Journal C'est à Dire 152 - Février 2010

É C O N O M I E

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Banque

Bertrand Corbeau perché

au sommet de la banque verte

Le directeur général du Crédit Agricole de Franche-Com- té a été nommé à la tête de la Fédération Nationale du Crédit Agricole. Un échelon de plus dans la carrière de ce brillant banquier de 50 ans. Avant de quitter définitivement la Franche-Comté le 1 er mars, il fait le point sur ses nouvelles fonctions et livre son analyse de la situa- tion franc-comtoise.

Ensuite, il s’agira de conduire la réflexion stratégique des caisses, c’est-à-dire mettre les 39 caisses régionales d’accord sur tous les points qui les concer- nent. Enfin, la fédération natio- nale est là pour apporter un cer- tain nombre de services aux caisses régionales dans le domai- ne de la finance, des ressources humaines et du fiscal. Ma mis- sion est donc de faire fonction- ner tout cela et également de piloter une réflexion sur les pers- pectives du Crédit Agricole à moyen et long terme. Càd : Cette nomination à la tête du Crédit Agricole natio- nal est sans doute pour vous la reconnaissance du travail que vous avez accompli en Franche-Comté. Dans quel état laissez-vous la caisse régionale ? B.C. : Dans une situation très solide. Le résultat net de l’année 2009 dépassera les 45 millions d’euros, malgré les effets de la crise qui nous a fait passer plus de 60 millions d’euros de provi- sions pour risque. En 2008, le résultat net était d’environ 60mil- lions d’euros. La baisse est donc très limitée en 2009 malgré les difficultés de la crise. Càd : Le siège d’autres grandes banques a quitté Besançon. La présence régio- nale du Crédit Agricole est- elle menacée ? B.C. : Le Crédit Agricole reste la seule banque totalement franc- comtoise avec un siège à Besan-

çon. Il n’y a aucun risque de voir cette situation changer. Càd : La santé de nombreuses entreprises locales a été ébranlée par la crise et cer- taines d’entre elles reprochent aux banques leur frilosité. Que leur répondez-vous ? B.C. : Le Crédit Agricole s’est toujours attaché à accompagner les entreprises, même aux pires moments de la crise. J’estime qu’on a joué le jeu. En Franche- Comté l’an dernier, 80 % des financements demandés par les entreprises ont été accordés. Tout confondu, 100 000 prêts ont été accordés l’an dernier par les banques en Franche-Comté. Par ailleurs, le médiateur du cré- dit a été sollicité par 500 entre- prises en Franche-Comté et deux fois sur trois, pour ces 500 cas les plus difficiles, on a trouvé une solution. Càd : Les banques font-elles néanmoins leur mea culpa après cette grave crise finan- cière ? B.C. : Les banques ont autant de responsabilités que les prin- cipaux gouvernements et les autorités de tutelle, États ou organismes de régulation. Ceci dit, que ce soit au niveau des États que des banques, cette cri- se va et doit entraîner des chan- gements structurels. On a aujour- d’hui besoin de sécuriser le sys- tème mais en même temps on a besoin de ne pas étouffer le début de reprise. On va continuer à financer l’économie sans res-

C’ est à dire : Vous avez passé trois ans à la tête des 1 500 collabora- teurs du Crédit Agricole de Franche-Comté. En quoi consisteront vos nouvelles fonctions nationales ?

Bertrand Corbeau : La fédé- ration nationale du Crédit agri- cole regroupe tous les fonds propres des caisses régionales, qui sont ensuite investis dans Crédit Agricole S.A. et dans notre développement international. C’est d’abord un rôle financier.

Bertrand Corbeau sera remplacé au 1 er mars prochain par une femme, actuelle directrice en région Centre. Une pre- mière pour le Crédit Agricole de Franche-Comté.

retour à la situation d’avant la crise ou alors doit-on chan- ger le système ? B.C. : On doit entrer dans une nouvelle époque. Ce n’est pas qu’une crise conjoncturelle, cet- te crise est aussi structurelle, elle est liée au développement des échanges sur le plan mon- dial. Ce changement est un état de fait auquel il faut s’adapter. En Franche-Comté, j’ai trouvé un tissu entrepreneurial de gran- de qualité. Il y a aujourd’hui pour nous un impératif d’accompagnement de ce mou- vement de régénérescence des entreprises. À l’avenir, je pen- se qu’il est nécessaire d’instaurer une union sacrée entre les col- lectivités locales, les organisa- tions professionnelles, l’État et les banques. Je pense que dans cette région, on a su se serrer les coudes pour éviter une catas- trophe.

triction, mais en ne faisant pas n’importe quoi. On peut finan- cer l’économie locale, on en a les moyens et les possibilités. Mais il faut aussi que les chefs d’entreprise veillent au niveau de leur performance économique, à la qualité de la gestion et contri- buent à une bonne relation avec leurs banques. C’est comme dans un couple : quand ça va mal, on a tendance à vouloir désigner un seul responsable. Càd : Confirmez-vous le début de reprise en Franche-Com- té ? B.C. : Il y a un début de repri- se, mais il est fragile. Certains secteurs innovants n’ont pas vraiment souffert, d’autres entrent seulement aujourd’hui dans le dur. On est clairement sur un ciel qui se dégage mais il y a encore des zones de tur- bulences.

Bertrand Corbeau en dates Originaire de Mayenne, Bertrand Corbeau a gravi en vingt-cinq ans tous les échelons de la banque verte. - 1982 : un D.U.T. de gestion en poche, il démarre comme gui- chetier dans sa région natale des Pays de Loire. - 2002 : après avoir occupé les postes les plus divers au sein du Crédit Agricole, il est nommé directeur commercial du Crédit Agricole de lʼAnjou et du Maine. Avant dʼêtre nommé une pre- mière fois à Besançon en tant que directeur général adjoint de la caisse régionale de Franche-Comté, dirigée alors par Pier- re Derajinski. Il passera trois ans à Besançon avant de rega- gner la région de Chartres où il devient lʼadjoint du directeur de la caisse Val de France. Dernier échelon en date : Bertrand Cor- beau remplace Pierre Derajinski à la direction générale de la caisse Franche-Comté en février 2007. - Janvier 2010 : il est nommé à 50 ans, directeur général de la Fédération Nationale du Crédit Agricole dont le siège est à Paris (VIIIème arrondissement).

Càd : Faut-il souhaiter le

Propos recueillis par J.-F.H.

Fiscalité Réforme de la taxe professionnelle : une fausse bonne nouvelle Loin d’être une aubaine pour les entreprises, la réforme - et non la suppres- sion - de la taxe professionnelle en pénalise nombre d’entre elles. Explications.

L a pilule a du mal à pas- ser dans certaines entre- prises du Doubs. Pour eux, la réforme annoncée de la taxe professionnelle est la mauvaise nouvelle de plus dans un ciel enco- re sombre. Malgré les discours enthousiastes des responsables

dent, Christophe Bossonnet, est très remonté. “On entend par- tout parler de suppression mais c’est seulement une réforme, une modification du nom et du mode de calcul, explique-t-il. Cette taxe est rebaptisée “contribution éco- nomique territoriale” (C.E.T.).

pas à affirmer que c’est “une démarche honteuse. Le monde économique est vraiment trop chahuté à l’heure où bon nombre d’entreprises sont sur la corde raide.” Autres victimes du sys- tème, les concessionnaires auto- mobiles, elles aussi perdantes. Dans ce concert de réserves, seul le président de la C.C.I. du Doubs semble approuver la réforme. Selon Jean-Louis Dabrowski, “malgré quelques craintes pour certaines entre- prises, cette réforme est globa- lement une excellente nouvelle. C’était réclamé par le monde de l’entreprise depuis des années. Ce qui compte, c’est que toutes les T.P.E. et les P.M.E. devraient être gagnantes” pense-t-il.

politiques, l’année 2010 ne sonne pas le glas de la taxe professionnel- le. Il s’agit seulement d’une réforme. Si certains secteurs d’activité sont censés

Et les éléments d’information que nous avons laissent à croi- re que beaucoup d’entreprises seront pénalisées. Pour cer- taines d’entre elles, ce

Seul le président de la C.C.I.semble approuver.

sortir gagnants de la réforme, d’autres vont y laisser des plumes, notamment les secteurs de l’énergie, des finances et des services. Pour Xavier Thévenot, président de Franche-Comté Intérim (300 à 350 salariés), cet- te réforme est une catastrophe. “Je vais payer 5 à 7 fois plus que maintenant. Nous attendons les derniers ajustements. La seule chose que nous avons pu obte- nir, c’est le lissage de cette aug- mentation sur 5 ans. Cette nou- velle taxe est calculée que les salaires et comme dans les ser- vices, nous ne faisons quasiment que des salaires, on est taxé beau- coup plus que les autres. Avec la baisse d’activité de l’intérim de 30 à 40 % depuis la crise, cet- te réforme est la cerise sur le gâteau” s’emporte M. Thévenot. Le M.E.D.E.F. Doubs n’a pas manqué de réagir. Son prési-

ne sera pas supportable.” L’idée du gouvernement, en réformant la T.P., était de pou- voir rendre l’industrie françai- se plus performante. Mais semble-t-il, c’est fait au détri- ment d’autres secteurs d’activité. Christophe Bossonnet n’hésite

J.-F.H.

La réforme de la T.P. est censée favoriser les entreprises industrielles. Mais d’autres secteurs d’activité sont lésés.

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