Journal C'est à Dire 133 - Juin 2008

É C O N O M I E

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Le cinquantenaire de l’A.O.C. Comté Le produit phare de l’agriculture régiona- le fut, le 17 juillet 1958, l’un des premiers fromages à se voir attribuer une Appella- tion d’Origine Contrôlée. Retour sur un com- bat à l’origine d’une formidable réussite. Agriculture

Quelques repères 1880 : début de lʼappellation “gruyère de Comté” dans les textes pour insister sur la pro- venance régionale. Le Com- té devient un élément identi- fiant de sa région. Il y a 1 800 fruitières à cette époque avec une fabrication souvent sai- sonnière. 1882-1905 : crise agricole et industrielle qui provoque dʼimportantes modifications : modernisation du matériel (machine à vapeur, électrici- té), création des écoles de lai- terie, sélection de nouvelles races laitières, apparition des maisons dʼaffinage… 1914 : il existe environ 500 frui- tières. Pendant la guerre, de nombreux fromagers viennent de Suisse remplacer les hommes partis au front. En 1919, dans le Doubs, plus de la moitié des fromagers étaient suisses. 1924 : on commence à parler de “Comté”. 1945 : création du Syndicat de Défense du Gruyère de comté 1952 : définition de lʼaire de production du Comté. 1958 : création de lʼA.O.C. Com- té. 1963 : création du C.I.G.C. Dans les années 1960-1970, on assiste à une diminution importante du nombre des frui- tières du fait de nombreux regroupements. Venez découvrir le tout nouveau SoundPort Cette nouvelle oreillette Bluetooth est conçue pour les communications

C ette histoire chaotique commence avant 1914 autourdel’appropriation du mot “gruyère”. Les Suisses revendiquent en effet le monopoledel’utilisationdece ter- me. Le sujet est à l’ordre du jour de nombreuses conférences lai- tières internationales. Il se sol- de paruncompromisentreSuisses

recherchée en assignant en jus- tice une épicière de Dijon qui avait vendu du “gruyère de com- té” provenant de la Côte-d’Or. Affaire somme toute banale aux conséquences majeures puisque le jugement du tribunal de Dijon du 22 juillet 1952 définit clai- rement l’aire de production du “gruyère de comté” et reconnaît au Syndicat le droit de le faire respecter. mise en place de l’interprofession et du Comité Interprofessionnel du Gruyère de Comté (C.I.G.C.) qui voit le jour en 1963. “C’est une grande bagarre qui a oppo- sé pendant 20 ans les défenseurs de la filière lait à comté aux fabri- cants de lait industriels. Les seconds considéraient la démarche des premiers comme un excès de protectionniste” , indique Jean-Marie Pobelle, le maire de Loray qui fut longtemps membre du C.I.G.C. Un combat difficile mais nécessaire. Il a fal- lu surmonter bien des difficul- tés avant de pouvoir établir un cahier des charges très fort. “Sans ça, je crois que le comté Parallèlement au règle- ment “politique” de la question A.O.C., l’autre bras de fer concerne la

à l’âge de 88 ans. “Cette personne assez extraordinaire était ingé- nieur général de la région Franche-Comté. Il a très forte- ment contribué à la mise en pla- ce de l’A.O.C.Avant de venir dans notre région, il était en poste en Champagne et il s’est toujours évertué faire du C.I.G.C. une structure similaire au C.I.V.C. : Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne.On a su fai- re par le lait et par le comté ce que les grands domaines viti- coles ont fait avec les grands crus. L’A.O.C. comté reste une extraordinaire réussite que beau- coup nous envient. Ce serait une erreur monumentale que d’abandonner tout ça.” Le produit a décroché son sésame le 17 juillet 1958 (photo C.I.G.C.).

etFrançaisautermeduquel les Franc-Comtois réussis- sent àconserverl’utilisation dumot“gruyère”sans pour autant obtenir des garan- ties définitives. Les choses

“Sinon, tout est foutu.”

n’existerait plus aujourd’hui.” Depuis 1958, le comté a été confronté à d’autres crises. Mais cette fermeté à défendre ce patrimoine, les conditions de production, les fruitières, sans oublier le prix de vente contri- bue largement à son succès. “En 25 ans, la production est pas- sée de 35 000 à 50 000 tonnes et les marchés progressent enco- re.” Pour autant, dans un contex- te laitier en pleine mutation, est-ce que ça vaut encore le coup de faire du comté ? La réponse de cet ancien res- ponsable de la chambre d’agriculture est sans ambi- guïté. “Il faut raisonner dans la durée, sinon tout est foutu. Depuis 30 ans, on a démontré qu’on a une régularité de prix.

L’A.O.C. signifie aussi le choix d’une agriculture raisonnée, et qu’on le veuille ou non d’un système encore artisanal au sens noble du terme. On est en pha- se avec le Grenelle de l’environnement.Avec l’évolution du contexte, les agriculteurs ne sont plus aussi solidaires qu’avant. Ils raisonnent plus à titre individuel et c’est peut-être le seul souci qui puisse fragili- ser la filière.” Ce cinquantenaire concrétise d’abord une aventure collective. Producteurs, transformateurs et affineurs ont toujours avan- cé dans le même sens pour défendre l’A.O.C. Jean-Marie Pobelle en profite d’ailleurs pour rendre un hommage particulier à René Poly, décédé récemment

évoluent après la Seconde Guer- re Mondiale. En France, le mot “gruyère” cède progressivement sa place à celui de “comté”. Dans le même temps, la production de gruyère se développe hors de sa zone traditionnelle dans les Ardennes,danslaMeuse,enAqui- taine et ensuite dans l’Ouest. En1945,lesFranc-Comtoiscréent le“Syndicat de défense du gruyè- re de comté”, première ébauche d’une organisation interprofes- sionnelle. Rien n’est cependant acquis. Le Syndicat comtois doit encore batailler dans la reconnaissan- ce de l’originalité de sa produc- tion. Il trouve l’opportunité

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