Journal C'est à Dire 135 - Septembre 2008

É C O N O M I E

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Sérieuse baisse d’activité chez les bûcherons Le ralentissement de l’activité des bûcherons arrive au plus mauvais moment dans cette profession déjà en souffrance. Crise passagère ou amorce d’un déclin inquiétant ? Forêt

régional des entrepreneurs fores- tiers, celui des entrepreneurs agricoles et l’association Pro- forêt. Cette baisse d’activité se conjugue à la hausse des car- burants et des dérivés. Consé- quences : les trésoreries sont dans le rouge. En juin dernier, fait assez rare, les bûcherons et débardeurs se sont associés à la mobilisation des professionnels du transport en revendiquant eux aussi la mise en place d’un carburant détaxé. “Ces hausses rapides nous pénalisent dans notre mode de fonctionnement. En général, on prend des chan- tiers avec l’O.N.F. ou d’autres donneurs d’ordres qu’on trai-

tera plusieurs mois plus tard, d’où la nécessité aujourd’hui de bénéficier comme les routiers d’un système de revalorisation plus réactif qui varie à la haus- se ou à la baisse en fonction du cours du pétrole.” Les bûcherons débardeurs se désespèrent aussi de ne pouvoir retoucher la T.V.A. sur l’essence qu’ils utilisent dans leurs tron- çonneuses et débroussailleuses. Outre la répercussion des car- burants, Laurent Petite estime qu’il “faudrait pouvoir augmenter nos prestations de l’ordre de 8,5 %. Cet objectif s’avère com- pliqué car on n’est pas dans une situation d’offre et de deman- de favorable. Actuellement, la

L a passion de la forêt, les conditions de travail plus confortables liées à la modernisation des engins forestiers, l’espoir de bénéficier des plus-values d’une démarche de qualité dans l’air du temps,tous ces éléments suffiront-ils à confor- ter l’avenir des entrepreneurs de travaux forestiers ? “On fait quand même un beau métier” , affir- me Laurent Petite qui exerce cette profession depuis 1986

dans le Haut-Doubs. De la fibre, il en faut car la situa- tion est plutôt morose. “On est dans le marasme complet. On subit tous les ans un creux en été. Mais la récession enclenchée depuis avril prend des propor- tions inhabituelles avec un ralen- tissement de près de 50%” , pour- suit celui qui préside les entre- preneurs de territoire en Franche-Comté (E.D.T.F.C.). Ce groupement réunit le syndicat

Entrepreneur de travaux forestier depuis 1986, Laurent Petite espère une sortie de crise rapide pour sa profession.

priorité, c’est plutôt de trouver du travail.” On dénombre en Franche-Com- té environ 600 bûcherons débar- deurs dont une bonne moitié intervenant sur les peuplements résineux du Haut-Doubs et Haut-Jura. Cette corporation est en proie au vieillissement et peine à se renouveler. “Très peu de jeunes s’installent et quand ils le font, c’est souvent dans le cadre de la pluriactivité.” Le manque de reconnaissance est flagrant tout comme les inci- tations et les encouragements à s’orienter vers ce métier qui reste difficile. “Même si l’arrivée d’engins de plus en plus per- formants apporte davantage de confort.” La seule éclaircie dans ce tableau plutôt sombre réside peut-être dans la volonté d’instaurer de nouvelles pratiques d’exploitation plus respectueuses de l’environnement forestier. “Depuis 10 ans, on essaie de mettre en place une démarche qualité à travers le dispositif Forêt Défi. C’était peut-être trop prématuré à l’époque car on n’a pas encore constaté de réelles demandes de la part des don-

neurs d’ordres, qu’il s’agisse des propriétaires privés ou des scieurs. Seul point positif, les entrepreneurs de travaux fores- tiers engagés avaient l’obligation de suivre plusieurs journées de formation axées autour de la sécurité et la préservation du milieu. Cela nous a également permis d’échanger et de se ren- contrer.” Dommage que tous les beaux discours sur la gestion durable des forêts ne s’appliquent pas encore à tous les échelons de la filière. Mais la démarche qua- lité, c’est des coûts supplémen- taires pas forcément compatibles avec la rentabilité économique. Autre signe de la morosité ambiante, le système de rem- placement Proforêt Entraide est aujourd’hui en stand-by . Ins- piré du modèle agricole, ce ser- vice unique en France avait per- mis d’embaucher jusqu’à quatre salariés après la tempête de 1999. L’effectif abaissé à deux l’an dernier ne compte plus aucun élément. Cet état de léthargie reflète finalement assez bien le moral des troupes. F.C.

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