Journal C'est à Dire 171 - Novembre 2011

É C O N O M I E

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Un robot pour faciliter le travail des horlogers Spécialisée dans la conception de systèmes robotisés de micro-assemblage, Percipio Robotics S.A. a mis au point une technologie qui pourrait bien révolutionner le travail des horlogers. Zoom sur une jeune entrepri- se innovante de Besançon. Innovation

En bref…

Livre “La Franche-Comté de A à Z” : vie quotidienne, coutumes, métiers et savoirs. Cet ouvra- ge encyclopédique signé Michel Vernus, consacré à la Franche-Comté, unique en son genre, rassemble ce qui consti- tuait la vie des hommes dʼautrefois. Il met lʼaccent sur lʼorganisation du monde rural, sur les métiers, la vie au fil des jours (naissance, mariage, san- té, mort), la table et le goût, les médecines anciennes et nouvelles, les superstitions et croyances… Édition du Bel- védère, 608 pages, 35 euros. Pauvreté Le Secours Catholique a publié son rapport statistique annuel sur lʼévolution de la pauvreté en France. En 2010, le nombre de personnes aidées par le Secours Catholique augmen- te : 1,492 million de personnes rencontrées, soit + 2,3 % par rapport à 2009. Cette année, lʼétude analyse particulière- ment la précarité des jeunes de 18 à 25 ans, qui représen- tent clairement la classe dʼâge la plus pauvre de France, lais- sée en marge de la société. 30 % des jeunes accueillis par le Secours Catholique sont sans aucune ressource, 36 % en logement précaire, et + de 40 % sont au chômage.

D’ abord il y a le nom de l’entreprise, “Percipio Robotics”, qui intrigue. “Per- cipio signifie “saisir” en latin dans le sens d’attraper, de com- prendre et de recueillir. C’est un beau jeu de mot vis-à-vis de notre métier” répond David Hériban. À 31 ans, il est le jeune P.D.G. de cette start-up qui n’a pas fini de faire parler d’elle. La socié- té basée à Témis détient une l’accès à un monde de Lillipu- tiens qui devient praticable grâ- ce à des micro-pinces de la taille d’une phalange capables de prendre, de déplacer et d’assembler des objets de 10 microns, pour les plus petits (par comparaison un globule rouge mesure 5 microns), à quelques millimètres pour les plus gros. “La pince fabriquée à Besançon est aussi agile que deux doigts humains” explique David Hériban. Fixées à un technologie qui intéresse déjà un certain nombre de secteurs industriels de pointe manipulant des pièces minuscules. Perci- pio Robotics leur facilite

robot, ces micro-pinces forment un outil redoutable permettant d’agir vite et avec précision pour celui qui les manipule. Sur cette base, Percipio Robo- tics a mis au point un petit bijou de technologie de la taille d’un ordinateur portable. Il trouve- ra sa place sur l’établi des hor- logers qui assemblent avec habi- leté les mouvements de montres mécaniques un “micros” visé à l’œil et une paire de fines pinces le principe de la téléopération. Installé derrière son établi, l’opérateur pilote très simple- ment le robot avec un joystick. Des caméras lui permettent de visualiser sur un écran les micro- pièces qu’il manipule. Grâce à cet outil, on peut procéder par exemple à l’installation de pierres d’horlogerie dans les ancres (par- tie du mouvement)” poursuit le P.D.G. Avec ce robot, les limites de l’assemblage de mouvements à la main. La microma- nipulation “Made in Besançon” pourrait venir modifier cette pratique ancestrale du métier. “Nous avons travaillé sur

Dans le 13ème concours national Talents de la création d’entreprise, David Hériban (à droite) a reçu un prix de 8 000 euros à Paris. En 2008, il avait déjà reçu un Micron d’or à Micronora.

mécaniques à grande compli- cation pourraient être repous- sées. Mais Percipio Robotics n’a pas conçu cette machine pour qu’elle remplace l’horloger. Au contraire : “On garde l’homme là où il est intéressant. C’est lui qui est intelligent, mais on lui donne simplement de très bonnes mains.” Cela s’appelle la “cobotique”, quand l’homme et le robot se complètent. Le pro- totype sera opérationnel en février 2012. À partir de là, David Hériban pourra se déplacer sur les salons horlogers pour présenter cette technologie dont le prix de mar- ché, en fonction des options, devrait varier entre 50 000 et 100 000 euros. L’entrepreneur a déjà quelques contacts de manufactures suisses qui se disent intéressées par le concept. Le secteur du bio-médial, de

l’aérospatial, des fabricants de micro-systèmes sont aussi des cibles. Tous les espoirs sont donc per- mis pour cette jeune start-up qui doit beaucoup au laboratoi- re bisontin Femto-St dont l’ingénieur est issu. “Femto, c’est la plus grande équipe de recherche mondiale en terme de micro-manipulation” rappelle le chercheur qui a fait ses études à l’E.N.S.M.M. Il a quitté ce labo, internationalement reconnu, animé par l’ambition de valori- ser le fruit des recherches. “Ce qui m’attirait, c’était de sortir le prototype du laboratoire. Le pro- blème d’un chercheur est que, quand il trouve, tout s’arrête ou presque. Il me semble que nous n’exploitons pas suffisamment nos recherches. Personnellement, cela ne pouvait pas me satis- faire.”

Ambitieux, il s’est jeté dans le bain de l’entreprise mais a gar- dé des liens étroits avec le labo- ratoire Femto-St. D’ailleurs cinq chercheurs sont dans le capital de l’entreprise, dont Michaël Gauthier qui à un pied dans le labo et un dans la société. “Nous avons avec ce laboratoi- re une convention de transfert qui nous autorise à exploiter ses technologies. On utilise égale- ment ses salles de manipulation, son matériel.” Si demain les pers- pectives commerciales s’ouvraient pour la société, les robots seraient assemblés dans les locaux de Femto-St pour com- mencer. En attendant, Percipio Robotics, et ses trois salariés, vend sa matière grise. Le bureau d’études résout des problèmes de manipulation que lui sou- mettent des entreprises. T.C.

“De très bonnes mains.”

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