Journal C'est à Dire 117 - Décembre 2006

S A N T É

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Frédéric Allemann, le combat d’une vie Un patient pas vraiment ordinaire

Frédéric Allemann faisait partie de l’équipe de pré- paration de l’équipe de France de canoë-kayak.

À 55 ans, le chiropracteur pontissalien se bat pour recouvrer son autonomie depuis son accident de V.T.T. survenu en août 2005. Il a été un pra- ticien de référence dans le Haut-Doubs horloger.

terrain dans les champs de Mont- faucon ce jour d’été. Et puis, plus rien. Il se réveille quatre jours plus tard au C.H.U. de Besan- çon après avoir été placé en coma thérapeutique, incapable de ne bouger aucun de ses membres. “Quand on m’a expliqué ce que j’avais, je me suis dit que j’en aurais pour 6 à 18 mois. Et je pensais récupérer 80 à 90 % de mes capacités physiques.” En chu- tant sur la tête “presque à l’ar- rêt” , le cycliste ne s’est rien cas- sé. “Je n’ai même pas eu une entorse cervicale. En tombant, j’ai étiré ma moelle épinière ce qui a généré des lésions très par- ticulières, en mosaïque. La moel- le n’est pas sectionnée” comme elle l’est dans le cas d’une per- sonne paraplégique ou tétraplé- gique. Mais la médecine ne connaît pas tout des lésions médullaires, ni le degré de récu- pération que peut atteindre le patient. C’est du cas par cas. Frédéric Allemann vit donc avec un espoir somme toute “partiel.” Le chiropracteur est lucide. Pour quelqu’un dont le métier est de remettre le squelette d’aplomb, il ne se raconte pas d’histoire. Un an et trois mois après l’ac- cident, ses progrès ne sont pas aussi spectaculaires qu’il l’avait imaginé. “Je ne sais pas jusqu’où je pourrai aller. Je chasse toute

F rédéric Allemann est aux Salins de Bregil- le à Besançon depuis maintenant 11 mois. Les séances de kiné quotidiennes l’aident à redonner un peu de mobilité à son corps meurtri. Pas question de relâ- cher l’effort. Le temps joue contre lui et il le sait. Chaque progrès est une bataille gagnée sur le handicap. C’est un pas de plus vers une autonomie qu’il a per- du suite à une chute à V.T.T. le ses jambes et de ses bras, il se bat obstinément aujourd’hui, avec une volonté de fer, pour retrou- ver son indépendance. Pouvoir conduire, se déplacer, travailler, ne dépendre finalement de per- sonne, voilà son objectif. Le doc- teur Paratte et son équipe l’ac- compagnent dans son combat. “Je suis bien entouré ici. J’ai la chance d’être entre de bonnes 28 août 2005 qui l’a cloué dans un fau- teuil. Privé presque tota- lement de l’usage de

mains” reconnaît Frédéric Alle- mann. “Je progresse ajoute-t-il. Je suis capable de marcher une centaine de mètres avec un déam- bulateur.” C’est encourageant, mais insuf- fisant encore aux yeux de cet homme, chiropracteur de son état. Il veut aller jusqu’au bout du temps qui lui est imparti avant de se résoudre à dresser un bilan définitif de son état de santé. Il sait qu’il lui reste un peu plus de six mois pour progresser. Ensui- le il veut mettre tous les atouts de son côté. D’ici la fin de l’an- née, il doit rejoindre un centre en région parisienne, spécialisé dans la prise en charge de ce han- dicap pas tout à fait comme les autres puisqu’il laisse au patient le droit d’espérer aller mieux. La mémoire de Frédéric Alle- mann s’arrête trois minutes avant l’accident. Il est sur son vélo tout te, sa situation se sta- bilisera, compromet- tant tout espoir d’amélioration. C’est la raison pour laquel-

puise son énergie. Depuis qu’il est hospitalisé, un formidable élan de solidarité s’est organi- sé autour de lui. Sa famille, ses amis, ses copains, et même des patients le suivent. “Je suis accompagné d’une manière incroyable par mon épouse. Je me suis créé des amis dont le sou- tien est indéfectible. Tous font preuve d’une générosité excep- tionnelle. Çam’aide à tenir” lâche- t-il. C’est aussi pour cet entourage humain qu’il se bat aujourd’hui pour jeter les bases de sa nou- velle vie et construire son ave- nir. Compte tenu de son état phy- sique qui le prive de toute sen- sibilité, il ne pourra plus exercer sonmétier de chiropracteur. C’est

sans doute pour lui la chose la plus difficile à accepter. Qu’im- porte, les pages se tournent mais ne se déchirent pas. Travailleur jamais résigné, il s’est remis à ses livres de chiropractie pour apprendre, se perfectionner, amé- liorer ses techniques. S’il ne peut plus exercer, il peut transmettre son savoir et son expérience pro- fessionnelle à des étudiants com- me aux salariés des entreprises. À Paris, l’école de chiropractie l’a sollicité pour donner des cours. La première rencontre avec les élèves en octobre fut concluan- te. À 55 ans, Frédéric Allemann trace son autre chemin. Une vie différente, mais qui a aussi ses sourires. T.C. Christian Jouillerot vous souhaite d’agréables fêtes de fin d’année

pensée négative. Mais la voilu- re de l’enthousiasme s’est rédui- te. Je rêve d’autonomie, de mar- cher ne serait-ce qu’avec une can- ne. Mais est-ce que je ne vais pas m’arrêter aumilieu du gué” confie- t-il, redoutant ne pas pouvoir atteindre son objectif. La pers- pective de cette inconnue lézar- de parfois la carapace solide que s’est constituée cet homme qui ne vit sans amertume ni révolte sa situation et refuse donc que l’on s’apitoie sur son sort. Fré- déric Allemann lutte avec la même opiniâtreté que lorsqu’il faisait partie du staff médical de l’équipe de France de canoë-kayak avec laquelle il a participé à plu- sieurs olympiades. C’est dans son entourage qu’il

“La voilure de l’enthousiasme s’est réduite.”

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