Journal C'est à Dire 153 - Mars 2010

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Horlogerie “Les années bling-bling sont derrière nous”

Au moment où le grand rendez-vous horloger de Bâle referme ses portes, le délégué général de la chambre française de l’horlogerie fait le point sur l’état de santé de l’horlogerie française.

Càd : Que représente aujourd’hui l’horlogerie française ? P.B. : L’horlogerie en France emploie 4 500 personnes, réparties dans envi- ron 120 entreprises. Dans les plus fortes années, à la fin des années soixante- dix, l’effectif de l’horlogerie française avait culminé à 15 000 salariés. En Suis- se, les chiffres ne sont pas comparables. L’horlogerie était quasiment une indus- trie “d’État”, elle employait 100 000 per- sonnes, puis est retombée à 25 000 dans les pires années, avant de remonter à 40 000, et de perdre à nouveau 5 000 personnes ces derniers mois. Càd : Que pensez-vous de l’initiative ambitieuse de relancer la fabri- P.B. : Quand il y a un bon produit et que la volonté est là, il y a sans doute une niche à occuper. Car quand une entreprise domine le marché du mou- vement, il y a toujours des gens qui essaient de le contester, c’est sain. En Franche-Comté, on a peut-être trop occulté l’histoire horlogère, on a des marques, un patrimoine fantastique et un savoir-faire. Ce qui a manqué et qui manque encore, c’est une question de compétitivité par rapport à d’autres pays et notamment la Suisse. Là, c’est une question de réglementation natio- nale. Préserver l’industrie en France doit devenir une priorité. La France a toujours une belle carte à jouer et une vraie histoire à raconter. L’horlogerie française passe à l’heure dynamique. Propos recueillis par J.-F.H. cation de mouvements dans le Haut-Doubs ?

C’ est à dire : Les statis- tiques de l’horlogerie pour 2009 sont en recul. Quel est le moral de l’horlogerie française ? Patrice Besnard : C’est vrai que quand on regarde les statistiques, les expor- tations de montres françaises ont subi un recul en 2009. Il faut cependant rela- tiviser car la baisse est en proportion deux fois moindre que celle subie par l’horlogerie suisse. Sur le marché fran- çais, les ventes se sont aussi tassées, de 4 %, mais dans un contexte de crise généralisée, cette baise n’est pas catastro- phique. Nous sommes dans un climat plus serein qu’il y a un an et les marques françaises ont sorti des nouveaux modèles et de nouvelles collections, il y a une vraie dynamique. Càd : Le créneau de l’horlogerie française est-il définitivement le moyen de gamme ? P.B. : À quelques exceptions près, oui. Un certain nombre d’entreprises fran- çaises ont développé des griffes sur des créneaux entre 100 et 500 euros. D’autres horlogers traditionnels, à l’image d’un Herbelin par exemple, pro-

voquent un regain d’intérêt chez les clients en ce moment. Je pense que dans le monde horloger, les années bling- bling sont derrière nous. Cette orien- tation a été fatale à certaines marques suisses, comme Franck Muller par exemple. Càd : L’horlogerie française retrou- verait donc des couleurs ? P.B. : Je le pense. Des entreprises com- me Cobra repartent, Ambre relance

Yéma, Lip relance Régnier, de nouveaux espoirs renaissent du côté des marques. La situation est en revanche plus tendue chez les fabricants de composants qui travaillent beaucoup avec la Suisse. Ceci dit, certains acteurs de l’horlogerie suisse s’attendent

“La France a toujours une belle carte à jouer.”

à une augmentation en 2010 grâce aux exportations dans des pays comme la Chine ou l’Inde qui poussent très fort. Càd : L’horlogerie suisse a donc plus souffert que l’horlogerie françai- se l’an dernier ? P.B. : Un des grands problèmes des Suisses a été l’effondrement du mar- ché américain qui a fait perdre 35 % à l’horlogerie suisse. La France a très peu baissé en proportion.

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