Journal C'est à Dire 182 - Novembre 2012

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É C O N O M I E

Forêt Coup de blues chez les scieurs Étienne Renaud, le tout nouveau président du syndicat des résineux de Franche-Comté, revient sur les causes qui ont conduit les scieurs à boycotter la vente de Champagnole. Exaspération.

C’ est à dire : Comment expliquer la réaction des scieurs ? Étienne Renaud : On dénon- ce la politique des prix de retrait pratiquée par l’O.N.F. Quand un lot recueille une ou deux offres, il peut être compréhensible qu’il soit retiré de la vente. En revanche, quand il y a 5 à 7 offres, alors on a l’impression que l’O.N.F. fait de la rétention. En retirant beaucoup de lots, l’offre augmente pour les pro- chaines ventes et on risque un effondrement des cours. Càd : Les communes pro- priétaires des lots n’interviennent pas dans les prix de retrait ? E.R. : Lors d’une réunion récen- te, le directeur régional de l’O.N.F. a reconnu que la poli- tique des prix de retrait est lar- gement fixée par l’O.N.F. qui met en œuvre son rôle d’expertise. Nous les scieurs, on veut une O.N.F. forte avec des droits et des devoirs. Mais il y a parfois un mélange des genres. L’O.N.F. devrait rester une agence natio- nale et pas une officine com- merciale. Càd : Qu’en est-il des contrats d’approvisionnement ? E.R. : Ces contrats résultent d’une discussion annuelle. Les prix sont déterminés en fonc- tion des ventes publiques pré-

cédentes. On estime qu’ils devraient prendre d’autres fac- teurs en compte. Entre les prix de retrait et ces contrats, on est un peu victime de la double pei- ne. Ces dispositifs ne reflètent pas le prix du marché. Càd : On a l’impression que tout se joue sur les prix de la matière première ? production et de sciages aug- mentent. Le prix des produits sciés, notamment des connexes, s’effondre. Les rendements des scieries se maintiennent. Du coup, la matière première reste la seule variable d’ajustement. Beaucoup de scieries locales sont aujourd’hui dans le rouge. Càd : Est-ce que la taille rela- tivement modeste des outils de production entre en ligne de compte dans ces difficul- tés ? E.R. : Ce n’est pas un critère de rentabilité en scierie. Il y a d’ailleurs très peu de grosses unités de sciage en Franche- Comté. La taille de nos scieries me semble parfaitement adap- tée à la ressource locale. La forêt comtoise très hétérogène ne cor- respond plus aux attentes actuelles plutôt axées sur les E.R. : Effectivement. La rentabilité d’une scierie dépend de cinq critères. Les coûts de

petits bois. Conséquence : on doit aussi gérer des lots très hété- rogènes qu’il est nécessaire de trier à l’amont et en aval. C’est toujours difficile d’avoir une par- faite adéquation entre la res- source forestière et les besoins. En Franche-Comté, on a une scierie de montagne comme on a une agriculture de montagne. impossible de transposer les modèles allemands ou canadiens qui sont basés sur une ressource beaucoup plus homogène. Ils sont beaucoup mieux placés que nous par exemple sur le marché de la maison à ossature bois. Càd : Vous subissez aussi la conjoncture ? E.R. : Le marché franc-comtois de la construction n’est pas for- cément mauvais mais en Fran- ce, le niveau de permis de construire se situe à un niveau très bas. Le climat est très anxio- gène. On observe beaucoup de prudence et d’attentisme. On a très peu de visibilité et des carnets de commande très courts. Càd : Êtes-vous satisfait des modes de vente ? E.R. : Pour nous, c’est un peu le mythe de Sysiphe. On a le sen- Càd : Difficile de rivaliser avec les Allemands donc ? E.R. : C’est même

Pour Étienne Renaud, le nouveau président du syndicat des résineux, il est impératif de maintenir des unités de transformation sur place.

“Beaucoup de scieries locales sont dans le rouge.”

timent de ressasser toujours les mêmes attentes. À la tempête de 1999, l’O.N.F., les communes et les scieurs ont trouvé un accord qui avait révolutionné la façon de mettre les bois en ven- te. On avait inventé le systè- me d’unité de produit, c’est-à- dire la prévente. On a l’impression que la vente en bloc devient un système complète- ment dévoyé, très souvent sous- estimé. Càd : La position des scieurs à Champagnole peut sembler choquante ? E.R. : On regrette l’absence des responsables de l’O.N.F. et du sous-préfet dans ces ventes publiques. Le syndicat a été pris en grippe alors qu’il a joué plu- tôt un rôle modérateur. Les

scieurs prônaient déjà le boy- cott en juin. Ce signal d’alarme n’a pas du tout été perçu par l’administration et l’O.N.F. Il faut bien comprendre qu’on est dans une situation d’urgence. La disparition de certains scieurs pourrait aussi pénaliser les com- munes qui n’auraient plus d’unité de transformation à proximité. Càd : Qu’attendez-vous à court terme ? E.R. : J’espère que le message sur les prix de retrait sera enten- du. On nous a reproché d’être un syndicat sans président. On a pris nos responsabilités et j’ai accepté d’assumer la fonction. On attend maintenant que cha- cun prenne ses responsabilités. La prochaine vente de Levier, le

13 novembre, sera l’épreuve de vérité. Càd : Doit-on s’attendre à un remake de Champagnole ? E.R. : Je ne pense pas. On sou- haite que cette vente puisse se dérouler et que le marché puis- se s’exprimer sans rétention. Càd : Comment conforter l’avenir de la filière résineuse à moyen terme ? E.R. : On devra discuter une fois de plus sur l’évolution des modes de vente et tendre harmoniser la règle des trois tiers : un tiers vente en bloc, un tiers préven- te, un tiers en unité de pro- duits. Propos recueillis par F.C.

Montlebon Les jouets en bois ont toujours

une petite place dans la hotte

Pas forcément dans le top des cadeaux les plus tendan- ce de Noël 2012, les jouets en bois plaisent toujours par leur côté écolo, naturel, traditionnel. Cocorico.

te épreuve, c’est devenu le jouet emblé- matique de la maison Sauge. Sur le marché du jouet en bois, rien n’est jamais acquis. Surtout quand il faut lutter contre la concurrence asia- tique. La réactivité s’impose. La soli- darité peut aussi offrir des alterna- tives intéressantes. “On a été contraint d’arrêter la fabrication de petits camions en bois faute de pouvoir rivaliser avec les Chinois. Mais on a pu trouver une solution de remplacement en propo- sant des camions produits chez un Jurassien spécialisé dans ce domaine.” Sauge Artisans du bois a transposé son savoir-faire acquis dans la fabri- cation de tiroirs vers les jeux éduca- tifs, le matériel pédagogique et les objets décoratifs. Histoire de répondre budgets. Quand des grands-parents viennent chez nous pour trouver des cadeaux pour dix petits-enfants, on se doute que le budget sera plus ser- ré. À nous de nous adapter.” L’activité jouets et matériel pédagogique repré- sente aujourd’hui 60 % du chiffre d’affaires de Sauge Artisans du bois. La diversification se conjugue aussi au niveau de la clientèle. “On diffuse aussi en ligne sous la marque Bec et Croc des jouets pédagogiques et des au mieux à la demande, la bou- tique de Derrière-le-Mont com- prend un petit volant de pro- duits d’importation qui vient compléter l’offre maison. “On peut ainsi satisfaire tous les

À défaut de faire fortune, le fabricant français de jouets en bois, il en reste encore quelques-uns, peut encore tirer son épingle du jeu à condition d’être performant, compétitif et diver- sifié. Quelle que soit son origine, le jouet en bois est encore porteur de valeurs à la mode. Ce matériau éco- logique par excellence exprime le natu- rel, la solidité sans oublier son char- me rétro. Certains l’adoptent pour sa fabrication artisanale et la certi- tude d’investir dans un produit de proximité qui participe à la pro- motion du Made in France. La Franche-Comté n’est pas en reste. On y trouve encore quelques fabricants. “Pour s’en sortir, il faut être bon sur les prix, savoir se distinguer, se diversifier mais pas trop, trouver les bons créneaux de vente” , explique Olivier Sauge qui fabrique des jouets en bois au hameau de Derrière-le-Mont sur la commune de Montlebon. C’est d’ailleurs lui qui en arrivant aux commandes de l’entreprise familiale en 1992 a orienté l’activité vers le jouet. “On a mis en place notre propre gamme et on a surtout réac- tualisé le cheval de bois conçu par mon grand-père.” Sobre, d’une solidité à tou-

Le top des jouets 2012 C ette année, le phénomène sera high tech puisque les tablettes numériques pour enfants débarquent avec une large gamme de modèles et de prix. “On vend énor- mément de tablettes tactiles M.E.E.P. À la mi-novembre, sur 48 en stock, une trentaine est déjà réservée” , confir- me Lydia Journot du magasin Joué- club à Morteau. Le prix de la petite merveille, entre 140 et 160 euros, ne refroidit pas les ardeurs. Du côté des filles, les poupées Monster High semblent indétronables avec leur look monstrueusement fashion . Les tou- pies Beyblades surfent encore en haut des cadeaux préférés des garçons. Pour les jeux de plein air, Nerf devrait aussi rencontrer un grand succès. Les tendances sont toujours très liées aux sorties de films. On devrait voir de nombreux produits dérivés issus de Batman, Spiderman, Battleship, Aven- gers envahir les chambres de nos enfants.

“Chez nous, le bois sert de support ludique à de multiples jeux originaux à pratiquer à tout âge”, explique Olivier Sauge de l’entreprise Sauge Artisans du bois.

Porteur de valeurs à la mode.

classiques : bascule, jouets à traîner, chevaux de bois, quilles, jeux de construction, jeux d’imitation. Chacun apporte ensuite sa griffe esthétique, ses couleurs mais la base varie peu. Olivier Sauge joue la carte de la proxi- mité qui constitue toujours un argu- ment de confiance vis-à-vis des parti- culiers. Il se rassure aussi en voyant que le fossé des prix entre l’Asie et l’Europe tend à se rétrécir. Les avan- cées sociales en Chine, c’est tout béné- fice pour les jouets français.

jeux géants à destination des collec- tivités, ludothèques, centres de loi- sirs, hôpitaux, écoles… On propose même quelques modèles en location utilisés pour animer une fête fami- liale, un anniversaire.” Le fabricant confirme un engouement vis-à-vis des gros jeux qui favorise la pratique col- lective et intergénérationnelle. Peut- être en réaction à l’individualisme inhérent aux consoles de jeux. La tra- dition rime toujours avec jouets en bois. L’offre s’articule autour de grands

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