Journal C'est à Dire 151 - Janvier 2010

L E P O R T R A I T

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Belle comme un camion… À 28 ans, Betty Tattu est cadre dans une entreprise de transport et de travaux publics. Elle a délaissé la conduite des camions pour approfondir sa future fonction de dirigeante de l’entreprise familiale. Guyans-Vennes

L’ image du camionneur, clope au bec, aux biceps gonflés et tatoués, photos de femmes dénudées épinglées à la cabine, a du plomb dans l’ai- le. À voir Betty Tattu, élégan- te brunette, on imagine mal qu’elle puisse manœuvrer un camion-benne rempli de gra- nulats ou dompter un 38 tonnes. Pourtant… À 28 ans, la jeune femme de Guyans-Vennes est aussi à l’ai- se au volant de son Scania rou- ge que lorsqu’elle charge des caillasses dans une des deux carrières gérées par l’entrepri- se dans laquelle elle occupe une place de cadre. C’est elle qui, titulaire de l’attestation de capa- cité, a permis à l’entreprise qui ne faisait alors que du T.P., de devenir prestataire de trans- ports en 2005. Son domaine de prédilection aujourd’hui, c’est la partie “carrières”, le trans- port et l’assainissement. C’est à l’âge de 22 ans que Bet- ty passe ses permis poids lourds et super-lourds. Depuis, elle sillonne les routes de la région au volant de ces engins. “Je conduis des semi-bennes, des por- te-engins et j’ai même fait le transfert de machines. J’ai croi- sé deux ou trois “ours” quand même mais de manière géné- rale, les mentalités ont beaucoup changé dans ces métiers, les femmes ne sont plus vues com-

me des extraterrestres. Ça fait du bien de voir un peu de fémi- nité dans ce monde de brutes…” dit-elle sur le ton de l’humour. Il faut avouer aussi que les machines ont évolué. “C’est fini le temps où les camions étaient impossibles à manier avec des volants immenses. Le métier s’est beaucoup féminisé ces dernières années, il y a plus de femmes que l’on croit.” Betty Tattu a mis peu de temps à choisir sa voie professionnel- le. Après un B.E.P. comptabili- té passé à Morteau et un Bac l’entreprise, elle poursuit alors son cursus en se formant à la direction d’entreprise et à la ges- tion commerciale. Elle complè- te peu à peu ses compétences techniques et s’occupe aujour- d’hui du développement de l’en- treprise. “C’est moi notamment qui gère les appels d’offres, qui cherche de nouveaux marchés… Là aussi, les mentalités chan- gent. Je pense que les hommes apprécient d’avoir une femme en face d’eux pour gérer les dos- siers.” Mais sa fierté, c’est aus- si de pouvoir parler d’égal à égal avec les hommes sur un chan- tier. “Quand je commande des Pro à Belfort, elle pas- se un an dans un cabi- net comptable. Les chiffres ne la passion- nent pas. Tout faisant ses premières armes au volant des camions de

hommes, je sais de quoi je par- le. Si l’un d’entre eux me sou- tient qu’il ne peut pas le faire, alors c’est moi qui le fais” tranche cette femme déterminée éga- lement passionnée de cheval et de moto. Comme les autres entreprises de ce secteur d’activité, la socié- té Tattu est confrontée à la bais- se générale d’activité. “C’est cet- te année que l’on arrive vraiment dans la crise. En 2009, tout le monde s’est affolé, les entreprises ont baissé leurs prix pour avoir du travail et l’année s’est à peu “ce n’est pas toujours évident de travailler en famille, il y a par- fois quelques frictions et il ne faut pas être rancunier.” Il n’em- pêche, les T.P., c’est dans les gênes de ce clan familial. Chez les Tattu, on travaille quasiment tous dans les T.P. Betty repré- sente la troisième génération depuis la création de l’entreprise familiale en 1958 par son grand- père Pierre. Et dans les repas de famille alors ? Eh bien, “on parle encore de pelleteuses, de camions, de trancheuses. Tou- jours les mêmes discussions. Ici, c’est une passion” avoue-t-elle. Les gérants actuels, Claude, près bien passée. Mais en 2010, il y aura for- cément moins de travail” confirme la jeune cadre dont l’entreprise emploie 25 personnes. Betty avoue aussi que

“J’ai croisé deux ou trois “ours” quand même…”

Betty Tattu, une femme déterminée dans un milieu professionnel plutôt masculin.

l’oncle de Betty et Jean, son père, arrivent doucement à l’âge de la retraite. Un jour, ce sera à Betty et à son cousin Olivier, également à son jeune frère Pier- re, de reprendre les rênes de l’entreprise. Mais dans le futur proche, Betty a pourtant une

autre priorité, beaucoup plus féminine… Elle mettra au mon- de un bébé au mois de mai pro- chain. Élevé dans cet univers 100 % dédié aux camions et aux pelleteuses, fille ou garçon, il y a fort à parier que ce futur représentant de la quatrième

génération d’entrepreneurs aura le chemin bien tracé pour reprendre un jour lointain la destinée de l’entreprise.

J.-F.H.

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