Journal C'est à Dire 143 - Avril 2009

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P L A T E A U D E M A Î C H E

Qui sont les Peugeot de Maîche ? Cinq jours par semaine, ils sont une vingtaine à prendre le bus au départ de Maîche pour se rendre à l’usine de Sochaux. Rencontre et voyage avec ces “Peugeot” du Haut-Doubs. De vrais lève-tôt. Maîche

I ls font le chemin inverse. Pen- dant que la plupart des habi- tants du plateau de Maîche mettent chaquematin le cap vers la Suisse pour se rendre à leur poste de travail,d’autres “des- cendent dans le bas.” Direction l’usine Peugeot-Citroën (P.S.A.) de Sochaux et les chaînes de montage des 308 et autres modèles de la marque au Lion. Au pays de l’horlogerie, la méca- nique a le droit de cité. Voilà 35 ans que Gérard Mau- vais fait les allers-retours Maîche-Sochaux grâce au bus affrété par son entreprise. Et il

n’a pas l’air fatigué pour un sou. “Je travaille de journée dans l’administratif” dit-il. Du coup, Gérard prend chaque matin le bus à 6 h 03 devant le magasin Champion de Maîche. Le soir avec ses collègues, il quitte à 16 h 10 le Pays de Montbéliard pour arriver à 17 h 09 à Maîche. D’autres se lèvent beaucoup plus

se termine à 13 h 15 ! Du cou- rage, sûr qu’il en faut. Et pour- quoi ne pas habiter plus près de l’usine ? “Parce que je suis atta- ché aux sapins” répond ironi- quement Gérard Mauvais, qui est aussi le chef du bus de cet- te ligne Maîche-Montbéliard, laquelle dessert les arrêts de Bief, Pont-de-Roide, Mathay…

tôt à l’instar des per- sonnes qui travaillent sur les chaînes de mon- tage… Ils doivent être devant l’arrêt de bus à

Sa mission : faire remonter les informa- tions entre les voya- geurs et la direction. L’année dernière, Peu-

“La ligne de Maîche a survécu.”

3 h 52 pour une arrivée à Sochaux à 5 h 21. Leur journée

geot a lancé une vaste refonte de ses lignes de bus. De 23 lignes

Gilles Thievent (à gauche), Daniel Saillet (en retrait) et Gérard Mauvais, trois Maîchois qui travaillent à “La Peuge”.

transportant 4 500 salariés, il n’en reste plus que 17. Celle de Luxeuil a notamment été sup- primée. Pas celle de Maîche. Les Peugeot du Haut-Doubs ont néanmoins eu peur que leur ligne subisse ce sort. Ils auraient été obligés de prendre leur voi- ture pour rejoindre un arrêt dans la vallée. “Une suppression de cette ligne directe, il n’en a jamais été question” répond Éric Mar- cot, responsable des transports à l’usine P.S.A. Selon le syndi- cat C.F.D.T., “supprimer cette ligne aurait été de l’inconscience car le chemin à parcourir en hiver n’est pas simple. Peugeot ne peut pas se permettre d’avoir des salariés arrivant en retard.” Pour les Maîchois, la préser- vation de la ligne réside dans le

nombre de personnes l’empruntant : “Notre nombre est régulier voire en augmen- tation.” Pourquoi sont-ils de plus en plus à nombreux à faire ce choix ? “Ma compagne travaille en Suisse. J’habitais Audincourt, mais je suis venu la rejoindre” répond Daniel Saillet, techni- cien en programmation. Il ne regrette pas ce choix : “Ce n’est pas la même mentalité ici, c’est plus sympa.” Son collègue Gilles Thievent, employé à l’atelier d’outillage, a fait le même chemin. Il a quitté il y a un an le Pays de Mont- béliard pour rejoindre également sa compagne à Maîche. Lui non plus ne semble pas déçu : “Ici, ça bouge plus que dans le “bas”… mais je n’arrive pas à me faire à

l’hiver et à la conduite sur la nei- ge” lâche-t-il dans un éclat de rire. Et que font les salariés une fois dans le bus ? “Ils dorment” s’amuse Gérard Mauvais. “Moi je n’y arrive pas !” Pour l’heure, aucun des trois n’a répondu à l’appel des sirènes de Suisse. “À Peugeot, on a quand même la sécurité de l’emploi” souffle Gilles Thievent. Si cer- tains de leurs collègues ont dû chômer, ce ne fut pas leur cas. Tous se montrent solidaires et espèrent que la crise fait désor- mais partie du passé. Une cho- se est claire : s’ils ont perdu des heures de sommeil d’un côté, ils ont gagné en qualité de vie de l’autre. Visiblement, cela n’a pas de prix ! E.Ch.

Pour arriver à 5 h 21 à leur poste de travail de Sochaux, les Maîchois travaillant en tournée quittent le plateau à 3 h 55.

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