Journal C'est à Dire 157 - Août 2010

D O S S I E R

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50 ANS DE FAITS-DIVERS DANS LE HAUT-DOUBS L’actualité se nourrit au jour le jour de faits-divers qui remplissent les pages des journaux quotidiens. Sou- vent dramatiques, parfois cocasses, ils contribuent aussi à construire l’histoire d’un territoire. Dans ce numéro de rentrée, le journal C’est à dire a choisi de se remémorer quelques-uns des faits-divers les plus marquants de ces cinq dernières décennies. Affaires judiciaires, catastrophes naturelles, accidents dramatiques, incendies spectaculaires… Ces 50 dernières années ont été jalonnées d’événements marquants inscrits à jamais dans la mémoire collective. Pour se souvenir, C’est à dire vous propose de rouvrir les pages de cette mémoire locale. Évidemment, l’idée n’est pas de raviver des souvenirs dou- loureux à ceux qui les ont vécus de près ou de loin. Il s’agit juste de faire revivre à tous quelques ins- tantanés qui ont contribué à marquer l’histoire du Haut-Doubs.

Villers-le-Lac 14 août 1960, “La Joliette” sombre dans les bassins du Doubs Le bateau qui transportait à son bord une cinquantaine de personnes a coulé en revenant du Saut du Doubs après s’être empalé sur un pieu de jalonnement de la voie de navigation submergé par les eaux. Bilan : sept morts.

RAPPEL DES FAITS : Le naufrage de “La Joliette” dans les bassins du Doubs est un des faits-divers les plus tragiques des dernières décennies. C’était le 14 août 1960 vers 10 h 30. Le bateau qui appartenait à une des cinq compagnies qui à l’époque faisaient déjà les navettes entre Villers-le-Lac et le Saut du Doubs, coule sur le chemin du retour avec son bord une cinquantaine de pas- sagers. Sept personnes périrent dans l’accident dont trois de la même famille : la grand-mère, la mère et sa fille.Toutes se noyè- rent dans une eau à 11 °C. Ce jour-là, tous les passagers de “La Joliette” faisaient partie du même groupe des sapeurs-pom- piers de Saint-Sauveur. Ils étaient partis le matin même de TÉMOIGNAGE Jean Hirchy et Paul Gindraux

Haute-Saône pour venir passer une journée familiale à Villers- le-Lac afin de profiter du cadre des bassins du Doubs. Une bala- de qui a tourné au cauchemar. Les circonstances du drame ont été rapidement expliquées. En prenant son virage, le pilote du bateau, pourtant expérimenté, n’a pas pu éviter “un des pieux de jalonnement constitué par des rails dressés” rapporte la pres- se à l’époque. Le pieu avait été immergé par la récente montée des eaux. Il eut l’effet d’un véri- table éperon, perforant la coque en bois de “La Joliette” qui s’est rapidement remplie d’eau. Le pilote aurait tenté une manœuvre pour rejoindre la rive au lieu-dit “Sous les Bassots”. “Ces cinquante mètres d’ultime navigation eurent un caractère

fantastique. À chaque seconde le canot s’enfonçait. Il virait d’un bord et de l’autre” écrit le jour- naliste du quotidien régional. “Montez sur les bancs. Sautez à l’avant comme moi” aurait ordonné le pilote du bateau aux occupants qui avaient “de l’eau jusqu’au ventre. Ceux qui enten- dirent cet ordre purent gagner la rive même s’ils ne savaient pas nager. Mais les autres que l’affolement conduisit à se jeter du bateau par l’arrière se sont fait piéger. Les blessés furent dirigés vers l’hôpital de Morteau et au Sana- torium. Pour les victimes du dra- me, on prépara une chapelle ardente àVillers-le-Lac. Le Haut- Doubs se souvient encore de ce fait divers qui défraya la chro- nique.

Le secouriste mortuacien Paul Gin- draux faisait partie des plongeurs.

pour ranimer deux personnes. “Nous avons cher- ché des corps” se souvient Jean Hirchy. Une opé- ration menée avec l’appui des hommes-grenouilles des centres de secours de Pontarlier et Morteau. Le Mortuacien Paul Gindraux faisait partie de l’équipe de plongeurs. “Je me rappelle avoir par- couru toute la coque. Je n’ai rien trouvé. Les cinq corps furent découverts - dans l’après-midi - un peu plus bas. Ils avaient été emmenés par le courant” dit-il. Jean Hirchy a passé 34 ans chez les pompiers. Il termina sa carrière en 1993 en tant que chef du Corps Districal. Selon lui, la tragédie de “La Joliette” a rapidement permis de faire évo- luer les secours locaux. “Cet événement a fait bouger les choses. Nous avons commencé à pas- ser tous les brevets de secourisme. À la suite de cela, je suis allé trouver tous les entrepreneurs de Villers-le-Lac afin d’obtenir de l’aide pour que notre centre puisse acquérir un véhicule de secours d’assistance aux victimes. J’ai récupéré 8 000 F. La commune a complété cette somme pour que l’on puisse acheter le véhicule.”

parmi les secouristes J ean Hirchy n’oubliera jamais ce dimanche 14 août 1960. Âgé aujourd’hui de 77 ans, il faisait à l’époque partie des secours dépêchés sur le naufrage de “La Joliette”. Il était jeune sapeur-pompier à Villers-le-Lac. “Le corps des sapeurs-pompiers n’était pas organisé comme il l’est aujourd’hui. Nous n’avions pas de moyens. Je me souviens que nous avions demandé le ren- fort des secouristes suisses.” Les naufragés ont été pris en charge. Malgré les soins apportés, les secours sont arrivés trop tard

Après le naufrage, seul le toit de “La Joliette” affleurait la surface de l’eau.

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