Journal C'est à Dire 125 - Septembre 2007

L E P O R T R A I T

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Roger Rougeot : le “Léon Zitrone” des comices Éloquent et toujours le mot pour rire, cet ancien com- mercial dans l’aliment pour bétail a trouvé dans les comices matière à s’épanouir au contact d’un mon- de rural et agricole auquel il reste très attaché. Il est le speaker officiel des comices du Haut-Doubs. Agriculture

beaucoup à cet homme” , se sou- vient Roger encore surpris qu’on ait pu faire appel à ses services alors qu’il n’a jamais trait la moindre vache de sa vie. Un détail qui n’a apparemment aucune influence sur la qualité de ses interventions. Pont-de-Roide, Clerval, Baume- les-Dames, L’Isle-sur-le-Doubs, Montbéliard, Roger Rougeot couvre peu à peu de sa voix tous les comices du bas. Sa réputa- tion prend ensuite de l’altitude et plane au-dessus des comices de Maîche et de Morteau qu’il anime respectivement depuis 10 et 8 ans. “Mon grand regret, c’est de ne pas pouvoir aller du côté de Pontarlier, Mouthe, Levier. Comme les comices du refuser les nombreuses sollici- tations de son ami “Lilou” Laf- fly, l’ancien président de la Fédé- ration des comices du Doubs. Outre la Fête du cheval dans les années quatre-vingt, notre speaker s’est vu confié en 2000 l’honneur d’animer le premier “Super comice” de Pontarlier. Une expérience qu’il renouvel- lera en 2005. Attention, Roger n’est pas le seul à pendre la parole pendant ces grandes réunions comiciales. Il ne sort jamais du champ de ses compétences, à savoir assurer la partie protocolaire, présen- ter les personnalités officielles, bas et du haut se déroulent aux mêmes dates, je trouvais très délicat de laisser tom- ber ceux qui m’ont fait confiance” , explique Roger, contraint de

les interviewer, accueillir les médias, remercier les sponsors et les donateurs en évitant d’en oublier. “C’est à moi d’appor- ter “un peu de gueule” au comi- ce, d’introduire une touche de convivialité. Je dois agir sans gêner les pointeurs et techniciens de l’U.P.R.A. qui dirigent les opé- rations de pointage. Quand on est sur un comice à consonan- ce urbaine, j’interroge par exemple un technicien qui pré- sente son travail au public. J’ai pour principe de ne jamais por- ter un jugement, de ne pas m’im- miscer dans l’avis des experts.” Pour durer, il faut savoir rester à sa place sur l’échiquier comi- cial et cela, Roger l’a vite com- pris. Bien placé pour compa- forestier. “Dans le bas, des petits comices ont disparu pour se rat- tacher par exemple à celui de Montbéliard qui tourne main- tenant de village en village en passant même là où il n’y a plus aucun agriculteur. Ces rendez- vous n’ont pas la même enver- gure que dans le haut. Mais il y a de la qualité. En tout cas, je m’y sens aussi à l’aise qu’à Mor- teau, fief de la montbéliarde.” D’Edgar Faure à Paul Bobillier, Roger a côtoyé les plus grandes figures politiques et agricoles comtoises. La liste des agricul- teurs, techniciens, présidents de comices, responsables syn- rer les comices du haut et du bas, il aspire à voir ceux du bas deve- nir des grandes fêtes villageoises comme cela se généralise désormais du côté du Haut-Doubs

“E n 1984, j’ai eu l’hon- neur d’animer la Fête du cheval à Chaffois aux côtés de Léon Zitrone. Quand on m’a fait cette proposition, j’avoue que je n’en menais pas large à l’idée de travailler avec un tel personnage. Il s’est mon- tré très cordial. J’ai vécu des moments extraordinaires. Le pre- mier jour, je l’appelais “Mon- sieur Zitrone”, puis “Léon Zitro- ne” et finalement “Mon cher Léon”. Beaucoup ont remarqué qu’on partageait une certaine ressemblance physique et le même goût des plaisirs de la table, d’où ce surnom de “Léon Zitrone des comices”. Je n’ai jamais prétendu avoir sa ver- ve et ses connaissances” , recon- naît humblement Roger Rou- geot. Au départ, rien ne le prédesti- nait à s’intéresser à la question. Originaire d’Autechaux-Roide, ce fils d’ouvrier de chez Peugeot rêve d’abord d’exercer dans le journalisme. Le poste radio à l’oreille, il suit avec attention les émissions consacrées à l’ac- tualité sportive, économique, voire politique, s’employant à commenter lui-même certains événements. “Pendant les vacances, mes parents m’en- voyaient chez des amis qui

tenaient une petite ferme où tout fonctionnait encore à l’ancien- ne. J’ai connu le travail avec les chevaux, le vieux matériel” , pour- suit Roger Rougeot. Un vécu qui lui est aujourd’hui bien utile quand il s’agit d’évoquer entre deux présentations de bêtes le matériel et les traditions d’au- trefois. À défaut d’embrasser une car- rière dans les médias, Roger suit une formation de comptable. À 20 ans, il entre chez Thiébaud, le fabricant d’aliments pour le bétail à Rosières-sur-Barbèche. Son sens du contact et son “bagout” le prédisposent davan- tage à occuper un poste de com- mercial. Après 6 ans dans les bureaux, il entame une nouvelle carrière. “J’ai passé 34 ans sur les routes à vendre aux agri- culteurs les produits de la mai- son Thiébaud.” En 1973, il accep- te d’aller représenter son entre- prise sur un repas de comice à Pont-de-Roide. Un repas au cours duquel son penchant natu- rel pour l’animation ne passe pas inaperçu. Sa prestation retient notam- ment l’attention de Jules Boi- teux, à l’époque président du comice de Saint-Hippolyte qui lui propose un rôle d’animateur. “Tout est parti de là. Je dois

“Il n’a jamais trait la moindre vache de sa vie.”

Une voix, de l’humour, une bonne dose de respect et la passion de la communication, Roger Rougeot avait toutes les qualités pour devenir l’animateur incontournable des comices.

dicaux, élus qu’il a rencontrés serait trop longue à établir, au risque de ne froisser personne par oubli. Dans son planning, les week- ends de septembre et octobre affichent toujours “réservés”. Il espère bien continuer encore quelques années. “Si la santé me le permet et tant qu’on me supportera encore. J’ai traversé plusieurs générations d’éleveurs. Pour moi, c’est aussi une façon de ne pas trop vieillir.” Fin août, le “Zitrone des comices” a reçu de Daniel Prieur la médaille du Mérite agricole.

Un beau signe de reconnaissance pour celui qui met également ses talents d’animateur au ser- vice du Téléthon de Blamont. Un investissement très per- sonnel. Christelle, la fille de Roger, est en effet touchée par le handicap. “Sa mère est décé- dée de la même maladie. Chris- telle a aujourd’hui 31 ans. Dès que j’en ai l’occasion, je l’emmène avec moi. C’est un peu plus com- pliqué aujourd’hui car son cas s’aggrave au fil du temps” , évoque Roger en toute sincéri- té et sans tabou. F.C.

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