Journal C'est à Dire 195 - Janvier 2014

É C O N O M I E

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Horlogerie Le nouvel envol des montres Dodane Le Grand Besançon compte sur son territoire une des plus anciennes maisons horlogères françaises, discrètement installée à Châtillon-le-Duc. Douze ans après sa renaissance, sa stratégie marketing ultra-ciblée s’avère payante. Née au fond de la vallée du Doubs, l’entreprise Dodane a aussi fait les belles heures de l’horlogerie mortuacienne.

D iscret comme un hor- loger du Haut-Doubs. La famille Dodane cul- tive habilement un positionnement aux antipodes des énormes moyens marketing déployés par les grandesmarques horlogères suisses. Il faut d’abord s’armer d’un bon sens de l’orientation quand on souhaite visiter le siège de l’entreprise, nichée dans la verdure de Châ- tillon-le-Duc. Pour beaucoup de Bisontins, Dodane reste ancrée dans lesmémoires comme une des plus emblématiquesmanufactures horlogères locales, avec des locaux à l’architecture si caractéristique

le long de l’avenue deMontrapon. Si l’activité et les emplois de jadis ont disparu en 1995 suite à un contexte international mouve- menté qui a fait chuter l’export, la marque Dodane existe à nou- veau bel et bien, 155 ans après sa création au fond de la vallée du Doubs franco-suisse par Alphon- se Dodane, l’aïeul. Avec Cédric Dodane, c’est la cinquième géné- ration qui est en train de redon- ner ses lettres de noblesse à la marque depuis sa renaissance en 2001. Fin novembre, l’entreprise Doda- ne a présenté officiellement son nouveau modèle, la Type 23 en

P.V.D. noir en version civile, pro- posée au public à partir de 2 770 euros. Ce nouveau modè- le sorti des ateliers de Châtillon où on travaille en famille, est une déclinaison d’un modèle devenu presque légendaire des- tiné à l’aéronautique. Avec cet- te discipline, on touche au cœur même du métier historique de Dodane. L’entreprise a développé pour l’Armée de l’air et pour les pilotes des chronographes de bord qui font toujours référen- ce aujourd’hui. Mis au point grâce à une ven- te en souscription auprès de membres de l’Armée de l’air fran- çaise avec 600 exemplaires ven- dus il y a deux ans en version mécanique et 150 en version quartz, le dernier modèle Type 23 vient donc d’être décliné en version civile. “Notre idée est de démocratiser la montre de luxe, en évitant de tomber dans l’élitisme mais en s’adressant à des passionnés” résume Cédric Dodane, le gérant à l’origine de la renaissance de la marque aux côtés de son père Laurent. C’est donc en 2001 que le père et le fils prennent le pari de pro- longer l’histoire déjà plus que centenaire de la marque Doda- ne. “J’avais régulièrement des coups de fil de personnes qui

À droite, Cédric Dodane, le gérant avec à ses côtés son frère Florian et son épouse Élodie. Une affaire de famille.

le frère et Élodie, l’épouse de Cédric, écrit une nouvelle page de sa longue histoire. Ce que n’avaient peut-être pas mesuré les dirigeants, c’est que mal- gré la généralisation de l’électronique dans les instru- ments de bord d’un avion, la pré- sence d’un chronographe dans l’appareil restait indispensable

Avec un réseau de distribution bien ciblé en France et une stra- tégie marketing axée en gran- de partie sur Internet et sur les aéro-clubs français afin de tou- cher directement les pilotes et les passionnés d’aviation. “On ne voulait pas être dépendant des circuits de distribution clas- siques” justifie Cédric Dodane. En opération de sponsoring, Dodane équipe par exemple les pilotes de la patrouille acroba- tique “Cartouche doré”. Même si la montre aux parti- culiers a pris le pas sur les chro- nographes d’aviation, bon sang ne saurait mentir. L’entreprise Dodane est sur le point de confir- mer un nouveau partenariat avec Air France à l’occasion des 80 ans de la compagnie aérien- ne en 2014. J.-F.H.

nous demandaient si on comp- tait un jour ressortir un de nos modèles qui fait encore référen- ce dans le monde de l’aéronautique, la Type 21. Cet équipement de bord équipait les Mirage 2000, les Rafale, les héli- coptères de l’Armée. Il était réfé- rencé par l’O.T.A.N.” se souvient Laurent Dodane qui a vécu le

douloureux épisode de la liquidation en 1995. “Je faisais mes études en 2001. Mon père m’a dit : “Je vais t’aider à monter ta boîte.” Pas- sionné par l’horlogerie

aux yeux des pilotes. Une fois la Type 21 relancée et après un redémarrage forcément progressif, l’entreprise Dodane atteint à nou- veau une belle vitesse

“L’activité est en augmentation de 25 % par an.”

de croisière. “L’activité est en augmentation de 25 % par an” se félicite le gérant. Les chronographes équipant l’aéronautique représentent aujourd’hui 20 % de l’activité de l’entreprise de Châtillon, le res- te étant le marché de la montre aux particuliers avec 500 à 600 pièces écoulées chaque année.

et ayant toujours baigné dedans, je me suis lancé” ajoute Cédric. Le savoir-faire était encore intact et une étude de marché plus tard, les Dodane père et fils étaient convaincus du bien-fon- dé de leur démarche. Douze ans plus tard, la petite entreprise familiale dans laquel- le travaille également Florian,

À Morteau, la manufacture Dodane était installée à l’entrée de la ville, à côté du temple.

www.dodane1857.fr

Horlogerie Hardex rend possible la montre en silicium Spécialiste de la conception

N ous sommes dans le domainede la très hau- te couture.Le tic-tac de ce garde-temps que l’on ne peut toucher qu’avec les yeux, produit à seulement trois exem- plaires, vaut plus d’1 million de francs suisses. Il est le fruit de la collaboration étroite d’une entre- prise installée àMarnay,à20 kilo- de pièces en céramique, la société Hardex (groupe I.M.I.) basée à Marnay a collaboré avec la manufacture gene- voise Roger Dubuis à l’élaboration de la premiè- re montre au monde habillée en silicium.

mètres de Besançon où la société Hardex a construit sonnouvel ate- lier en 2007, avec un grand hor- loger suisse, la maison Roger Dubuis,filialedugroupeRichemont depuis 2008. Pour cette dernière,

ce à cet habillage en silicium qui est encore deux fois plus léger que le titane” indique Frédéric Loosli, représentant de chez Roger Dubuis. Pour la société Hardex, le chal-

les techniciens de chez Hardex ont étudié,conçu, testé et produit les pièces qui composent l’habillage de la montre Excalibur quatuor. “Le mouvement de cette montre compo-

lenge était de taille. Il a fallu plusieurs mois de travail avant d’aboutir à la pièce par- faite. “Nous collaborons avec Roger Dubuis depuis quatre ans, pour-

“Cette réalisation est une

vitrine de nos savoir-faire.”

suit Christophe Morlot, le res- ponsable marketing et dévelop- pement du groupe I.M.I. Sur ce projet spécifique, nous tra- vaillons depuis juin 2012. Nous avons déjà mis six mois pour sor- tir un prototype sorti en jan-

sé de 590 pièces a la particula- rité de posséder quatre balan- ciers positionnés à 45° qui per- mettent de compenser les effets négatifs de la gravité sur la pré- cision. Malgré son calibre, cet- te montre est plutôt légère, grâ-

Hardex, une entité du groupe I.M.I. L a société Hardex est une entité du groupe I.M.I., pro- priétaire de plusieurs autres entreprises dans le Grand Besan- çon, notamment Cheval Frères et Laser Cheval. I.M.I. possè- de également une unité de pro- duction en Suisse, un site de fabrication de rubis au Portu- gal et une entité à lʼîle Mauri- ce. En 2012, le groupe I.M.I. a réalisé un chiffre dʼaffaires glo- bal de 43 millions dʼeuros. Lʼactivité 2013 sera en léger recul. “Nous suivons les fluctuations du marché horloger” note Antoi- ne Gérard. Le groupe I.M.I. emploie 500 personnes, dont environ 300 dans ces sites de la région bisontine.

Antoine Gérard, président du groupe I.M.I., en compagnie de Christophe Morlot, le responsable marketing et développement du groupe I.M.I.

un gage de crédibilité supplé- mentaire dans le monde de l’horlogerie pour lequel la filia- le du groupe I.M.I. réalise 65 % de son chiffre d’affaires. “Pour nous, cette réalisation est une vraie vitrine de nos savoir-faire, ajoute Antoine Gérard, le pré- sident du groupe I.M.I. Ce par- tenariat avec Roger Dubuis nous a permis de croiser des techniques qui si elles n’avaient pas été mises ensemble, n’auraient jamais abouti à ce résultat-là. Ce pro- duit nous a permis de pousser au bout cette stratégie de mêler nos savoir-faire.” La société Har- dex emploie une trentaine de salariés pour un chiffre d’affaires de 5,5 millions d’euros en 2012. Une activité multipliée par trois ans en six ans. J.-F.H.

vier 2013 pour le selon de la hau- te horlogerie de Genève. Et tou- te l’année 2013 a été consacrée à fabriquer les six composants de chacun des trois modèles fabri- qués. Le silicium a cette parti- cularité d’être très pur et léger mais particulièrement difficile à usiner sans risquer de faire des éclats. On a tiré la quintessen- ce de chaque technique dévelop- pée chez Hardex pour arriver à ce résultat-là qui frise la per- fection.” Le silicium, inédit pour un habillage de montre, est déjà utilisé dans l’horlogerie pour cer- tains composants, comme la céra- mique d’ailleurs. Il trouve éga- lement des applications dans les processeurs informatiques, le médical, l’électronique et le pho- tovoltaïque. Pour Hardex, cette première est

Cette montre Roger Dubuis vaut plus d’1 million de francs suisses.

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