Journal C'est à Dire 148 - Octobre 2009

L A P A G E D U F R O N T A L I E R

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“Un transport pour la racaille d’Annemasse.” Le message du parti populiste à l’encontre des fron- taliers est révélateur d’un profond malaise. Qu’en est-il à La Chaux-de-Fonds ? Dérapages racistes : les frontaliers visés par l’U.D.C. La Suisse est-elle extrémiste ?

L e projet d’une ligne fer- roviaire entre Genève etAnnemasse (Haute- Savoie), baptisée C.E.V.A.,a fait dérailler l’Uniondémocratique du centre (U.D.C.),cette for- mation populiste de droite aux relents xéno- phobes. “Le C.E.V.A. ? Un nouveau moyen de transport pour la racaille d’Annemasse ! Expulsons les cri- minels étrangers ! Ne leur offrons pas encore un accès à Genève !” proclame un encart publicitai- re de l’U.D.C. publié dans la “Tri- bune de Genève”. Cette affaire a fait bondir le maire d’Annemasse, Christian Dupes- sey, qui a décidé de porter plain- te pour diffamation et propos racistes. Problème, les urnes ont montré le 10 octobre que les Genevois étaient de plus en plus revendi- catifs contre les frontaliers, en majorité des Français. Le Mou- vement citoyen genevois (M.C.G.), un parti populiste local

dont le principal cheval de bataille est la dénonciation des travailleurs frontaliers venus de France, a été le grand vain- queur des élections au Parle-

ment genevois en dou- blant sa représenta- tion au Grand Conseil. Inquiétant ? Sans dou- te. Confronté au chôma-

“Expulsons les criminels étrangers.”

L’encart publicitaire publié par l’U.D.C. dans la Tribune de Genève.

ge, l’extrémisme se développe- rait fortement aussi dans le can- ton de Neuchâtel, notre voisin, où l’U.D.C. voit ses rangs gon- fler. “À La Chaux-de-Fonds, il y a des personnes qui ont des récriminations sur les fronta- liers sur des bases simplistes mais cela reste relativement mar- ginal” dit Rémy Gogniat, char- gé de communication de la vil- le. “Je dirais qu’il y a une meilleu- re connaissance avec le rapport des frontaliers grâce à notre his- toire. Nous avons de bonnes rela- tions avec Morteau et les Fran- çais.” Presque rassurant.

E.Ch.

Religion La Chaux-de-Fonds ne s’oppose pas aux anti-minarets En Suisse, plusieurs projets de construction de minarets, déposés par des associations musul- manes, suscitent la méfiance. L e sujet fait débat, à tel point que lʼInstitut culturel musul- man et les Jeunes socialistes neuchâtelois ont orga- nisé fin octobre une conférence-débat sur le thème : “Anti-minaret : le débat doit avoir lieu !” Tariq Ramadan, pro- fesseur en islamologie, est notamment venu expliquer sa position après que La Chaux-de-Fonds ait décidé dʼautoriser les affiches “anti-minaret dans sa ville” alors que Neuchâ- tel les a refusées. Pour La Chaux-de-Fonds, la liberté dʼexpression doit primer. Rappelons quʼun collectif a placardé aux entrées de villes des affiches contre la création de minarets. La Commission fédé- rale contre le racisme - bien que très critique à lʼégard de ces affiches - estime quʼelles ne violent pas le code pénal et auto- rise lʼaffichage. Cette décision nʼempêche pas le Conseil com- munal de trouver lʼaffiche “choquante en ce quʼelle induit une dérive totalitaire en stigmatisant lʼensemble dʼune communau- té religieuse en Suisse (notamment les musulmanes) qui nʼa rien à voir avec un certain activisme islamiste international.” Une frange de la population oublierait-elle lʼouverture culturelle, la tolérance, la liberté religieuse et la non-discrimination des com- munautés ? Le Conseil communal ne prend pas parti pour ou contre lʼinitiative. “Cʼest aux citoyennes et citoyens de se déterminer sur la ques- tion” dit le Conseil qui préfère rappeler un certain nombre de valeurs quʼil estime nécessaires, dans le cadre de lʼétat de droit, à lʼexercice de la démocratie. Le Conseil communal se plaît dʼailleurs à relever quʼà La Chaux-de-Fonds, la communauté musulmane sʼintègre tout à fait normalement dans la popula- tion. Cette différence entre à La Chaux-de-Fonds et Neuchâ- tel montre que les Suisses ne savent plus à quel saint se vouer en matière de religion.