Journal C'est à Dire 165 - Avril 2011

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É C O N O M I E

Des entreprises piégées par la méthode Cortix Dans le Haut-Doubs comme un peu partout en France, plusieurs entrepreneurs se sont laissé prendre au jeu du prestataire bordelais qui leur a vendu un site Internet. Le résultat coûteux, n’est souvent pas à la hauteur des attentes. Internet

Un entrepre- neur des tra- vaux publics du Haut- Doubs a déci- dé de ne plus payer les 200 euros mensuels pour son site Internet. L’organisme de finance- ment l’a assi- gné en justice.

“F ranchement, je n’ai rien vu venir.” Ce jeune profes- sionnel du bâtiment ins- tallé dans le Haut-Doubs estime s’être fait “berner” par Cortix, le prestataire qui lui a vendu un site Internet à plusieurs milliers d’euros. Il se retrouve aujourd’hui à payer un loyer mensuel d’environ 150 euros pour un outil qu’il estime de piètre quali- té, réalisé sur la base du seul rendez- vous qu’il a eu avec le commercial de la société bordelaise détaché sur le Doubs. “En plus, c’est moi qui ai dû envoyer tous les éléments, y compris les photos pour qu’ils puissent faire mon site. Je n’ai pas vu un seul technicien” ajoute-t-il. Le résultat ne correspond pas exac- tement à l’idée qu’il se faisait d’une vitrine sur le web censée lui ramener des clients comme lui avait promis la personne qui l’a démarché. Déçu, amer, affirmant se heurter à un mur à chaque fois qu’il a tenté d’avoir des explica- tions de la part du prestataire ou d’obtenir des modifications, il s’est déci- dé de porter plainte. “Aujourd’hui, je ne veux plus payer pour ce site” lâche- t-il. Avocate à Besançon, Maître Sophie

Duhoux-Cardot a été saisie à trois reprises par des clients mécontents qui cherchent à se dégager de l’engrenage coûteux dans lequel ils ont mis le doigt. Après être entrée dans le détail de cha- cun de ces dossiers, elle a d’abord obser- vé que la méthode commerciale mise en œuvre par Cortix pour vendre des sites Internet était redoutable. “En général, un commercial se présente dans une petite structure, souvent récente, et propose au responsable de lui créer un site Internet. Son argumentaire est imparable” explique l’avocate. Le pro- cédé utilisé serait souvent le même. Par téléphone, un représentant de Cor- tix indique à son interlocuteur qu’il souhaite rencontrer des professionnels de son secteur d’activité sur la région (peintre en bâtiment par exemple) afin d’en sélectionner un pour développer un site pilote dont la création serait gratuite. Seul devrait rester à sa char- ge l’hébergement du site. L’offre est séduisante et son intérêt se confirme lors du rendez-vous avec le commercial au terme duquel l’entrepreneur embobiné se retrouve à signer plusieurs documents contrac- tuels sans savoir vraiment à quoi ils correspondent. Il y a notamment le bon

de commande, un contrat d’exploitation du site Internet, et plus surprenant encore “le procès-verbal de livraison du site” s’étonne Maître Duhoux-Car- dot. Dans le jargon commercial, on appelle cela la méthode du one shot ,

publics du Haut-Doubs. “J’ai suspen- du les versements mais la société de financement est en train de m’attaquer. Cortix m’a vendu un site à 4 000 euros à raison d’un loyer de 200 euros par mois. Mais avec les frais de retard, la société de financement me réclame aujourd’hui 12 000 euros !” s’insurge l’entrepreneur qui s’est rap- proché d’un avocat pour ten- ter de s’extirper de cet engre- nage. Il propose aujourd’hui de créer un collectif qui réuni- rait tous les clients qui pensent être victimes de ce prestataire. Contactée par nos soins, l’entreprise Cortix ne se défausse pas. Cotée en bourse, elle rappelle que sur un volu- me de 20 000 clients elle enregistre

environ 150 plaignants. Elle affirme aussi être attentive à ces réactions dont elle aurait tiré les leçons. “Les pro- blèmes rencontrés proviennent de com- merciaux qui ont voulu faire du zèle” explique-t-on chez Cortix où l’on assu- me pleinement la méthode du one shot . “C’est pour cette raison que nous avons intégré à nos contrats une procédure de rétractation de dix jours qui permet à un client de changer d’avis.” Cortix affirme que cette clause est une pra- tique réservée normalement à des par- ticuliers. “Cette indication est inscri- te dans le contrat depuis fin 2009. Néan- moins avant cette date, le délai était déjà en vigueur sans mention spéci- fique inscrite au contrat” . Il semblerait donc que des commerciaux aient omis de le préciser à leurs clients.

un rendez-vous, une affaire. Le paiement du site se fait sous la forme de loyers men- suels versés pour une durée déterminée à la société de financement Parfip, partenaire de Cortix, dont le client découvre le plus souvent

“Des commerciaux

qui font du zèle.”

l’existence au moment d’honorer ses premiers remboursements. C’est à cet organisme qu’il devra rendre des comptes s’il a l’intention de ne plus payer. C’est précisément ce qui arri- ve à un entrepreneur des travaux

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