Journal C'est à Dire 176 - Avril 2012
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D O S S I E R
Témoignages Des Mortuaciens dans la guerre
G abriel Hatot a 21 ans quand en décembre 1960 il est envoyé en Algérie. Denis Roy, lui, partira quelques semaines plus tôt, en juillet 1960, âgé de 23 ans. Le premier sera envoyé à l’Est du pays, dans le Constantinois. Le second dans l’Ouarsenis, un massif montagneux du Centre- Ouest algérien. Sorti de l’école Gabriel Hatot et Denis Roy ont fait partie de cet- te génération de jeunes soldats que la France a envoyés de l’autre côté de la Méditerranée défendre “son” territoi- re. Ils se souviennent.
Denis Roy et Gabriel Hatot sont aujourd’hui septuagénaires. Pour ne pas oublier, ils ont accumulé les écrits et les photos de cette sale guerre.
Gabriel Hatot, jeune soldat de 21 ans, embarque à Marseille pour l’Algérie.
La réalité du terrain a vite dépassé leurs idées préconçues. “Nous devions être disponibles 24 heures sur 24 pour aller en opération. On n’opérait que sur renseignements. Les premiers tirs m’ont beaucoup marqué” note M. Hatot qui était maré- chal des logis. Avec ses hommes et leur matériel, “on a parcou- ru 37 000 km au total.” Pour
triste de notre histoire.” Gabriel Hatot a écrit un livre, sorti il y a deux ans, “pour que mes petits-enfants ne croient pas que leur grand-père a été un assas- sin.” Denis Roy accumule les notes et rassemble ses souve- nirs, pour lui, pour ses enfants surtout. Tous deux ont eu la chance de revenir indemnes et psychologiquement intacts, contrairement à ces centaines de soldats changés à jamais. Deux soldats Mortuaciens ont été tués au combat en terre afri- caine, Marcel Billod et Marcel Cantarutti. Deux de trop, par- mi les milliers de morts tombés dans cette guerre inutile qui a mis longtemps à dire son nom. J.-F.H.
mon peloton 80 % de harkis, ils connaissaient parfaitement le terrain.” À 22 ans, ils se sont vite rendu compte qu’ils étaient embarqués dans “une sale guer- re” comme le dit Gabriel Hatot. Mais, “on agissait dans l’ombre portée de nos braves anciens qui avaient défendu le territoire en 14-18 et en 39-45. Pour eux, on était des rigolos, il fallait bien
des officiers de Saumur avec un grade de sous-lieutenant, Denis Roy a été affecté à un commando de chasse. “Je commandais un peloton d’une trentaine d’hommes” se souvient Denis Roy. L’un comme l’autre vivaient au début dans l’illusion d’un “maintien de l’ordre”. “On ne nous montrait que des images de “patronage” avec des mili- taires qui distribuaient des bon- bons aux enfants. La réalité était bien sûr tout autre” commente M. Roy. “De toute manière, il n’y avait pas à discuter, on ne se posait pas de questions” ajoute Gabriel Hatot.
Denis Roy, pas le temps non plus de gamberger. “La pre- mière opération a eu lieu deux jours après mon arrivée. On pro- gressait sur une ligne de crête, j’ai entendu une rafale,
faire notre devoir” ajoute Denis Roy. Leur grande hantise alors : être embarqués dans une guerre sans fin. Denis Roy reste- ra 9 mois en Algérie, Gabriel Hatot y pas- sera 14 mois.
“Que mes petits-enfants ne croient pas que leur grand-père a été un assassin.”
Dans le peloton de Denis Roy, la plupart des soldats étaient harkis. Beaucoup ont été sacrifiés au sortir de la guerre par le F.L.N.
Aujourd’hui, ils disent avoir “tourné la page de cette période
vu un gars tomber d’un arbre. On avait la chance d’avoir dans
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