Journal C'est à Dire 163 - Février 2011

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V A L D E M O R T E A U

Les conscrits perpétuent la tradition Plus de 120 ans de tradition de “bonhomme de Carnaval” à Morteau, et toujours le même enthou- siasme. Retour en images sur un siècle de folklore local. Photos collection Patrice Mazzotti. Morteau

E n 1974, les conscrits étaient en panne d’idée. Quel person- nage choisir pour leur bonhomme de Carnaval ? Un célèbre Mor- tuacien de l’époque, Marcel Bideaux, leur suggère : “Vous n’avez qu’à me faire !” Chiche : les joyeux drilles de 20 ans feront leur bonhomme à l’effigie du Mortuacien dont la mascot- te, comme les autres, partit en fumée le soir de la fête. Cette anecdote parmi tant d’autres illustre l’enracinement profond de la journée de Car- naval dans l’histoire de Mor- teau. La tradition remonte à la leur retour, ils se retrouvaient pour boire un coup ensemble, mais faute de moyens, ils se sont mis à faire la quête au moyen de cagnottes. Quelques années plus tard, l’un d’eux a eu l’idée originale de proposer de confec- tionner un bonhomme que les conscrits de l’année promène- raient dans les rues de Morteau en remerciement de la géné- rosité des gens. La réalisation d’un bonhomme de Carnaval remonterait à l’année 1907. Depuis, tous les ans, le rite est immuable : tiré par des ani- maux, aujourd’hui par un trac- teur, le bonhomme parcourt toutes les rues de la ville, accom- pagné des turbulents conscrits de l’année, au bruit des pétards et des cagnottes. Il finit imman- quablement brûlé en bas de vil- le. Mais la tradition n’a pas tou- fin du XX ème siècle. À l’époque, les jeunes conscrits se rendaient au conseil de révision pour effectuer leur service militaire. À

jours eu que du bon, surtout pour les personnages de Mor- teau qui étaient caricaturés. Car, comme l’explique Patrice Mazzotti, un des spécialistes locaux de la question, “au départ, ce n’était pas des personnages de fiction qui servaient de sup- port au bonhomme, mais des personnes bien réelles dont on détournait un peu le nom.” Ain- si en 1922 le notaire de Mor- teau Petitmangin avait-il été “croqué” par les conscrits. En 1925, c’est au tour du père Hatot, surnommé pour l’occasion “Râteau” d’être caricaturé en bonhomme de Carnaval. En 1927, c’est Fernand Faivre qui colaterie Klaus, qui sera érigée en bonhomme. En 1933, le Mor- tuacienWetzel deviendra le bon- homme “Zetwel”, etc. À partir des années trente, les personnages locaux ont alterné avec les personnages historiques en lien avec l’actualité du moment : Stavisky en 1934, Maurice Chevalier en 1935, Franco en 1936 et même Hitler en 1939…Après-guerre, ces per- sonnages historiques ont lais- sé place à des personnages de fiction : Mickey en 1950, Popeye en 1952… Jusqu’aux plus récents et ceux dont les quarantenaires se sou- viennent encore, comme Nestor le pingouin en 1976, Casimir en 1977, Snoopy en 1982, Lucky Luke en 1985, Picsou en 1992 ou encore Droopy en 2000, jus- qu’au plus récent, Pikatchu, le 19 février dernier. Caliméro passera à la mouli- nette sous le nom de “Fernand II”. En 1928, c’est la “Trot- tinette”, la contre- maîtresse de la cho-

a été le premier à brûler debout en 1979. Depuis 1958, un per- sonnage central de Morteau a contribué à la notoriété du bon- homme : Modeste Martegani. Sans discontinuer de 1966 à 2001, c’est lui qui a aidé les jeunes conscrits à confection- ner leur bonhomme. Les conscrits, reconnaissants, lui consacreront le bonhomme de Carnaval en 1978. En 1974, un incident a émaillé le traditionnel cortège dans les rues de Morteau : un pétard a mis le feu aux cheveux de la mascotte, qui était Marcel Bideaux. Le bonhomme a brû- lé au beau milieu de la rue Pas- teur… J.-F.H.

Franco en 1936 et même Hitler en 1939…

Les conscrits de Morteau en 1918.

Les conscrits de Morteau en 1920.

Les conscrits en 1923.

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