les jeunes de moins de 30 ans et aux salariés du secteur privé non agricole en C.D.D. ou C.D.I. avec période d’essai, intérim, contrats aidés notamment. “Tous ces dispositifs sont encore méconnus des entreprises. Dans certains secteurs où l’accès au logement se complique comme sur Valdahon, on a engagé un travail pour inciter les proprié- taires à entreprendre des tra- vaux de rénovations dans des logements inoccupés.” n

“Quand mon locataire ne paie pas, j’appelle l’assistante sociale, pas l’huissier” Ce propriétaire bailleur mortuacien loue 20 %moins cher ses 11 appar- tements à Morteau en logement dit “conventionné”.

loyer impayé depuis toutes les années où il loue ce bien ! “ C’est un peu ma faute, j’aurais dû réa- gir plus vite. Lorsqu’une per- sonne au S.M.I.C. a du mal à payer, les retards s’accumulent et elle ne peut plus du tout payer. Je préfère appeler l’assistante sociale pour qu’elle trouve une solution plutôt que l’huissier… Car si une personne n’a déjà pas beaucoup d’argent, on ne va pas lui en reprendre plus avec un huissier !” Au final, les 20 % de rabais n’ont pas d’impact sur son rendement locatif. Au contraire, il semble gagnant à louer moins cher au vu des aides et des bénéfices fiscaux. n

70 km entre l’ancienne et la nouvelle résidence.

Action Logement : 03 81 21 27 90 www.actionlogement.fr

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