EN MODE ACTION 05 - Octobre 2025
Automne 2025| EN MODE ACTION.
Dette publique
EXPERT ➜
“IL EST TEMPS DE PRENDRE LA MESURE DU DÉFI QUI EST DEVANT NOUS” Président de Fipeco (Finances Publiques et Économie) et conseiller maître honoraire à la Cour des Comptes, François Écalle scrute avec attention l’évolution des finances publiques en France. Selon lui, la situation justifie un effort collectif. Les collectivités locales doivent prendre leur part. Propos recueillis par Thomas Comte
En Mode Action : L’agence de notation Fitch a dégradé la note de la France de AA- à A+. Le signal est-il inquiétant alors que se profile l’élection présidentielle de 2027 ? François Écalle : Cette note est un mauvais signe, mais ce n’est pas un signe catastrophique. Les finances publiques resteront un enjeu car d’ici l’élection présidentielle nous ne serons sans doute pas parvenus à arrêter la dérive de la dette. À supposer que l’on commence à faire des efforts pour réduire le déficit public, cela se fera avec le concours des collectivités locales. Je rappelle que les trois grands postes de dépenses publiques en France sont les retraites (1/4), la santé (20 %) et les collectivités locales (20 %). L’urgence est de reprendre le contrôle de la dette publique en la stabilisant. FE : D’une manière générale, les dépenses des collectivités locales ont augmenté plus vite qu’ailleurs. Depuis les années quatre-vingt-dix, les effectifs dans la fonction publique territoriale ont progressé d’environ 45 %. C’est beaucoup plus que dans la fonction publique d’État ! En 2024, les collectivités locales accusaient un déficit (N.D.L.R. : 11,4 milliards d’euros) qui reste nettement inférieur à celui de l’État. Elles sont globalement à l’équilibre sur le plan budgétaire. Mais il ne faut pas oublier que l’État les subventionne chaque année à hauteur de 50 milliards d’euros. Les élus locaux répondent que c’est normal puisque cela vient accompagner le transfert de compétences. Mais cela ne les exonère pas pour autant. L’État a déjà fait beaucoup d’efforts. Par exemple, les effectifs de la fonction publique d’État ont diminué nettement pendant le mandat de Nicolas Sarkozy. Il est temps de sortir de ces discussions et de prendre la mesure du défi qui est devant nous. Chacun devra prendre sa part à l’effort pour redresser les finances publiques : l’État, comme les collectivités locales et la sécurité sociale. En Mode Action : Est-ce que supprimer un échelon dans l’organisation territoriale est la solution pour faire des économies. Si oui, lequel ? FE. : Je ne sais pas quel échelon il faudrait supprimer. On évoque parfois la suppression du Département qui En Mode Action : Faut-il réformer en priorité les collectivités locales pour faire des économies ?
"Cela se fera avec le concours des collectivités locales.”
François Écalle : “Je ne sais pas quand la crise arrivera en France, mais si on ne fait rien, elle aura lieu.”
fait principalement du social pour le compte de l’État. Cet échelon est-il vraiment utile ? De la même manière, il faudrait revoir cette frontière entre la commune et la communauté de communes. Ce qui est certain, c’est qu’il y a urgence à simplifier cette organisation territoriale et à revoir les compétences des uns et des autres. C’est un énorme chantier. Depuis le début de décentralisation et les lois Defferre, on cherche la bonne organisation. Je suis assez pessimiste sur nos chances d’y arriver alors que chacun est attaché à son clocher. FE : Ce ne serait pas totalement inédit. Dans le monde les pays qui ont fait des efforts considérables pour réduire leur déficit public et reprendre le contrôle de leur dette, y sont parvenus après une crise. C’est le cas de la Suède, du Canada. C’est le cas aussi de l’Espagne, du Portugal, qui ont connu des années très difficiles après une crise financière au début des années 2010. Je ne sais pas quand la crise arrivera en France, mais si on ne fait rien, elle aura lieu.. Q En Mode Action : Faudra-t-il que nous soyons en crise, au pied du mur, pour réagir ?
22 |
Made with FlippingBook Annual report maker